Rature

Mi nouvelle, mi album et vraie réussite, cette rature est très loin d’en être une. Cette histoire sublimée par les dessins envoutants et oniriques de Lucille Clerc nous emporte dans les tourments d’un père.

Parfois il avait de drôles de pensées. Des pensées de père triste. Inconsolable. Faible. Couillon. Meurtri. Oui s'en voulait. Il se disait qu'il aurait mieux valu que le fils disparaisse vraiment ce jour là. Que la mer le prenne et ne le relâche pas. Le tue pour de bon. Au moins il aurait su. Il aurait su ou il était. Mort. Bien mort. Dans les nuages ténébreux d'algues et de limons. Dans les courants bleu de Prusse. Dans les fonds sans fond. Cobalt. Gris. Transi. Flottant. Mort agité. Cadavre-cauchemar dévoré. Tandis que là, Il ne savait rien. Rien. Et cela le rongeait. Comme le sel sur une plaie. Le visage sur la lèvre blessée. Enfant. Mon enfant. Mon fils.
Rature de Philippe Claudel et illustrations de Lucille Clerc

Un pêcheur taiseux. De ceux qui ne savent pas dire autrement qu’avec leurs actes.

Et la mer, violente, impitoyable et généreuse.

Mais comment dire certaines choses quand on a pas appris à parler… A son fils, sa femme… ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
C'est toujours la même chose quand on s'approche. Quand on s'approche vraiment d'elle. On est attiré. Aspiré.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Le Rature est toujours le premier bateau à quitter le port, et le dernier à y rentrer. Celui qui en est le patron est maladroit avec les mots, mais il sait que sur son fileyeur, il est à son exacte place, opérant les gestes millénaires, retirant du ventre immense de la mer de quoi nourrir les hommes, sous les nuages gris, les soleils et les étoiles. Le jour où il a emmené son fils pour la première fois, il s'en souvient comme dans un rêve. Son fils, grand désormais, et qui aurait dû être marin pêcheur, comme lui, et comme son père avant lui. Et pourtant, le fils est parti un jour. Avec la rage et la colère.

Cela fait combien de temps déjà ? Faut-il donc qu'il compte les semaines, les mois et les années, à s'en faire mal ? Et faut-il espérer son retour ?

Lucille Clerc a exploré toutes les nuances déployées par le texte de Philippe Claudel pour lui faire écho et l'accompagner à travers dessins, gravures, photos... Comment traduire le froid, le manque, la tristesse mais aussi l'amour, la force des liens, la transmission, la joie de la complicité. Ses illustrations incarnent magnifiquement toute la sensibilité du récit.

Quand je te frappe : portrait de l’écrivaine en jeune épouse

En Inde (mais c’est la même chose partout, non ?), une femme, écrivaine, épouse un homme qui rapidement, l’isole (autre ville, déconnexion des réseaux sociaux, confiscation des mots de passe mail…) et… rabaisse, exige, abuse, frappe, viole, menace de pire encore…

Et si certaines pages sont insoutenables, elles semblent tellement réelles.

L'espoir me retient d'en finir avec la vie. L'espoir est la douce voix qui me trotte dans la tête et me retient de fuir. L'espoir est le traître qui chaîne à ce mariage.
L'espoir que les lendemains seront meilleurs. L'espoir que mon mari renonce enfin à la violence. Comme dit le dicton, l'espoir est le dernier à mourir. Il m'arrive de regretter que l'espoir ne m'ait pas quittée plus tôt, sans mot d'adieu ni accolade, m'obligeant ainsi à agir.
Quand je te frappe : portrait de l’écrivaine en jeune épouse de Meena Kandasamy

Et où sont les amis, la famille, la police, les voisins ?
Et que fait la justice ?

Je suis cette femme qui ignorait qu'elle portait en elle cette autre femme, sauvage, extatique. L'étrangère que j'emmène en ville. L'étrangère que j'apprends à connaître, l'étrangère insoumise que j'ai sous la peau et qui refuse de se laisser juger.

Le récit d’une femme, seule, qui résiste et qui espère encore… jusqu’à quand, jusqu’à quoi ?

Un roman glaçant !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Ma mère en parle encore.
Cinq années se sont écoulées et, chaque année, sa version de l'histoire mute, se transforme. La plupart des circonstances sombrent dans l'oubli - les différents épisodes, le mois, le jour, la saison, les et cetera et les ainsi de suite - , et ne subsistent au final que les détails les plus absurdes.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Alors qu'elle se remettait d'une déception amoureuse, la narratrice, prise entre ses aspirations et les attentes de ses parents, s'est quelque peu précipitée dans le mariage. L'heureux élu est un brillant universitaire, un admirable militant - l'homme idéal ?

Mais la jeune femme déchante vite, confinée dans sa maison à Mangalore, loin de sa famille, de ses amis. C'est d'abord ses habitudes que son mari entreprend de réformer : il faut quelle cesse de passer tant de temps sur internet, sur sa boîte mail, sur les réseaux sociaux - et puis, finalement, sur son ordinateur. Pour elle qui vit de son écriture, c'est presque un arrêt de mort. Il faut quelle devienne une parfaite femme du peuple, qu'elle assimile et incarne la doctrine marxiste. Et surtout, surtout, qu'elle respecte son époux et se conforme en tout point à ses désirs. Cet « endoctrinement » passe par la violence, qui emprunte toutes les ramifications possibles, plus perverses les unes que les autres.

Pour ne pas sombrer, la narratrice lutte, elle écrit dans sa tête, imaginant comment raconter son histoire, cherchant la moindre faille. Peu à peu, elle invente un stratagème afin de s'en sortir, de garder le contrôle de sa propre vie. De ne pas disparaître.

Porté par une voix puissante, ce récit de survie polymorphe, étonnamment lumineux, offre un éclairage salutaire sur les violences faites aux femmes, en Inde et dans le monde. Créant une tonalité singulière, à la fois intime et littéraire, l'auteur décortique avec rage et brio le mécanisme de défense inaltérable que constitue le rapport à la fiction.

La vie heureuse

Voilà une vie heureuse pleine de délicatesse. Oui, même si l’histoire est bien différente, les émotions m’ont semblé bien similaires à ce roman précédent. David réécrirait-il toujours selon le même pattern1 ou aurait-il un message qu’il ne cesserait de vouloir transmettre ?

Éric s'était levé tôt. Le malaise de la veille était une histoire ancienne. Il se sentait en forme, prêt à en découdre avec les équipes de Samsung. Il tira les rideaux pour observer un long moment Séoul, une ville qui semblait ne jamais dormir, une ville ayant sans cesse l'air de fuir (comme si elle avait quelque chose à se reprocher). Éric se laissa émerveiller par le spectacle maussade et pluvieux. Il y avait là une poésie du gris. Comme tous ceux qui souffrent, il avait si souvent rêvé de s'oublier dans un pays étranger, de se perdre dans la première foule inconnue qui s'offrirait à lui. Du douzième étage de l'hôtel, il observait les ruelles et les impasses autour de l'artère principale. Il y avait tant d'endroits où se cacher. Le royaume de l'anonymat lui tendait les bras.
La vie heureuse de David Foenkinos

Une histoire en trois période. Et si la première ma semblé longuette et la dernière un peu mélo, la deuxième m’a franchement bien amusé.

Allons David, il est temps de renaître et de laisser enfin exploser cette vie heureuse qui n’ose l’être !

1 Merci encore pour les deux trois bonnes blagues des notes de bas de page

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Éric Kherson appréhendait toujours de prendre l'avion. II dormait en général assez mal la veille du voyage, se laissant dériver vers les pires scénarios possibles, imaginant tout ce qu'il laisserait derrière lui après sa mort violente dans un crash.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Jamais aucune époque n’a autant été marquée par le désir de changer de vie. Nous voulons tous, à un moment de notre existence, être un autre. »

Un soir d’été

En refermant ce livre, je l’ai trouvé un peu vide… avec pas mal de remplissage…

Quand j'y repense, ces mots, ces mots tout simples, étaient justes, profondément justes. On avait été bien. Il y avait eu le soleil et le sel sur nos peaux. Il y avait eu de l'optimisme, de l'entrain, de la gaieté. Il y avait eu de l'insouciance, de l'indolence, un laisser-aller, un lâcher-prise. Et on avait été ensemble.
Un soir d’été de Philippe Besson

Après réflexion, c’est justement ce qu’il exprime. Le vide de la disparition, du manque. Un ami disparu un soir de fête alors que tout était simple et insouciant. En vacances sur l’Île de Ré, avec une bande copain à jouir de l’amitié, des flirts, de la légèreté des 18 ans.

… un peu vide quand même

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Ce matin, au détour d'une rue, dans la ville où j'habite désormais, j'ai cru reconnaître son visage et sa démarche.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Nous étions six - cinq garçons et une fille - insouciants, frivoles, joyeux, dans un été de tous les possibles. Pourquoi a-t-il fallu que l'un d'entre nous disparaisse ? »

S'inspirant d'une histoire vécue, Philippe Besson retrace un drame de sa jeunesse, survenu dans l'île de Ré, un soir de juillet, au milieu des années 80.

Strange

Strange m’a évidement et immédiatement rappelé la fille d’elle même de Gabrielle Boulianne-Tremblay. Une quête de soi sous le regard des autres. Et là encore, la même sensibilité, la même finesse d’écriture, les mêmes douleurs.

Si j'étais né dans un corps de femme et si je m'habillais en homme, personne ne trouverait à y redire. Peut-être même que personne ne le remarquerait. L'inverse est saugrenu, grotesque, laid. Pourquoi ? C'est le même geste pourtant.
Strange de Geneviève Damas

Avec, dans Strange, ce rapport au père qui apporte toute la richesse (et beaucoup de tristesse aussi) à ce roman.

Une magnifique étrangeté

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je suis resté assis sur mon lit je ne sais combien de temps. Je pensais "S'il vient dimanche, je vais mourir".


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Il y a des choses que l’on écrit parce qu’on n’a pas pu les dire. Nora envoie une longue lettre à son père, qui vit dans une autre ville. Cette ville, elle l’a quittée pour apprendre le chant à Bruxelles. Mais aussi pour autre chose. « Ma vie n’est pas exactement comme je te l’ai racontée. »
L’enfant que connaît ce père était un « il ». Il se prénommait Raphaël. Tout ce que le père ignore, le voici, depuis l’enfance, la mort de la mère. Les déguisements que portait le petit garçon. Les princesses qu’il dessinait. Les brutalités subies dans la cour du collège. Les mensonges. La douleur. Et puis, un jour, une lumière : le chant. Et le départ. Et ce que Nora est devenue, sa nouvelle vie. Voici un sens inédit ajouté au « Je est un autre » de Rimbaud.
Loin d’être une lettre d’amertume, de vengeance ou de règlement de comptes, la lettre de Nora est une lettre d’amour. Lettre d’amour à un père, dans l’espoir qu’il comprendra. Lettre pour s’aimer soi-même, aussi, enfin.
Un roman bouleversant, et d’autant plus qu’il évite les excès de la plainte comme de la caricature, sur l’identité, mais aussi sur le passage à l’âge adulte, le perfectionnement d’un art, le renouement avec l’acte d’aimer.

Patate chaude

Patate chaude est un petit trésor de ce début d’année. Enfin, si on peut considérer un gros chien assez moche et qui bave comme un petit trésor… Mais qu’importe, c’est un petit bijou !

Quand j'étais gamin, je pensais que Grand-Maman était magicienne, parce que je l'avais entendue dire à ma mère qu'elle mettait un peu de « Maggi » dans toutes ses sauces. C'était sans doute pour ça qu'avec elle, on se sentait uniques quoi que l'on chante et quoi que l'on raconte. C'était sans doute pour ça que tous ses plats avaient un goût étrange. Assaisonnés d'une force mystérieuse.
Patate chaude de Marie Beer

L’histoire d’un copain du grand frère, un peu loose et dilettante, un BG charismatique et marginal, qui n’a pas fait grand chose de sa vie, à part un groupe sans succès et qui se suicide en laissant son chien. Patate. Enfin… Sa chienne !

Un bouquin plein d’humour aux portraits bien croqués et qui pose un regard acidulé sur les bonnes gens de par chez nous

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Kob est mort. Il y a de ça quelques jours déjà.
Le pire, c'est que je l'ai su par les réseaux sociaux. Normal, vous me direz, puisque je ne l'avais pas revu depuis au moins dix ans. Les réseaux sociaux, c'est un peu devenu la plateforme nécrologique qui devance les rubriques officielles mieux que n'importe quel bouche à oreille.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Je leur ai demandé : il a laissé quoi derrière lui, votre fils au grand cœur ? Votre fils que tout le monde admirait, sauf vous, apparemment ? Il a laissé un clébard ! C’est mieux que rien, non ? Il aurait pu devenir tueur en série. Ou pire ! Il aurait pu devenir comme vous. Qui viendra crier à votre enterrement, à vous ?

Kob est mort, et sa famille entend préserver dignement son souvenir. Mais il laisse derrière lui plusieurs amis infréquentables, quelques magouilles et surtout un gros chien mal élevé, dont personne ne veut.
Dans ce roman vif et jubilatoire, Marie Beer croque les travers et les contradictions de nos normes sociales.

Le roitelet

L’écrivain a la soixantaine, il est marié et il a un chien et un chat. Et un frère schizophrène.

Je crois que le jour où le docteur Dumontier a dit que mon frère souffrait d'une maladie grave, quelque chose s'est brisé. Sauf erreur, et puisqu'il est vrai que les mots donnent sa forme à l'esprit, le fait d'avoir simplement mis le mot schizophrénie sur ce mal a en quelque sorte accéléré la dégringolade de mon frère. Sa jeunesse, que j'avais observée s'enfuir au cours des quelques mois précédents, laissait place désormais à autre chose qui n'était pas encore le déclin mais qui s'y préparait.
Le roitelet de Jean-François Beauchemin

Et très simplement il raconte sa vie, son enfance, la maladie de son frère, la mort de leurs parents… Et ça semble tout simple et c’est pourtant beaucoup plus que ça. C’est toute la tendresse, l’amour, l’accompagnement, la vie, les oiseaux qui chantent, les crises, les peurs, le bonheur d’être là.

Un livre bouleversant

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il avait à peine treize ans (et moi quinze) lorsqu'il a sans le savoir planté les premières bornes de son terrible destin. Sur la ferme où on nous avait confié la tâche de ramasser les œufs et de distribuer le foin, une vache que nous connaissions bien s'est écroulée un matin sous nos yeux, prête à accoucher. Restés seuls sur les lieux en l'absence du fermier, mon frère et moi avons dû préparer nous- mêmes, dans une totale improvisation, la mise au monde du veau.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un homme vit paisiblement à la campagne avec sa femme Livia, son chien Pablo et le chat Lennon. Pour cet écrivain parvenu à l’aube de la vieillesse, l’essentiel n’est plus tant dans ses actions que dans sa façon d’habiter le Monde, et plus précisément dans la nécessité de l’amour. À intervalles réguliers, il reçoit la visite de son frère malheureux, éprouvé par la schizophrénie. Ici se révèlent, avec une indicible pudeur, les moments forts d’une relation fraternelle marquée par la peine, la solitude et l’inquiétude, mais sans cesse raffermie par la tendresse, la sollicitude.

J’irai déterrer mon père

Rythmée par le tic-tac du temps qui s’écoule, Charlie raconte sa maladie (une boule comme une orange), son frère (un gros connard), son père (suicidé), sa copine (enceinte), sa mère (mère), son compagnon, sa famille…

Tic-tac.
La mort se loge en nous avant même qu'on apprenne à dire son nom. Plus fidèle qu'une chienne, plus vorace qu'un affamé, elle n'est la meilleure amie de personne, mais possède un double de toutes les clés. Je ne l'attendais pas, mais elle est tout de même venue, simplement parce qu'elle vient toujours. La chienne.
J’irai déterrer mon père de Catherine Larochelle

Mais rien n’est immuable au son du tic-tac et le frère est il vraiment aussi con et un père mort n’a-t-il plus rien à dire ?

L’histoire de la maladie qui détruit, mais aussi bien plus que ça.

Un livre splendide, aux émotions qui déchirent, un cocktail de violence et d’amour, de rancunes et de retrouvailles.

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je me sens aussi blanche qu'un paysage d'hiver. Ils n'ont pas réussi à passer entièrement le coloscope. Quelque chose bloquait son avancée au niveau de l'intestin. Ce n'est pas bon signe, surtout que mon ventre crie sa douleur depuis longtemps.

Tic-tac.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
À 29 ans, Charlie n’a plus de temps à perdre. Sa liste de choses à régler est interminable. Elle entreprend un périple vers le pardon et le deuil, accompagnée de son frère détesté, de sa cheeky best friend, du fantôme de son père, de sa mère trop intense et de son amoureux qu’elle soupçonne de garder dans ses poumons le parfum d’une autre femme.

Un récit porté par une prose à la fois crue et candide, qui fait jaillir la lumière même dans ses coins les plus sombres

Mémoire de soie

Ça commence comme un roman du terroir, avec des belles grosses phrases comme on en fait plus trop, avec des adjectifs qui font joli et tout et tout… Ça continue aussi un peu comme ça, finalement, même si ça devient vite assez méchant.

La proposition de mariage est arrivée comme toute autre nouvelle, par courrier et rédigée par un autre. Baptistin n'apprendrait pas à écrire dans ce foutoir, il n'avait pas su le faire à l'école. Il savait à peine déchiffrer. Il n'a d'ailleurs rien dit de particulier quand Suzanne lui a lu l'ordre de mobilisation générale affiché sur la place du village ce jour-là. 2 août 1914, Suzanne n'était arrivée que depuis deux mois et demi. C'est donc la guerre. Comme valsent les tourments, comme valdinguent les espoirs. C'est donc la guerre.
La vacherie pleine et goulue.
Mémoire de soie de Adrien Borne

Une sale histoire avec deux frères héritiers d’une magnanerie et une salope de mère. Et Suzanne qui se marie avec un des deux qui meurt a se démobilisation de la grippe espagnole.

Une magnanerie de l’époque

Une vache d’époque, où la vie ne compte pas bien plus que ce qu’il faut pour la nourrir. Un époque où on s’arrange, parce qu’il faut bien.

Un roman du terroir bien noir, empêtré dans les ressentiments, les inavouables non-dits… les secrets de famille

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La lumière suinte et dessine autour du volet un liséré clair. Elle reste le plus sûr repère. Celui de la course du soleil. Émile souligne des yeux la marque blanche, tirant sur un jaune léger, elle court jusqu'à sa table de chevet, ne l'atteint pas encore, semble vouloir l'épargner. Il a vingt ans ce 9 juin 1936.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ce 9 juin 1936, Émile a vingt ans et il part pour son service militaire. C'est la première fois qu'il quitte la magnanerie où étaient élevés les vers à soie jusqu'à la fin de la guerre. Pourtant, rien ne vient bousculer les habitudes de ses parents. Il y a juste ce livret de famille, glissé au fond de son sac avant qu'il ne prenne le car pour Montélimar. À l'intérieur, deux prénoms. Celui de sa mère, Suzanne, et un autre, Baptistin. Ce n'est pas son père, alors qui est-ce ? Pour comprendre, il faut dévider le cocon et tirer le fil, jusqu'au premier acte de cette malédiction familiale.

Ce premier roman virtuose, âpre et poignant, nous plonge au coeur d'un monde rongé par le silence. Il explore les vies empêchées et les espoirs fracassés, les tragédies intimes et la guerre qui tord le cou au merveilleux. Il raconte la mécanique de l'oubli, mais aussi l'amour, malgré tout, et la vie qui s'accommode et s'obstine.

L’indésir

L’indésir est une quête, celle de Nuria qui enterre sa mère. Une mère qu’elle ne connait pas, qu’elle n’a pas vue depuis 8 ans, une mère absente. Le deuil d’une inconnue.

Abel lève les yeux vers moi. Elle est belle comme toi. Elle n'est pas belle, cette femme. Elle est mauvaise, elle est seule, elle est malheureuse, elle n'est qu'elle et rien ne lui survit. Rien d'autre que les larmes de bébé croco d'un jeune idiot qui se tapait une vieille. Elle n'est pas comme moi. Je crache ça avec mépris.
L’indésir de Joséphine Tassy

Mais aussi une rencontre avec Abel.
bats-toi pour ton désir
attise-le comme un feu qui réchauffe et ne brûle pas 
attise-le comme le feu du jaune de tes yeux
Je ne sais pas quels sont les mots sortis de sa bouche et quels sont ceux sortis de ma tête. Tout s'est mélangé. Ça n'a pas d'importance.
Par faiblesse, j'aurais pu penser: c'est le destin.

Deux événements qui se percutent pour lui donner une chance de ressentir à nouveau, de désirer et de vivre.

Un livre marquant tant par son écriture que sa thématique difficile, une fille qui n’a pas été aimée par sa mère. Comment oser vivre, aimer ou désirer

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Ce matin, je me suis réveillée avec une impression d'hier.
J'ai regardé mes pelures de la veille abandonnées là où hier je les ai laissées.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ce matin, Nuria s'est réveillée avec une impression d'hier. Dans la nuit, son téléphone a sonné : sa mère est morte. Elle ne ressent rien, aucun chagrin pour cette étrangère qu'elle n'a pas vue depuis huit ans. Avec Abel, un garçon croisé en boîte, elle part à la rencontre des drôles d'individus qui ont connu sa mère. Nuria cherche des réponses sans poser de questions. Sauf une, qu'elle garde pour elle. Le souvenir de cette femme qui n'a jamais voulu d'elle la renvoie à l'indésir qui lui colle à la peau.