Odile l’été

C’est peu dire que l’érotisme féminin est généralement plus riche et diversifié que celui des auteurs masculins. Certes, on y trouve nombre de grosses bouses tant l’exercice est compliqué, mais de vraies pépites s’y retrouvent sous la plume de Anne Archet, Zoé Vintimille ou Belinda Cannone… pour ne citer qu’elles dans des registres très différents.

 - J'ai eu longtemps l'impression qu'on s'était jeté un sort l'une à l'autre. C'est con, je sais, mais j'essaie d'être la plus juste possible.
 - En étant défoncée ?
 - C'est défoncée que je suis la plus juste. On a commencé à fumer ensemble et c'est en fumant qu'on a pu se dire les choses qui comptaient vraiment. Je n'ai jamais eu d'usage plus intelligent des drogues qu'avec toi. Partout ailleurs, j'ai eu l'impression qu'on me donnait des drogues pour que je ne puisse plus m'échapper.
Odile l’été de Emma Becker

Dans cette collection Fauteuse de trouble, Julliard invite des autrices à jouer avec un érotisme féministe et émancipé. Et cette première lecture est une réussite.

C'est peu dire qu'Odile, en rentrant chez elle, s'étend sur son lit, dans sa chambre aux volets clos, bras et jambes écartés. Quatorze heures, l'heure blanche non, c'est trop tôt, Axel est trop sérieux pour ça, et puis il a une femme, et une petite fille, on est loin du film porno où des ouvriers nus sous leur salopette sortent nonchalamment leur chibre sur un simple regard de la petite dame en minirobe. Et puis, ils l'appellent patron... Est-ce qu'on baise une nana sous les yeux de son patron? Est-ce qu'on met sa bite là d'où le patron ressort à peine?
 - C'est ton rêve à toi, Odile, lui dis-je en allant me coucher. Ils mettent leur bite exactement là où tu leur dis de la mettre.

Deux copines d’enfance qui se sont perdues de vue depuis plus de dix ans partagent leur souvenirs. De leurs premiers émois ensemble à leurs fantasmes de femmes en passant par leurs expériences (très) diverses.

Un magnifique roman sur le désir et le plaisir

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
J'ai rêvé d'Odile cette nuit. C'est assez rare pour que je le note. Petite, je rêvais beaucoup d'elle, comme de mes parents; c'étaient les rêves les plus graves de ma vie, et puis ça m'est passé. Ce qui devrait m'étonner, c'est de ne pas retrouver Odile en rêve plus souvent.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Odile et moi, petites filles, courons dans le maquis qui entoure sa maison, elle habite à l'époque dans cette même grande villa à Cavalaire. Nous disparaissons des heures à la recherche d'un semblant de grotte planquée derrière un buisson de lentisque, une lampe torche à la main, et c'est là, pour la première fois, que nous inventons ce jeu qui nous tiendra en haleine jusqu'à la fin de notre adolescence - le petit copain et la petite copine. Au début, ces explorations n'interviennent que dans notre caverne ; l'obscurité et la fraîcheur nous préservent de ce que nous sommes en train de faire plus que du regard possible des autres. C'est une bulle dans laquelle nous nous fondons des heures entières, avant de ressortir comme si rien ne s'était passé, comme si nous venions de faire une partie de ballon, et nous n'en reparlons jamais, jusqu'à la fois d'après. »

Légère et court-vêtue

Il est impressionnant de voir à quel point chaque livre d’Antoine Jaquier est différent et pourtant comme des thématiques et ses préoccupations s’y cristallisent. A chaque fois une claque qui vient d’ailleurs !

J'ai autant envie d'une relation sexuelle que d'un cancer du côlon. Elle doit le savoir et me tend une pilule. C'est du Cialis, dit-elle, avec ça tu vas l'avoir dure jusqu'à demain soir. Je lui dis que je n'en ai pas besoin. D'un geste autoritaire elle signale que la réponse n'est pas à choix multiple. Après tout, pourquoi pas. Autant ça que bander mou. La pilule gobée elle m'invite à trinquer, boit sa coupe presque cul sec et fouille dans les paquets pour en sortir les strings.
 - Déshabille-toi mon loulou, je veux voir comment tu portes ça.
Légère et court-vêtue de Antoine Jaquier

Légère et court vêtue c’est l’histoire de Mélodie, une instagrameuse ex miss Suisse-romande coincée avec Tom, un looser addict au jeu. Et là, on devine rapidement qu’en grand spécialiste, Antoine Jaquier va les faire morfler grave.

Je me souviens particulièrement de cette phrase assénée comme un coup de massue: Si la solution est une redistribution des richesses, dire que les riches vont se crisper serait un euphémisme

Mais ! Chaque livre est différent et cette fois encore, Antoine réussit à surprendre.

Mamie disait que les plus grandes inventions du XXe siècle étaient le lave-linge et la pilule - qu'on aurait pu s'arrêter là.

Un livre glam-trash peut-être un peu plus facile que ses autres productions, l’histoire de l’émancipation d’une femme

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Mélodie
Le poids de Mango sautant sur le lit me tire de mon sommeil. Je n'ouvre pas les yeux. Ne veux pas que cette journée commence, mais mon chat préféré est déjà sans pitié. Sa petite patte touche mon visage. Assis sur le rebord de l'oreiller, il piaille. Ça m'arrache un sourire il insiste.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Découvrir les Parisiens affectés à ce point me bouleverse. Des mecs m'expliquent que mes robes légères deviennent politiques. Ma crinière démesurée qu'on disait m'as-tu-vu est aujourd'hui assimilée à un signe fort de liberté - on n'arrête pas de m'en féliciter. Mes gambettes et mes escarpins feraient rempart à l'extrémisme radical pour les plus exaltés. Ma frivolité est d'un coup perçue courageuse. En d'autres termes : je suis une cible. Continuer à s'amuser semble être le mot d'ordre même s'il sonne parfois creux dans ce milieu. Que peut-on faire d'autre de toute manière ?
C'est décidé, je m'entêterai à vivre bien maquillée, court-vêtue et riant à gorge déployée - jusqu'à ce qu'on me la tranche. »

Le carnet écarlate : fragments érotiques lesbiens

Un bijou de petites phrases, pensées et anecdotes sur le désir et la jouissance.

Le carnet écarlate : fragments érotiques lesbiens de Anne Archet

Le tout entrecoupé de (trop) rares illustrations de Mélanie Baillargé.

Avec les dessins de Mélanie Baillargé

Une femme qui parle – avec beaucoup de style – de son amour des femmes, de sexe, de domination, de masturbations et autres infinis plaisirs lesbiens.

Un cadeau à mettre entre tous les doigts polissons sans les avertir

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
- Qu'est-ce qu'il y a là-dedans ? me demande-t-elle en feuilletant le carnet écarlate.
- Le meilleur de moi-même.
- Vraiment ?
Alors je dois lui faire l'amour. Elle lèche une page comme s'il s'agissait de mon sexe, effaçant petit à petit de sa salive tout ce que j'avais écrit, puis offre à ma bouche un petit bout de langue bleue. Vedette anarcha-féministe du wild wild web, Anne Archet fait son entrée officielle dans la littérature papier avec ce recueil joyeux et sans complexe. À la fois torride et tendre, cruel et hilarant, Le carnet écarlate réunit des centaines d'aphorismes et microrécits sulfureux mettant en scène l'érotisme lesbien sous toutes ses formes. Un livre cochon et féministe qui vous fera rire aux éclats, pour un public large (d'esprit).
Avec les dessins de Mélanie Baillairgé

Play Boy

Après la séparation d’avec son mari – avec lequel elle a eu un fils, Constance rencontre une femme, puis une autre et une autre…

Play Boy de Constance Debré

Une rupture et des aventures comme une façon de se séparer de sa vie d’avant, de se trouver soi-même, de se débarrasser de toutes les scories, du mariage, de son père, du fric et de toutes ses attaches. C’est sexuel, désordonné, erratique et confus, comme une nouvelle vie qui se cherche.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«J'ai même pas osé mettre la langue la première fois que j'ai embrassé une fille. C'était après Laurent. Avant je savais mais c'était théorique. J'ai fait un effort pour la deuxième. Je lui ai roulé une vraie pelle. Ça m'avait flattée comme un mec qu'elle soit mannequin. On progressait. J'avais toujours peur, mais moins. Sauf qu'à chaque fois on en était restées là. Ou plutôt elles en étaient restées là avec moi. Des hétéros qui se posaient vaguement la question et qui avaient calé. Des filles plus jeunes que moi, mais des filles comme moi.»

Tous les hommes désirent naturellement savoir

Nina Bouraoui parle de son enfance en Algérie, de son arrivée en France, de sa mère et de sa famille, de son homosexualité, du milieu lesbien parisien…

Tous les hommes désirent naturellement savoir de Nina Bouraoui

Un livre entre souvenir et devenir dont je ne me rappellerais pas forcément

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« J'écris les travées et les silences, ce que l'on ne voit pas, ce que l'on n'entend pas. J'écris les chemins que l'on évite et ceux que l'on a oubliés. J'étreins les Autres, ceux dont l'histoire se propage dans la mienne, comme le courant d'eau douce qui se déverse dans la mer. Je fais parler les fantômes pour qu'ils cessent de me hanter. J'écris parce que ma mère tenait ses livres contre sa poitrine comme s'ils avaient été des enfants. »

Avec Tous les hommes désirent naturellement savoir, Nina Bouraoui signe un roman envoûtant sur les origines du désir et de la violence

Le génie lesbien

Voilà un livre qui dit les choses, n’évite pas, fonce et se bat. Pas de langue de bois et des opinions bien affirmées. Et si Alice Coffin fait part de ses points de vue assumés, elle les étaie, les confronte, cite ses sources et nomme les actes comme les personnes !

Le génie lesbien de Alice Coffin

L’essai féministe militant d’une lesbienne révoltée (dans lequel toutes ne se retrouveront évidement pas, et tel n’est probablement pas le but)

Et même si on peut lui reprocher ses partis pris, si j’ai trouvé le chapitre sur la placadrologie un peu plus faible, si quoi ou qu’est-ce et s’il déplaira forcément, voilà un bouquin qui tape fort… C’est réjouissant !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Enfant, j'adorais m'imaginer en garçon. J'ai depuis réalisé un rêve bien plus grand : je suis lesbienne. Faute de modèles auxquels m'identifier, il m'a fallu du temps pour le comprendre. Je me suis découvert une histoire, une culture, un héritage au nom desquels je me bats aujourd'hui, car ils ont bouleversé ma vie. »
A.C.

Dans cet essai très personnel, la journaliste féministe, lesbienne et militante, Alice Coffin, tente de comprendre pourquoi, soixante-dix ans après la publication du Deuxième Sexe, et malgré toutes les révolutions qui l'ont précédé et suivi, le constat énoncé par Simone de Beauvoir, « le neutre, c'est l'homme », est toujours d'actualité. Elle y évoque son activisme au sein du groupe féministe La Barbe, qui vise à « dénoncer le monopole du pouvoir, du prestige et de l'argent par quelques milliers d'hommes blancs ». Elle y questionne également un système médiatique qui peine à se repenser ; interroge la difficulté des personnalités publiques à « sortir du placard » ; revient sur l'importance d'étendre la PMA pour toutes, et sur l'explosion de la parole des femmes après #MeToo.

Combattif et joyeux, Le Génie lesbien est un livre sans concession, qui ne dissocie jamais l'intime du politique et nous aide à mieux comprendre ce qu'être lesbienne aujourd'hui veut dire, en France et dans le monde

Ça raconte Sarah

Une passion, folle, qui emporte tout, qui crie, embrasse, mors, déchire, attend, baise, hurle, aime et aime encore plus que c’en est plus possible

Ça raconte Sarah de Pauline Delabroy-Allard

Puis une deuxième partie ahurie d’avoir tant aimé

Deux femmes qui se rencontrent dans une tornade de passion

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ça raconte Sarah, sa beauté mystérieuse, son nez cassant de doux rapace, ses yeux comme des cailloux, verts, mais non, pas verts, ses yeux d'une couleur insolite, ses yeux de serpent aux paupières tombantes. Ça raconte Sarah la fougue, Sarah la passion, Sarah le soufre, ça raconte le moment précis où l'allumette craque, le moment précis où le bout de bois devient feu, où l'étincelle illumine la nuit, où du néant jaillit la brûlure. Ce moment précis et minuscule, un basculement d'une seconde à peine. Ça raconte Sarah, de symbole : S.

Le sel de tes yeux

Pas du tout croché sur cette histoire. Pourtant, le thème est fort. Une sorte de monologue imaginaire d’une écrivaine fascinée par une jeune fille qu’elle a aperçu courir. Comme des lettre à l’attention d’une jeune fille qui commence à assumer son homosexualité dans une famille qui ne veut pas en entendre parler.

Le sel de tes yeux de Fanny Chiarello

Mais voilà, impossible de me laisser aller avec cette histoire en « tu » que j’ai trouvé bien plate… zut.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Sarah aime les filles. Dans cette petite ville du bassin minier du nord de la France, l'homosexualité n'est pas bien vue. Lorsque sa mère découvre, planqué sous le matelas de l'adolescente, un roman ayant pour sujet une relation amoureuse entre deux filles, elle entre dans une rage folle.

Mais que se passera-t-il lorsque Sarah, au cours d'une soirée, se retrouvera face à l'autrice du roman ?

Le Sel de tes yeux est l'histoire de cette rencontre en partie imaginaire entre une écrivaine et son personnage.

En partie seulement. Car Sarah existe vraiment. Fanny Chiarello l'a croisée un jour, alors que la lycéenne passait en courant.

Elle l'a photographiée, sans pouvoir lui parler. Alors elle a écrit ce livre dans lequel elle s'adresse à la jeune fille en lui prêtant une famille, des amis, une amoureuse. Une « lettre à une inconnue », brûlante comme le sel des larmes que l'on n'a pas versées

Carmilla

Un roman gothique dans toute sa splendeur, avec de l’horreur, de la sensualité, du religieux, et du fantastique médiéval.

Carmilla de Joseph-Sheridan Le Fanu

La vampire est une femme magnifique et sa victime l’est tout autant. Un livre paru en 1871 qui inspira certainement Bram Stocker pour écrire son Dracula vingt-six ans plus tard et qui en fera un chef d’oeuvre.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
" Deux grands yeux s'approchèrent de mon visage et soudain, je ressentis une douleur fulgurante, comme si deux grandes aiguilles espacées de quelques pouces seulement s'enfonçaient profondément dans ma poitrine. Je me réveillai en hurlant. La chambre était éclairée par la chandelle qui était restée allumée toute la nuit, et je vis une silhouette féminine au pied de mon lit, un peu sur la droite. " L'action se passe dans un château de Styrie.
L'héroïne, la jeune Laura, tombe sous le charme de la belle et mystérieuse Carmilla, dont l'arrivée énigmatique dans ce lieu isolé marque l'initiale d'une amitié tendre et exaltée. De l'ouverture presque bucolique à la destruction du vampire que se révèle finalement être Carmilla, tout est là, des ingrédients d'un roman gothique, classique du genre. Mais ici, le vampire est une femme, et à la transgression vampirique s'ajoute celle de l'homosexualité féminine, dans un récit tout de séduction et de sensualité

Les carnets d’Alexandra : 1907-1908

L’histoire de fesses un peu cul-cul d’une femme qui aime les femmes

Les carnets d'Alexandra : 1907-1908 de Dominique Simon
Les carnets d’Alexandra : 1907-1908 de Dominique Simon

Un livre pas franchement émoustillant au style vaguement terne

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
J'étais démasquée. Alors, comme si c'était une chose entendue entre nous, je demandai :
«Quand avez-vous compris que j'avais du goût pour mon genre ?
- À votre façon de détailler les clientes. Vous regardiez leurs fesses comme le font les hommes... Et, croyez-moi, je m'y connais.»