Irréfutable essai de successologie

A l’heure ou la célébrité se suffit à elle même et où les stars des écrans (tous les écrans) ne brillent plus que par leurs strass et leurs paillettes, ce petit manuel essentiel est enfin arrivé pour nous permettre, à nous aussi, de parvenir à cette gloire.

Enfin et surtout, le succès immunise contre la mort.
En résumé, le succès, par un phénomène que je n'hésiterai pas à qualifier de transsubstantiation, fait passer pour intelligent l'individu le plus con, pour séduisant le plus moche, pour aimable le plus odieux, pour honnête le plus malhonnête et pour immortel le plus piètrement mortel.
Autant de prodiges qui me permettent d'inférer que ce ne sont plus désormais ni l'art, ni la politique, ni les anciennes croyances qui déterminent notre présent.
C'est, sans contredit, le succès.
Le succès est la nouvelle religion.
Irréfutable essai de successologie de Lydie Salvayre

Adressé principalement au milieu littéraire (mais déclinable à souhait), cet essai démontre que le talent, le travail, le style ou le propos ne sont que peu de choses face au succès. Car oui, pour avoir du succès, il faut en avoir (si ce sophisme (qui, je l’espère, aurait charmé Schopenhauer) vous semble curieux, il est temps pour vous de lire cet indispensable ouvrage!)

L'art de paraître
Vous l'avez à présent compris, le succès ne s'obtient jamais par la seule puissance du talent. Le talent seul, toute l'Histoire nous l'enseigne, n'apporte aucune renommée ni aucune fortune. Il faut donc l'y aider, conformément à cet axiome que j'écris, à votre intention, en lettres d'or, et que vous devrez garder constamment présent à l'esprit :
Il ne suffit pas d'être talentueux, il faut avant tout le paraître.

Peut-être un seul bémol pour le dernier chapitre qui m’a semblé tellement inutile !

Un essai brillant ! Une pépite d’humour pour pleurer de dépit devant notre consternante époque

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Nos esprits les plus hautement spéculatifs ont découvert l'existence de milliers d'exoplanètes, identifié les traces d'un ankylosaure vieux de 168 millions d'années, établi que la vitesse de la lumière était de 299 792 458 mètres par seconde, mis au point des parapluies biplaces, des perruques pour chien, des protège-moustache, des masques antigloutons, des porte-glace à piles, et mille autres merveilles.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Comment se faire un nom ? Comment émerger de la masse ? Comment s'arracher à son insignifiance ? Comment s'acheter une notoriété ? Comment intriguer, abuser, écraser, challenger ? Comment mentir sans le paraître ? Comment obtenir la faveur des puissants et leur passer discrètement de la pommade ? Comment évincer les rivaux, embobiner les foules, enfumer les naïfs, amadouer les rogues, écraser les méchants et rabattre leur morgue ? Comment se servir, mine de rien, de ses meilleurs amis ? Par quels savants stratagèmes, par quelles souplesses d'anguille, par quelles supercheries et quels roucoulements gagner la renommée et devenir objet d'adulation ?

La conquête de la terre par les chats

Dieu a créé les chats à son image, flemmards, tout puissants et égocentriques.

La conquête de la terre par les chats de Alberto Montt

Puis, il leur a donné pour mission de conquérir l’univers. Et pour commencer, pourquoi pas la terre ? Ça ne devrait pas être trop difficile…

Une mini-bd rigolote pour les adorateurs. 5 minutes de sourires avec des dessins choupinous de chats diaboliques, non sans rappeler ceux de Tom Gauld

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La genèse.
Et Dieu créa le chat à son image...


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les chats... Qui sont-ils ? D'où viennent-ils ? Comment ces gros feignants ont-ils fait pour convaincre les hommes de les nourrir ? Alberto Montt lève le voile sur cet insondable mystère dans un essai documentaire rempli d'informations parfois véridiques.

Découvrez enfin l'incroyable histoire des chats, de leurs origines jusqu'à leur prise de contrôle de la Terre et leur asservissement de l'espèce humaine

Le vide : mode d’emploi : aphorismes de la vie dans les ruines

Cet excellent recueil d’aphorismes pêche malheureusement par son excès. Peut-être sous la forme d’un calendrier en remplacement des bondieuseries journalières détachables ou en rappel journalier sur les réseaux sociaux ci-conchiés ? Je ne sais pas, mais hélas la quantité nuit malheureusement au propos.

Résumé du livre jusqu'à présent
Je pense donc j'ennuie.
J'aurais dû m'en apercevoir plus tôt
Notre société n'est pas hypersexuée, finalement. Elle est juste hyperhétérosexuelle.
Marché du carbone
Brûler une banque émet peut-être du carbone, mais c'est quand même un bon moyen de lutter contre les changements climatiques.
Le vide : mode d’emploi : aphorismes de la vie dans les ruines de Anne Archet

Pourtant c’est drôle, virulent, engagé, contestataire, violent, juste, léger, solide, réfléchi… (il y a de tout, du bon, du très bon et même du meilleur. Mais il y en a tant)

Un dernier souhait
Que vos crimes soient sublimes et que jamais vous ne vous fassiez prendre.
La conclusion logique
Je n'ai pas encore tout abandonné pour aller rejoindre le cirque, mais ça ne saurait tarder.

Si vous ne connaissez pas Anne Archet, commencez peut-être par ses courts textes érotiques. Mais si vous y avez déjà gouté, si vous êtes patient-e-s et si vous vous contentez d’un page par jour, ce recueil est aussi puissant et goûtu qu’un espresso napolitain matinal

Avec des illustrations de Sara Hébert

Et si vous ne connaissiez pas encore Sara Hébert, Bijou de Banlieue, c’est elle ! Et c’est incroyable

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Posture
Je suis celle qui dit tout bas ce que personne ne pense.

Autre posture
Sur internet, personne ne sait que je ne suis qu'une stratégie discursive.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«J’ai dit à la mère de mon amoureux que j’étais aphoriste et elle m’a donné son appui dans ma lutte pour l’acceptation et la reconnaissance. Je l’ai remerciée avec émotion, même si j’ai vite compris qu’elle pensait que le mot “aphoriste” désignait une identité sexuelle ou de genre à la mode. Pour une fois qu’on ne se moque pas de mes prétentions littéraires, je n’allais quand même pas gâcher mon plaisir.»

«Je crois qu’il faut cesser de dire “environnement” et commencer à dire “survie de l’espèce humaine”. Ce serait rigolo d’entendre les politicien•ne•s dire “la survie de l’espèce humaine est importante, mais pas aux dépens de l’économie”.»

Anne Archet est connue pour ses récits érotiques et les textes polémiques qu’elle publie sur le web depuis la fin des années 1990. Avec Le vide: mode d’emploi, cette écrivaine caustique, fulgurante, volontiers provocatrice et un brin mythomane, s’essaie à un nouveau genre: l’aphorisme.

Les brefs commentaires sur le monde d’aujourd’hui dont est composé cet essai sont autant de petites grenades lancées pour faire éclater nos certitudes, ou simplement pour nous faire éclater de rire. Un essai à lire pour faire le vide autour de soi! Anne Archet est une auteure anarchiste

Gore de mer

Pour les vacances d’été à la plage, le Gore des Alpes avait publié un recueil de nouvelles en 2022. Avec des pépites et… ma foi, du moins sanglant.

Gaël avait douze ans lorsque le père se mit soudain à chier sans pouvoir s'arrêter. Au début, il tentait de se lever, d'aller jusqu'aux cabinets, très vite, il faisait sous lui, une large tache trop claire pour être honnête qui n'avait pas fini de se répandre qu'il se vomissait déjà dessus. En trois jours, le père creva, comme une grande partie des villageois. C'était le choléra.
Gore de mer : Ouessant de Stéphanie Glassey

Mais quand c’est bon, c’est très ! C’est la valse au cracra sans tabous avec du sexe (parfois en plusieurs morceaux), des viandes et des fluides de toutes sortes et origines…

On peut être choqué. Pas à l'idée que la veuve baise son amant sur les morceaux encore tièdes de son mari. De cela, tout le monde s'en fiche. Mais du fait qu'elle préfère ce sac d'os, tout en angle et en coin, musclé comme un squelette et surnommé Allumette. Dans la fièvre de l'orgasme elle hurla: « Allumette, gentille Allumette, je te plumerai! » Les femmes ne sont pas cruelles, elles sont curieuses. Leurs choix sont autant d'énigmes.
Gore de mer : Ciel mon mari de Gabriel Bender

Oui, les bords de mer sont parfois putrides

Puis Thelma avait coupé les amourettes de son mari, les avait fait frire dans un peu d'huile d'olive et les lui avait servies en guise de dernier repas du condamné. Il les mastiquait encore quand elle lui avait tranché la gorge. Un testicule à moitié mâché était ressorti par la plaie béante et avait glissé sur le torse adipeux de J. D. pour s'arrêter dans le creux de son nombril.
Et Thelma avait crié : « Olé! »
Gore de mer : Thelma et Louis de Nicolas Feuz

Pour les amateurs du genre, l’occasion de rire de l’excès

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Pour l’été, le Gore des Alpes sculpte son summer body et devient le Gore de Mer pour mieux se glisser en milieu aqueux. Daupins-garous, sirènes envoûtantes et meurtrières, monstres marins, zombies aquatiques, serial killers et expéditions nautiques, tout y est pour un tsunami d’horreur et de sable chaud. Les plumes du Gore des Alpes, plus acérées que jamais, vous donnent rendez-vous pour un jeu de massacre estival. Laissez flotter vos idées noires dans un bain suave et tentaculaire.

17 nouvelles pour frissonner les pieds dans l’eau.

avec Philippe Battaglia, Gabriel Bender, Louise Anne Bouchard, Joël Cerutti, Eric Felley, Nicolas Feuz, Jean-François Fournier, Jordi Gabioud, Oliva Gerig, Stéphanie Glassey, Marie Javet, Joël Jenzer, FrançOis Maret, Micolas Millié, Olive, Dita von Spott, Vincho

C’est quelque chose

Je vous avais déjà dit qu’il faut lire Fabienne Radi ? Il faut !

C’est l’histoire de Paul et Suzie, dans les années 70 qui achètent une maison perdue au milieu de la campagne (à côté de la ferme de Joseph et Janine et de leurs moutons) et qui la louent à de jeunes étudiants suédois.

Chaque vendredi soir les Suédois embarquent des filles de la ville qui, visiblement, restent tout le week-end dans la maison de Paul et Suzie. Elles forment des grappes sur les banquettes arrière, il y en a même parfois assises en amazone sur les portières de la décapotable. Joseph n'arrive pas à les compter lorsque les deux voitures passent devant la ferme, mais à vue d'œil il y a au moins une fille pour chaque étudiant.
C'est à partir de ce moment-là que Joseph décide d'aller voir d'un peu plus près ce qui se passe dans la maison de Paul et Suzie.
Les moutons sont un prétexte parfait. Il y a toujours un bout de clôture à réparer ou un agneau qui vient de naître à surveiller.
C’est quelque chose de Fabienne Radi

C’est tout simple, très court (trop court !), mais c’est superbe de poésie drôle, tendre et un peu vieillotte (à dessein !)

* Témoignage de Raymonde, ex-petite amie de Sven, Mats, Hjalmar, Ingvor et Hesbjörn: « Ha, ha, ha, qu'est-ce qu'on a ri avec ces étudiants suédois! Ça nous changeait des garçons empotés de notre petite ville. En plus ils avaient les poches bien remplies, je n'ai jamais bu autant d'alcool de ma vie, et pas de la piquette! La situation de cette maison était géniale, on pouvait faire autant de bruit qu'on voulait, se balader toute la journée à poil, il n'y avait pas âme qui vive dans les alentours. Sauf les moutons, évidemment! Un jour on a posé les colonnes de la stéréo sur la terrasse et on a dansé dans le pré au milieu des bêtes sur le Boléro de Ravel - vous savez, la fameuse chorégraphie de Béjart où le danseur marche sur place en levant les bras au ciel. Les moutons nous regardaient d'un air ahuri, quel spectacle on leur a donné! Un ami des propriétaires m'a dit des années plus tard que le plafond en bois de la maison avait plein de marques bizarres. Je lui ai expliqué que c'était les bouchons des centaines de bouteilles de champagne qu'on avait fait sauter. Il m'a regardée avec le même air ahuri que les moutons à l'époque. »

Un bond dans les années folles de la libération sexuelle. Période de décalage total entre une ancienne génération travailleuse et une jeunesse avide de vie, de jouissance et d’ivresses

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Une maison près d’une forêt est louée à des étudiants scandinaves. Un jour, le paysan d’à côté découvre que les Suédois font des «trucs bizarres»! Dans cette fable rurale haute en couleur, l’auteure nous ramène à la culture des années septante, avec un humour au décalage élégamment maîtrisé

Êtes-vous sûr d’avoir raison ?

Comment échapper à l’ennui du dimanche après-midi m’avait un peu amusé, légèrement, sans risque. Ici, c’est quand même autre chose !

« Ta pute de mère. » Ça ne te dérange pas que je parle de ta génitrice comme ça ? Si ? Alors, tu comprends que « tête de nègre », ça peut poser des problèmes à certains.
Tout cela n'est pas anodin: il faut voir comme nos pensées dépendent de notre langage et de notre langue, de nos mots, et comme les préjugés sont entretenus par l'usage de tel ou tel mot. D'où le combat de certains pour - justement – changer notre manière de dénommer les choses, manière de changer nos manières de penser. Et tant que chacun utilise son propre vocabulaire lourdement connoté dans la discussion, il paraît impossible de changer d'avis.
Êtes-vous sûr d’avoir raison ? de Gilles Vervisch

Sous ce drôle de titre se trouve un bien drôle de livre. Drôle parce qu’il est plein d’humour, mais aussi parce qu’il m’a semblé plus curieux qu’attendu, plus profond, souvent subtil, déconcertant et qui – s’il était trop vite lu – pourrait bien démontrer l’exact contraire de son propos. Oui, Gilles Vervisch semble s’amuser à obliger le lecteur à un minimum de réflexion et de pensée.

C'est ce qui me fait dire que les deux critères essentiels de l'intelligence, c'est le doute et le sens de l'humour. Enfin, il y a toujours des débats, mais disons que ça rend un peu moins con, et que si vous en avez au moins un des deux, ça vous sauve un peu; ça permet déjà de discuter. Le doute, ça consiste à pouvoir se remettre en question; ne jamais être sûr d'avoir raison. L'humour, rire de soi, surtout, ne pas se prendre trop au sérieux, c'est un peu pareil; le doute et l'humour, c'est la capacité à pouvoir prendre un peu de recul, de distance par rapport à ce qu'on pense. Ça tombe bien, c'est à la mode : « On n'a pas assez de recul! » Et à quoi ressemble quelqu'un qui n'a ni doute ni sens de l'humour ? Quelqu'un qui est sûr d'avoir raison et en plus, qui ne veut surtout pas qu'on (en) rigole? À un fanatique religieux. À un intégriste.

Un très bon livre où l’auteur n’hésite pas à rire du pire, à démontrer par l’absurde, à inviter les lectrices-eurs à se faire un avis sans qu’il ne taise le sien. Un livre qui invite au doute et qui décortique wokisme, féminisme, #metoo, moralité et point Goodwin, climatoseptiques et complotistes…

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
« Y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis ! »
Tout le monde pense avoir raison ! Vous, moi... Même si moi, c'est vrai : j'ai raison ! Alors que vous... c'est moins sûr. Mes goûts et mes couleurs sont les meilleurs ; mes valeurs morales, mes croyances, mes convictions politiques sont les bonnes.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tout le monde pense avoir raison. Et s'il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, on peut faire confiance à la mauvaise foi de chacun pour défendre ses opinions lors des débats en famille ou sur les réseaux sociaux ; vaccin, pass sanitaire, #MeToo, complotisme, climat, wokisme, politique, religion, etc.

J'y mettrais ma main au feu, ma tête à couper. Mais comment puis-je être sûr de ne pas me tromper ? D'où nous viennent nos opinions et nos certitudes ? Pourquoi y sommes-nous tant attaché(e)s ? Et dans le fond, faut-il avoir raison ?

T’as pas l’impression de prendre toute la couverture ? : Poésies visuelles et jeux de (mauvais) caractères

C’est magnifique, hilarant, drôle, cocasse, c’est un chef d’oeuvre, c’est fou, juste, débile, incroyable, impertinent, marrant, génial, surprenant, inconvenu, bienvenu… (encore ?)

T’as pas l’impression de prendre toute la couverture ? : Poésies visuelles et jeux de (mauvais) caractères de l’Indéprimeuse

L’Indéprimeuse (Davina Sammarcelli et Felicia Sammarcelli) m’avaient déjà impressionné avec leur traduction de Guillaume Remuepoire et garnissent mon intérieur de leurs tableaux et impressions. Elles réjouissent les imprimeuses-eurs, typographes, correctrices-eurs, polygraphes, infographistes, metteuses-eurs en pages, titreuses-eurs… (tiens, j’y pense, sont-elles pour ou contre l’écriture inclusive ?) et toutes et tous !

Tiens, celui-là, je ne l’ai pas comprise tout de suite

Mais surtout, elles dont drôles et poétiques !

Et c’est un chef-d’oeuvre !

Merci l’Indéprimeuse, c’est un bonheur

La procrastination : l’art de reporter au lendemain

Voilà un petit essai qui brille principalement pour ce qu’il ne promet pas : guérir de la procrastination.

Ne jamais remettre au lendemain ce que l'on pourrait faire le surlendemain.
Mark Twain

Auteur d’un article qui fit beaucoup de bruit, John s’est fendu (après moultes reports) d’un petit bouquin sur la procrastination structurée.

Il n'aura pas échappé au lecteur attentif que la procrastination structurée requiert une bonne dose de mauvaise foi, puisqu'elle repose sur une constante arnaque pyramidale contre soi-même.
La procrastination : l’art de reporter au lendemain de John D. Perry

Un livre bourré d’humour et (quand même) de quelques conseils, pour nous permettre (si ce n’est de guérir) de mieux vivre avec ce handicap fréquemment lié, selon lui, à un autre défaut, le perfectionnisme. Mais ne serait-ce pas, là aussi, un peu de mauvaise foi ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
L'homme est un animal rationnel, c'est bien connu.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Autant s'y mettre tout de suite (ou, allez... dès demain) ! »

Le philosophe américain John Perry est professeur émérite à l'université de Stanford en Californie. Étant de son propre aveu un procrastinateur invétéré, il a créé le concept révolutionnaire de « procrastination structurée ».

Traduit dans une vingtaine de langues, cet ouvrage lui vaut aujourd'hui une reconnaissance internationale

Il n’y a pas de Ajar : monologue contre l’identité

Et moi qui, petit, trouvait les discours des curés interminables et que pour dire la même chose ils auraient été bien inspirés de raccourcir leur prêches. Je n’avais pas encore entendu de rabbin.

Ajar fut un des noms que Gary créa pour dire au monde qu'il n'allait pas se résoudre à une mort annoncée, ni celle des hommes, ni celle des mots.
Son pseudo fut un dernier pied de nez au morbide qui vous rattrape toujours, mais qu'on peut tromper un temps avec un peu de panache, avec une manigance littéraire qui interdit à l'homme de n'être que lui-même. À travers Ajar, Gary a réussi à dire qu'il existe, pour chaque être, un au-delà de soi ; une possibilité de refuser cette chose à laquelle on donne aujourd'hui un nom vraiment dégoûtant : l'identité.
Il n’y a pas de Ajar : monologue contre l’identité de Delphine Horvilleur

Oui, car malgré la petite taille de l’ouvrage, Delphine Horvilleur se perd en circonvolutions – souvent très drôles et fort bien écrites – pour arriver à ses fins.

Non, non, non, non...
Ne jamais prononcer son nom, non, non, non, non...
Ne jamais prononcer son nom.
J'avais promis à mon père de ne jamais prononcer Son nom. Il m'a dit de ne jamais parler de vous-savez-qui... D'abord, parce qu'Il n'existe pas et ensuite, parce que si tu en parles, Il pourrait très bien croire que tu l'appelles et décider de se pointer.
C'est exactement comme dans la saga d'Harry Potter. Tous évitent soigneusement de nommer le méchant pour pas qu'il montre le bout de son nez. Et effectivement, à la seconde où quelqu'un prononce le nom de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, tout part vrille.

Comme Le siècle des égarés que je lisais juste avant, Il n’y a pas de Ajar tente de lutter contre les identités.

Hélas, toutes ces digressions, traits d’humour, métaphores et images m’ont égaré, noyé dans un propos qui perdait en lisibilité. Et d’ailleurs, l’identité, c’est quoi ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Avouez que c'est une drôle de coïncidence. Précisément l'année où je viens au monde, il commence à signer du nom de l'Autre. Comme par hasard, au moment même où un officier d'état civil écrit soigneusement mon nom dans un registre municipal et estampille ma déclaration de naissance, Romain Gary choisit, lui, de publier ses livres sous pseudo.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Dans ce monologue, un homme mystérieux affirme être le fils d'Émile Ajar, pseudonyme sous lequel Romain Gary a écrit notamment La vie devant soi.

Cet enfant de père inventé demande à celui qui l'écoute : es-tu le fils de ta lignée ou celui des livres que tu as lus ?

En interrogeant la filiation et le poids des héritages, il revisite l'univers de l'écrivain, celui de la Kabbale, de la Bible, de l'humour juif... mais aussi les débats politiques d'aujourd'hui, enfermés dans les tribalismes d'exclusion et les compétitions victimaires.

Et si Gary/Ajar étaient les meilleurs antidotes aux obsessions identitaires et mortifères du moment ?

Journal d’Adam & Journal d’Ève

Un tout petit (vraiment très petit) journal des premiers jours, le journal d’Adam suivi du journal d’Ève

Lundi
La nouvelle créature, avec ses longs cheveux, est toujours fourrée dans mes pattes. Toujours à traîner à mes basques et à me suivre comme un petit chien. Et je n'aime pas ; je n'ai pas l'habitude d'avoir de la compagnie. Si seulement elle voulait bien rester avec les autres animaux... Ciel couvert aujourd'hui, avec un petit vent d'est ; je pense que nous allons avoir de la pluie... Nous ?... Où est-ce que j'ai bien pu dénicher ce mot?... Je me souviens maintenant - c'est la nouvelle créature qui l'emploie.
Journal d’Adam & Journal d’Ève de Mark Twain

C’est cocasse et léger, une petite (oui, vraiment) lecture distrayante.

Avec des trop rares illustrations de Sarah d’Haeyer

Et pourtant, on se lasse rapidement de cet Adam insensible, distant et mutique et de cette Ève bavarde, collante et émotive… (vous saisissez le cliché ?)

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Je crois que je commence à comprendre à quoi sert la semaine : à donner le temps nécessaire pour récupérer des grandes fatigues du dimanche. L'idée n'est pas mauvaise. Il a fallu qu'Ève grimpe à nouveau à cet arbre. Je l'en ai fait redescendre vite fait en lui balançant des mottes de terre. Elle a dit que personne ne l'avait vue. Apparemment, ça lui suffit comme justification pour courir tous les risques, même quand il y a danger. C'est ce que je lui ai dit. Le mot justification l'a remplie d'admiration - et l'a rendue aussi un peu envieuse, je pense. C'est un bon mot