Camiothécaire-biblioneur aux lectures éclectiques. Romans, essais, biographies et autobiographies, récits de voyage, bandes dessinées, nouvelles, chroniques, témoignages… des critiques selon l'humeur
Est-ce vraiment très moral de projeter de tuer son mari ou son épouse ? Nul besoin de réponse, pourtant, dans nombre de ses romans, Simenon s’amuse de situations où l’on pourrait se dire que… ma foi… le ou la pauvre avait bien des raisons pour.
C’est amoral, certes, mais bon !Dimanche de Georges SimenonMais ici, il ne s’arrête pas là et plonge encore plus profondément dans le sordide.
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Il n’avait jamais eu besoin de réveille-matin et depuis un certain temps déjà, les yeux clos, il était conscient du soleil qui se glissait entre les deux minces fentes des volets, quand il entendit enfin une sonnerie étouffée dans la chambre d’en haut.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Emile, fils d'un hôtelier de Champagne, près de Luçon, a 25 ans, il est allé aider des amis de sa famille, les Harnaud, qui ont repris une petite auberge sur la Côte d'Azur. L'affaire ne marche pas très bien, M. Harnaud meurt, et sa veuve, désireuse de retourner à Luçon, accueille plus que favorablement l'union de sa fille Berthe avec Emile. Celui-ci, intelligent et courageux, a fait de La Bastide sa chose personnelle, et la fait prospérer. Il ne va pas tarder à s'apercevoir que c'est Berthe la vraie patronne.
Le grand Bob, c’est l’exploration de l’âme d’un homme par un ami. Bob s’est suicidé sans laisser de message avec l’espoir (vain) que sa mort passe pour un accident.Le grand Bob de Georges SimenonMais qui était-il vraiment ? Et pourquoi a-t-il mis fin à ses jours ?Un roman exploratoire sensible qui date pourtant d’une autre époque où l’on retrouve Simenon dans ses travers les plus déplaisants lorsqu’il parle du corps des femmes. Comment pouvait-il comprendre aussi finement l’humain tout en étant aussi fièrement nauséabond ? Une époque misogyne… Seulement ?
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Je n'étais pas à Tilly ce dimanche-là, car profitant de ce que les enfants étaient chez leur grand-mère, nous avions accepté, ma femme et moi, une invitation à passer le week-end chez des amis qui possèdent une propriété en bordure de la forêt de Rambouillet. La journée avait été chaude et lourd avec des menaces d'orage et même quelques grosses gouttes de pluie vers la fin de l'après-midi.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Pourquoi Robert, dit le Grand Bob, a-t-il choisi de disparaître en se noyant au cours d'une partie de pêche ? Ami de Bob et de sa femme Lulu, le docteur Coindreau cherche dans le passé de cet homme au tempérament plutôt boute-en-train des éléments qui puissent élucider ce mystère.
Issu d'une famille honorable, Bob a jadis abandonné ses études de droit pour vivre avec la légère et gentille Lulu, chapelière à Paris. Leur vie a été modeste mais heureuse. Alors ?
Alors, Coindreau finira par comprendre le destin de deux êtres qui s'aimaient, et qui n'ont pas voulu être indignes l'un de l'autre...
Une fois encore, le romancier du Petit Homme d'Arkhangelsk, créateur de Maigret, nous fait pénétrer dans le quotidien d'existences ordinaires, dont il sait comme personne exprimer l'humanité, et parfois la grandeur.
Dans ce roman d’ambiance (malsaine), Simenon explore avec talent des relations familiales sinistres et étouffantes. Ici, rien ne va ! Le fils couche avec la bonne, ce qui donne des idées au père qui s’y met aussi, la mère passe d’épisodes alcooliques en épisodes alcooliques et la fille – qui nous en dresse le tableau – couche avec son patron dans une dévotion absolue.Novembre de Georges Simenon… Jusqu’à la rupture.
Un sombre tableau que Simenon va salir encore. Une lecture idéale pour un mois froid et humide, au fond d’une grange avec une bouteille de mauvais alcool et une corde à la main
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Je ne crois pas avoir assisté auparavant à ce phénomène. On était le second vendredi de novembre, le 9 novembre exactement. Nous étions tous les quatre à dîner autour de la table ronde, comme les autres soirs. Manuela venait d'enlever les assiettes à soupe et de servir une omelette aux fines herbes que ma mère était allée préparer à la cuisine.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Dans la grisaille de l'existence qu'ils vivent en banlieue, les membres de la famille Le Cloanec se côtoient, mais ne se parlent guère. La mère est alcoolique, le père, indifférent et lointain ; le frère et la sœur ont chacun leurs occupations précises et leur vie à part.
Une bonne récemment engagée va jeter le trouble dans la maison. Devenue la maîtresse du jeune Olivier, qui en est très épris, Manuela éveille les désirs du père Le Cloanec auquel elle accordera également ses faveurs.
Un western sur une colline au Canada, maudite par l’avidité de ses occupants et de ceux qui en convoitent l’or ou le pétrole. Carcajou de Eldiablo, dessins de Djilian Deroche, couleurs de Djilian Deroche et Marion ChancerelDans cette belle édition soignée, les planches plutôt naïves au trait marqué, oscillent entre de superbes créations et d’autres parfois plus brouillonnes ou moins abouties. Une bande dessinée bien aussi sale et violente que l’histoire qu’elle raconte. Les hommes sont bien tous pourris, veules et avides lorsqu’un peu d’or scintille sous leurs yeux
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) C'est ici ?
Oui, c'est l'endroit.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Alberta, Canada, 1895, par - 21 degrés Celsius.
Jay Foxton règne en despote sur la petite ville de Sinnergulch dont il détient la plupart des terrains et commerces.
À quelques miles de là sur une colline dominant la ville, vit un ermite farouche, Gus Carcajou, qui en exploite a minima les réserves d'or pour acheter sa gnôle.
Mais le terrain regorge d'un autre type d'or, noir celui-là, et Foxton est prêt à tout pour s'emparer de l'énorme magot qui lui échappe encore...
Ce roman dur est bien atypique. Car si la situation est ─ comme à l’habitude ─ sordide, l’ambiance y est légère, presque drôle. La maison des sept jeunes filles de Georges SimenonEncore une vue de l’époque (révolue ?) où les filles devaient se marier sans tache et où les mariages étaient sources de revenus et d’arrangements économiques.
Une bien drôle de maison, que celle de Monsieur Guillaume Adelin
Le châle de Marie Dudon
Une nouvelle complète cette édition, et là aussi, il sera facile d’en rire… jaune ! Marie Dudon, témoin d’un meurtre, se sent pousser les ailes de la richesse…Le châle de Marie Dudon de Georges SimenonUne nouvelle, encore une fois, bien éclairante pour saisir la vie des femmes de l’époque entre lessives, enfants, cuisine et autres tâches ménagères et manuelles
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Il marcha encore de la fenêtre à la bibliothèque, ce qui représentait trois bons pas, puis de la bibliothèque à la porte. C'était tout le parcours qu'il pouvait se permettre dans son bureau, la plus petite pièce de la maison en même temps que celle où on avait entassé le plus de meubles.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Guillaume Adelin a une épouse «absente» pour ne pas dire folle, une maison à rembourser et sept filles à marier. L'une est courtisée par un ancien marchand de fromages, une autre par un fils de général. Le premier épouserait bien Rolande mais elle a disparu. Le second, sans le savoir, serait le fiancé d'Huguette mais tombe amoureux de Coco qui reste insaisissable. Il va falloir trancher : cela pourrait être un vaudeville, cela reste du Simenon : les huissiers rôdent, la faillite guette… Comment tenir une maison, seul, même solide, au milieu de huit femmes à ce point surprenantes ?
Comme un écho à La serpe de Jaenada, qui questionnait le jugement de Henri Girard accusé du triple meurtre à la serpe, Catherine Girard propose sa vérité. Celle que lui avait confiée son père, l’assassin.In violentia veritas de Catherine GirardPour autant, les deux livres semblent ne raconter ni la même histoire, ni les mêmes personnages et le tout d’un point de vue totalement différent. Et c’en devient vraiment fascinant.
Une histoire de violence familiale et d’amour, comme un nœud qui ne pourrait se défaire qu’au ciseau (ou à la serpe).
Mais surtout, racontée par la fille de ! Et c’est probablement de là que ce livre (à l’écriture magnifique) tire toute son intime puissance
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Allongée sur le divan, face à la fenêtre, j'attends les questions d'Olivier, assis derrière moi dans le fauteuil du roi son père. Nous sommes en quatrième dans le même lycée et il me tanne depuis des semaines pour une séance de psychanalyse dans le cabinet de papa qui ne travaille pas le mercredi, avec lui dans le rôle du psy, moi dans celui de l'analysée. Je n'ai pas bien compris pourquoi, mais il a tant insisté que j'ai fini par céder.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Lorsqu'elle découvre à quatorze ans qu’on la surnomme « la fille de l’assassin », Catherine Girard interroge son père Henri Girard ─ plus connu sous son nom de plume, Georges Arnaud, auteur notamment du célèbre roman Le Salaire de la peur. L'horreur de ce que le vieil homme lui apprend plonge l'adolescente dans le déni. Un demi-siècle plus tard, dans un geste d'amour, elle se confronte à ce passé abyssal.
Le matin du 24 octobre 1941, au château d'Escoire, le père d’Henri Girard, sa tante et leur servante sont retrouvés morts, atrocement massacrés à la serpe. Seul survivant, Henri est inculpé, emprisonné dix-neuf mois dans l’un des cachots les plus insalubres de France et promis à la guillotine. Il est finalement acquitté.
L’énigme du triple assassinat d'Escoire, tant de fois revisitée, ne fut jamais élucidée.
Dans ce magnifique récit littéraire d’investigation familiale, Catherine Girard nous offre enfin sa vérité. D'une puissance exceptionnelle, In violentia veritas marque la naissance d’une écrivaine.
L’histoire touchante d’un bouquiniste, doux et discret marié à une femme jeune et pétillante. Et qui disparaît du jour au lendemain, le laissant seul et bien démuni.
Le petit homme d’Arkhangelsk de Georges Simenon
Et suite à un petit mensonge d’agrément social, les événements vont fatalement s’enchaîner.
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Il eut le tort de mentir. Il en eut l'intuition au moment où il ouvrait la bouche pour répondre à Fernand Le Bouc et c'est par timidité, en somme, par manque de sang-froid, qu'il ne changea pas les mots qui lui venaient aux lèvres.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Lorsqu'on demande à Jonas Milk, le petit bouquiniste et philatéliste du Vieux-Marché, où est passée sa jeune et jolie femme Gina, il répond évasivement qu'elle est allée à Bourges. Mais à mesure que les jours passent, cette réponse apparaît de plus en plus insuffisante ; et bientôt les ragots, les soupçons, l'hostilité de toute la ville se concentrent autour du petit homme d'Arkhangelsk, Russe naturalisé français, mais finalement resté aux yeux de tous l'étranger... Jonas est innocent, pourtant. Mais il faut croire qu'il appartient à un monde où les innocents sont faits pour devenir des victimes... Le créateur de Maigret, disparu en 1989, nous conte ici à petites touches, en observateur attentif des mœurs provinciales et de la nature humaine, un drame de la solitude. Sans lyrisme ni pathétique, il nous fait partager sa compassion. On se dit en refermant le livre que l'on a dû aussi, sans le savoir, côtoyer des Jonas Milk.
Un polar plutôt basique, avec un pauvre type, lâche, manipulé, incohérent. Et une bande de voleurs sanguinaires. Et la police qui attend patiemment que tout cela de décante. Il ne manque que Jules.
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Ils arrivèrent rue Saint-Antoine juste comme la séance finissait au cinéma Saint-Paul. La rue était déserte de la Bastille à l'Hôtel de Ville et, même plus loin, c'était une profonde tranchée vide jusqu'à la place de la Concorde, avec de rares passants minus-cules qui agitaient leurs jambes sur les trottoirs et parfois se risquaient à traverser de biais la chaussée.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Stan est coincé. Il a froid, faim, n'a plus un sou et ne sait pas où dormir. La porte de ses amis reste close. Sa compagne le quitte et retourne vers d'autres hommes en mesure de la protéger. Lui est trop mou, trop indécis pour s'en sortir dans un monde qui, si vous êtes hors du coup, ne fera rien pour vous aider. La police surveille et verrouille tout. Stan, d'origine polonaise, sous le coup d'un arrêté d'expulsion, erre dans Paris jusqu'à ce qu'un inspecteur lui propose d'infiltrer contre argent une bande de criminels endurcis. Des hommes et une femme qui n'hésitent pas à torturer et tuer pour récupérer des bas de laine. Maladroit, mauvais menteur, fragile et pris dans la nasse d'un quotidien sordide, Stan va participer à son tour à des agressions planifiées d'une rare violence. Ses complices, très vite, impitoyables, lui demanderont de faire ses preuves...
Avec beaucoup d’humour (il n’y d’ailleurs pas besoin de forcer le trait tant ces années sont ─ rétrospectivement ─ drôles), Caro nous raconte l’année du bac dans les années 80 vue par Daniel.Les derniers jours de l’apesanteur de Fabrice CaroEt tout y passe : la musique, les copains, la caf, les ragots, les fêtes, les études et bien sûr les fantasmes et les filles vues par ce qu’il serait de bon ton de nommer « un looser magnifique ».
Un portrait tendre et amusé sur des années compliquées
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Une photo de Michel Sardou ornait la couverture du Télé 7 Jours, accompagnée de la légende « Sardou au tournant de sa vie, 23 ans d'amour, de colères et de passion, il fait le point ». Je la regardais vaguement en buvant mon chocolat au lait. Mon frère à côté faisait un bruit monstre en mâchant ses corn flakes, absorbé par l'illustration figurant sur le paquet.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) L'année du Bac, la meilleure période de notre vie en même temps que la pire.
« Je m'étais façonné un faux moi intégralement taillé pour lui plaire. Elle avait adoré Le cercle des poètes disparus ? C'est dingue, c'était mon film culte. Elle aimait Sting et surtout son dernier album en date... Nothing Like the Sun ? Je vénérais cet album, de manière inconditionnelle. Elle admirait le chanteur pour son implication dans la défense de la forêt amazonienne aux côtés du chef Raoni ? J'étais à deux doigts de venir au lycée le lendemain avec un plateau de terre cuite coincé dans la lèvre inférieure... »
Jonglant avec l'euphorie et la fébrilité de nos dix-huit ans, Fabrice Caro livre la chronique drolatique d'une année de terminale à la fin des années 80.
Alors que le livre commence avec l’émancipation d’une jeune marocaine – issue d’une richissime famille – à Paris, le récit sombre rapidement dans une histoire bien plus glauque.La hchouma de Dounia HadniUne jeune femme sous l’emprise d’un homme, certes bien consentante et pourtant en souffrance, dans une relation destructrice.
Conte moderne des injonctions contradictoires qui ne mènent qu’à la destruction de la personnalité ou banale histoire d’une jeune femme ayant perdu tous repères et incapable de se retrouver ?
La voix de Sylia qui décrit, avec une fascinante froideur clinique, sa propre désintégration
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) « Tu vois, ma petite Sylia, rien ne pourra jamais nous arriver, parce que les chiens de la ferme que tu aperçois sur le toit, ils seront toujours là, à leur poste, suspendus pour veiller sur nous. »
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Sois polie sois jolie, ne ris pas trop fort juste un peu, tiens-toi bien, ne bois pas trop mais un peu quand même, cache-toi pour manger c'est ramadan. Démaquille-toi pour avoir l'air pâle, attends montre ? Mais tu ressembles à rien, maquille-toi. Fais voir tes belles jambes baisse les stores, fais comme si tu étais pieuse comme si tu aimais faire l'amour. Comme si tu n'étais pas toi. »
Écartelée entre des dictats contradictoires visant à faire d'elle « une bonne Marocaine » et « une vraie Parisienne », une jeune femme se débat et lutte pour sa liberté. Un premier roman coup de poing.