Exterminez toutes ces brutes ! : un voyage à la source des génocides

En intercalant trois récits (le voyage qu’il fait en Afrique alors qu’il écrit ce livre, Le coeur des ténèbres de Joseph Conrad et l’histoire des colonisations et du racisme institutionnalisé) Sven Lindqvist éclaire l’histoire moderne de façon terrifiante.

Exterminez toutes ces brutes ! Un voyage à la source des génocides de Sven Lindqvist

La partie historique est glaçante, elle raconte comment l’Europe s’est appropriée toutes les richesses du monde en spoliant, massacrant, torturant, délocalisant, trompant… (j’arrête ici car tout à été commis).

Une histoire des crimes de l’humanité, de la loi du plus fort (des navires, canons et fusils) et de l’aveuglement volontaire, des justifications odieuses, des complicités des états, du clergé et de scientifiques.

Un livre parfois difficilement soutenable qui pourtant ne fait que démontrer comment toutes les richesses occidentales se sont bâties sur un génocide planétaire.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Il existe dans une vie une poignée de livres inoubliables. Celui-ci en est un.

Sven Lindqvist est suédois et traverse le Sahara jusqu'au Niger. Dans de petits hôtels du désert, battus par les sables, il a emporté sa documentation sur la constitution des grands Empires en Afrique : l'Empire britannique, le Congo belge, l'Empire français, les colonies allemandes.
Et alors ? C'est tout. Pourtant aucun lecteur ne peut sortir indemne de ces pages.
D'une plume sèche et envoûtante, Lindqvist entremêle le récit de son voyage et l'évocation de l'Histoire. Il nous raconte la diffusion des théories raciales, le darwinisme dévoyé qui sous-tend la conquête coloniale et l'ivresse d'un rêve fou et monstrueux : éradiquer des populations entières pour faire renaître un homme nouveau.
Le livre remonte ainsi à la source des génocides du XXe siècle. Au fil des pages, la traversée de Lindqvist devient un voyage initiatique et vertigineux dans notre héritage européen

Un barrage contre L’Atlantique

Assis dans un fauteuil dans une belle propriété de son ami (bientôt ex-ami ?) au bout du Cap-Ferret, Frédéric se désole de vieillir.

Un barrage contre l’Atlantique : un roman français, tome 2 de Frédéric Beigbeder

Mais hélas, l’Atlantique, vagues après vagues, une marée après l’autre grignote les côtes aussi inexorablement que les années grisonnent les tempes des cinquantenaire.

Le petit Frédo nostalgise en se lamentant…

… mais au moins, ne s’évertuait-il pas à faire des phrases dans son roman français

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je voudrais faire ici un aveu : je suis complotiste.

Je pense que la nature conspire pour éradiquer l'homme.

L'être humain ayant causé trop de dégâts à la surface de la Terre, il est logique qu'elle songe à s'en débarrasser.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Au hasard d’une galerie de Saint-Jean-de-Luz, Frédéric Beigbeder aperçoit un tableau représentant une cabane, dans une vitrine. Au premier plan, un fauteuil couvert d’un coussin à rayures, devant un bureau d’écrivain avec encrier et carnets, sur une plage curieusement exotique. Cette toile le fait rêver, il l’achète et soudain, il se souvient : la scène représente la pointe du bassin d’Arcachon, le cap Ferret, où vit son ami Benoît Bartherotte. Sans doute fatigué, Frédéric prend cette peinture pour une invitation au voyage. Il va écrire dans cette cabane, sur ce bureau.
Face à l’Atlantique qui à chaque instant gagne du terrain, il voit remonter le temps. Par vagues, les phrases envahissent d’abord l’espace mental et la page, réflexions sur l’écriture, la solitude, la quête inlassable d’un élan artistique aussi fugace que le désir, un shoot, un paysage maritime. Puis des éclats du passé reviennent, s’imposent, tels « un mur pour se protéger du présent ». A la suite d’Un roman français, l’histoire se reconstitue, empreinte d’un puissant charme nostalgique : l’enfance entre deux parents divorcés, la permissivité des années 70, l’adolescence, la fête et les flirts, la rencontre avec Laura Smet, en 2004… Temps révolu. La fête est finie. Pour faire échec à la solitude, reste l’amour. Celui des siens, celui que Bartherotte porte à son cap Ferret. Et Beigbeder, ex dandy parisien devenu l’ermite de Guétary , converti à cette passion pour un lieu, raconte comment Bartherotte, «Hemingway en calbute», s’est lancé dans une bataille folle contre l’inéluctable montée des eaux, déversant envers et contre tous des millions de tonnes de gravats dans la mer. Survivaliste avant la lettre, fou magnifique construisant une digue contre le réchauffement climatique, il réinvente l’utopie et termine le roman en une peinture sublime et impossible, noyée d’eau et de soleil. La foi en la beauté, seule capable de sauver l’humanité.

Une expérience de lecture, unique et bouleversante, aiguisée, impitoyable, poétique, et un chemin du personnel à l’universel

Batailles

En partant de l’abandon de Rose par sa mère qui lui demande de ne pas la rechercher, Alexia Stresi tisse une histoire aux multiples fils qu’elle démêle avec brio.

Abandon, raison d’état, colonialisme, infanticide, enquête policière, recherche de l’identité ou racisme… autant de facettes qui sembleraient impossibles à réunir en 280 pages sans aboutir à une soupe informe. Et pourtant, le résultat est fluide, cohérent et réussi à toucher au plus près de l’intime.

Batailles de Alexia Stresi

Saloperie de raison d’état et de l’inhumanité des fonctionnaires dociles et obéissants !

Et pour les ignorants comme moi, le Bumidom, c’est ça !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Il y a un avant, et un après, dans la vie de Rose.

Tout a basculé quand elle avait vingt-sept ans. Le jour où sa mère a manqué à l'appel. Brigitte n'a laissé que trois phrases en partant, dont une terrible : « Rose chérie, si tu m'aimes autant que je t'aime, ne me cherche pas. » Elle a aussi écrit qu'elle reviendrait très vite. Cela fait dix ans.
Aujourd'hui, Rose va mieux. Mais un fait-divers au scénario glaçant secoue la France, et l'ébranle. Elle comprend qu'elle doit désobéir à sa mère et partir à sa recherche.
Batailles nous entraîne avec virtuosité dans une troublante quête des origines

Le voyant d’Étampes

Un boomer au pays du wokisme des réseaux sociaux, au milieu des haters, fachos, ultras, blessés et des trolls anonymes !

Le voyant d’Étampes de Abel Quentin

Une crucifixion (ne pas parler de lynchage) du bien maladroit Jean Roscoff – historien à la retraite, divorcé et alcoolique tentant de renaître tel un Phénix grâce à une biographie d’un poète noir américain (africain-américain, donc). Une histoire qui pourrait faire penser à La tache de Philip Roth s’il l’avait écrite à l’époque de Twitter.

La dégringolade d’un ancien militant gauchiste ex-touche-pas-à-mon-pote un peu radoteur enchaînant les bourdes dans un univers dont il ne maîtrise plus les codes.

Une cabale très instructive et bien foutue permettant de mieux saisir les nouveaux ressorts des polémiques et la non communicabilité des différents points de vue. Qui crie le plus fort ?

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«J'allais conjurer le sort, le mauvais oeil qui me collait le train depuis près de trente ans. Le Voyant d'Etampes serait ma renaissance et le premier jour de ma nouvelle vie. J'allais recaver une dernière fois, me refaire sur un registre plus confidentiel, mais moins dangereux.»

Universitaire alcoolique et fraîchement retraité, Jean Roscoff se lance dans l'écriture d'un livre pour se remettre en selle : Le voyant d'Étampes, essai sur un poète américain méconnu qui se tua au volant dans l'Essonne, au début des années 60.
A priori, pas de quoi déchaîner la critique. Mais si son sujet était piégé ?

Abel Quentin raconte la chute d'un antihéros roman tique et cynique, à l'ère des réseaux sociaux et des dérives identitaires. Et dresse, avec un humour délicieusement acide, le portrait d'une génération

On ne touche pas

Une prof de philo qui, par un coup de tête, se retrouve effeuilleuse dans un club.

On ne touche pas de Ketty Rouf

Une femme face à son désir, celui de plaire, d’oser être libre, d’aimer son corps, de transgresser, de voir jusqu’ou elle osera, de vivre, de s’enivrer, de jouer et jouir du désir des hommes.

L’occasion aussi de parler de l’éducation nationale, de l’enseignement, du découragement, du regard qu’on préfère poser ailleurs et de toutes les petites – et grandes – hypocrisies

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Joséphine est prof de philo dans un lycée de Drancy. Elle mène sa vie entre Xanax, Tupperware en salle des profs, et injonctions de l'Éducation nationale qui lui ôtent le sentiment d'exister.
Sauf que.

Chaque nuit, Joséphine devient Rose Lee. Elle s'effeuille dans un club de striptease aux Champs-Élysées. Elle se réapproprie sa vie, se réconcilie avec son corps et se met à adorer le désir des hommes et le pouvoir qu'elle en retire. Sa vie se conjugue dès lors entre glamour et grisaille, toute-puissance du corps désiré et misère du corps enseignant.
Mais de jouer avec le feu, Rose Lee pourrait bien finir par se brûler les ailes.
Récit d'un affranchissement, réflexion bouleversante sur l'image de soi et le rapport à l'autre, ce premier roman hors norme de Ketty Rouf fait voler en éclats les préjugés sur le sexe et la société

La salle de bain

Décidément, l’humour est une substance curieuse qui touche certains sans même effleurer d’autres.

La salle de bain de Jean-Philippe Toussaint

Chef-d’oeuvre ou divagations inutiles, je ne sais pas. Mais tout cela n’est pas pour moi

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Lorsque j'ai commencé à passer mes après-midi dans la salle de bain, je ne comptais pas m'y installer ; non, je coulais là des heures agréables, méditant dans la baignoire avec le sentiment de pertinence miraculeuse que procure la pensée qu'il n'est nul besoin d'exprimer.

Une exception, une merveille : l'éclosion d'un écrivain inclassable et parfait. Jean-Philippe Toussaint, 28 ans, a écrit quelque chose qui n'est ni une chronique ni un roman, mais une histoire picaresque version compacte, un bric-à-brac d'émotions et de détails saugrenus, une sorte de miracle qui tient sur le ton et non pas sur l'histoire. Pour situer cet auteur minutieux, pince-sans-rire, on songe à Keaton, à quelque chose qui rôde entre Salinger, les nouvelles du New-Yorker, quelques récits du meilleur Kafka. C'est sensible, fin, intelligent, si peu roman-français-de-la-rentrée qu'on est éberlué de cette trouvaille. On prend un plaisir étonnant à ce livre au charme acide, constamment humoristique, qui procure des délectations secrètes

Anéantir

MH signe ici son livre le plus humain, comme le démontre l’absence de code-barre sur sa quatrième de couverture. Certes, il reste toujours focussé sur les hypocrisies et la bêtise (qui consiste selon le Professeur Rolland à prendre des décisions contraires à son propre intérêt) de ses contemporains. Nous, donc ! Pourtant, il semble plus sensible à l’individu en témoignant une tendresse et une bienveillance dont je n’avais pas de souvenir dans ses précédents livres.

Anéantir de Michel Houellebecq

Un livre partagé en plusieurs parties qui suivent le parcours de Paul évoluant dans les hautes sphères politiques à l’heure des présidentielles de 2027 (un nombre premier). Une famille disloquée, des attentats (qui mènent où ?), un couple en difficulté, un père relié au monde par un clignement d’yeux et finalement, la maladie.

Un livre avec beaucoup de pistes inabouties, comme un auteur face à sa finitudeMH signe ici son livre le plus humain, comme le démontre l’absence de code-barre sur sa quatrième de couverture. Certes, il reste toujours focussé sur les hypocrisies et la bêtise (qui consiste selon le Professeur Rolland à prendre des décisions contraires à son propre intérêt) de ses contemporains. Nous, donc ! Pourtant, il semble plus sensible à l’individu en témoignant une tendresse et une bienveillance dont je n’avais pas de souvenir dans ses précédents livres.

Un livre partagé en plusieurs parties qui suivent le parcours de Paul évoluant dans les hautes sphères politiques à l’heure des présidentielles de 2027 (un nombre premier). Une famille disloquée, des attentats (qui mènent où ?), un couple en difficulté, un père relié au monde par un clignement d’yeux et finalement, la maladie.

Un livre avec beaucoup de pistes inabouties, comme un auteur face à sa finitude… ou le début d’à suivre ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
En 2027, Paul Raison soutient le candidat de la majorité pour l'élection présidentielle. Une description du monde qui nous entoure abordant des sujets aussi divers que l'amour, la mort, la société contemporaine...

Et puis merde

Un monde post apocalyptique, des révolvers, une communauté un poil bizarre, quelques gimmicks éculés avec des femmes très jeunes et belles, des vieux décrépis, et tueurs à gage maladroits, un piège comme une passoire, des morts.

Jeremiah, tome 36 : Et puis merde de Hermann

Tout cela sent le réchauffé d’une vieille recette qui a perdu toute saveur

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Jeremiah et Kurdy, seuls survivants d'un incendie ayant ravagé leur hôtel, tentent d'échapper à la police et se retrouvent sur une propriété privée très sécurisée. Ils sont accueillis par le propriétaire et découvrent vite ce qu'il cache avec tant d'empressement

Histoire de Mme de La Pommeraye

Une histoire incroyablement moderne et quasi féministe (pardonnez l’anachronisme). Qui, en tout cas, démontre les différents moyens et outils des hommes et des femmes pour obtenir justice. Une époque dans laquelle les hommes se battent en duel, décident et agissent. Mais celle où les femmes en sont réduites à manigancer ou intriguer pour obtenir réparation.

Histoire de Mme de La Pommeraye de Denis Diderot

Une époque libertine pour les hommes alors que les femmes sont soumises au qu’en dira-t-on moral.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
L'Histoire de Mme de La Pommeraye - l'épisode le plus célèbre de Jacques le Fataliste et son maître (1796) - est un magnifique contre cruel. C'est le récit de la vengeance d'une femme trahie, qui fait cruellement payer à son amant libertin son désamour, en lui jetant comme appât une jeune prostituée dont il tombe malgré lui éperdument amoureux. Mais dans ce terrible jeu de manipulation, personne n'est vraiment celui qu'il semble être...
Défense et illustration de la liberté des femmes à se faire justice elles-mêmes, plaidoyer en faveur de leur émancipation, ce texte est aussi le superbe portrait d'une femme indépendante.

«Un homme en poignarde un autre pour un geste, pour un démenti ; et il ne sera pas permis à une honnête femme perdue, déshonorée, trahie, de jeter le traître entre les bras d'une courtisane ?»

Le droit d’emmerder Dieu

Tout est dans le titre de cette plaidoirie de Richard Malka, avocat de Charlie Hebdo lors du procès des attentats de 2015.

Le droit d’emmerder Dieu de Richard Malka

Une plaidoirie intégralement retranscrite sur la non négociabilité de la liberté d’expression, sur les responsabilités politiques, médiatiques et religieuses. Une langue magnifique, des arguments brillamment mis en place dans un déroulé implacable. Un contre pied ferme contre toute tentative de retourner les responsabilités des attentats. Le droit au blasphème est partie entière des libertés.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«C'est à nous, et à nous seuls, qu'il revient de réfléchir, d'analyser et de prendre des risques pour rester libres. Libres de nous engager et d'être ce que nous voulons. C'est à nous, et à personne d'autre, qu'il revient de trouver les mots, de les prononcer, de les écrire avec force, pour couvrir le son des couteaux sous nos gorges.
À nous de rire, de dessiner, d'aimer, de jouir de nos libertés, de vivre la tête haute, face à des fanatiques qui voudraient nous imposer leur monde de névroses et de frustration - en coproduction avec des universitaires gavés de communautarisme anglo-saxon et des intellectuels qui sont les héritiers de ceux qui ont soutenu parmi les pires dictateurs du XXe siècle, de Staline à Pol Pot.»

Ainsi plaide Richard Malka, avocat de Charlie Hebdo, lors du procès des attentats de janvier 2015. Procès intellectuel, procès historique, au cours duquel l'auteur retrace, avec puissance, le cheminement souterrain et idéologique du Mal. Chaque mot pèse. Chaque mot frappe. Ou apporte la douceur, évoquant les noms des disparus, des amis, leurs plumes, leurs pinceaux, leur distance ironique et tendre. Bien plus qu'une plaidoirie, un éloge de la vie libre, joyeuse et éclairée