Fragments : rassembler les cœurs brisés

Qu’on ait quitté ou qu’on l’ai été, cette autopsie d’une rupture amoureuse parlera à toutes et tous.

Fragments : rassembler les cœurs brisés de Anaïs Schenké

Fragments raconte la douleur, le vide, la négation de soi, les excuses bidon ou maladroites, les incompréhensions et… l’interminable deuil (et ses rechutes)

Une bande dessinée d’une grande poésie graphique et scénaristique, presque trop douce pour réussir à témoigner de toute cette violence, tout en restant absolument juste.

Un album à ouvrir avec précaution, les mauvais souvenirs ne sont pas toujours très loin

Avec un gros coup de cœur pour l’utilisation d’un langage épicène fort à propos !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je crois qu'à cet instant, j'ai compris ce qu'il ne savait pas encore : ce n'était pas la soirée qu'il quittait, c'était moi. »

Parce que la rupture amoureuse est un moment de vie charnière d'une rare violence où l'on se retrouve face à soi-même, au bord du vide abyssal que laisse la perte de l'amour de l'être aimé, cet ouvrage saura résonner en chacun·e de nous.

Entre tristesse, colère, amertume, auto flagellation, amour et désamour, les ruptures que l'on traverse nous forcent souvent à renoncer pour accepter. Renoncer à l'autre, à une partie de soi.

C'est aussi dans ces moments que l'on puise dans ses dernières ressources pour « rassembler ses morceaux » et dépoussiérer notre vision de l'amour pour valoriser celle que l'on a de nous-mêmes.

Ce roman graphique est un voyage au coeur de l'intime, où se mêlent la douleur, le beau, les souvenirs, la violence, les moments de joie et d'espoir. Explorant nos sentiments et ressentiments les plus profonds, il porte la voix de tous les coeurs brisés et de leurs blessures les plus personnelles

Ex-libris

Attiré par le côté très « graphique » de la couverture, j’ai trouvé une bande-dessinée tout à fait atypique. Un mélange entre hommage et escape-game constamment à la limite de la folie.

Ex-libris de Matt Madden

Tout débute en caméra subjective, en incarnant une personne qui se retrouve dans une pièce avec une bibliothèque pleine de bandes-dessinées. Et c’est en les ouvrant, qu’à la manière d’un jeu de piste, cet ex-libris guidera son personnage.

Une BD qui n’est pas sans rappeler La mystérieuse flamme de la reine Loana d’Umberto Eco, où Yambo, un libraire antiquaire amnésique, se retrouvait dans le grenier d’une maison d’enfance à relire les BD de sa jeunesse en Italie fasciste.

Une plongée assez subtile (même si parfois un peu répétitive), pleine d’hommages aux grands noms de la littérature et de la bande dessinée

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un mystérieux personnage se trouve dans une petite pièce, avec pour seul mobilier un lit, un tapis et une bibliothèque pleine de bandes dessinées dont il entreprend la lecture. À mesure qu’il passe d’un ouvrage à l’autre, les styles de dessin et les histoires se succèdent, nous plongeant dans différents univers graphiques et narratifs. L’atmosphère se fait de plus en plus inquiétante, d’autant que certains livres semblent contenir des messages secrets… Après « 99 exercices de style », Matt Madden se livre ici à un nouvel exercice d’influence oubapienne, nous proposant un méta-récit truffé de références aux mondes de la bande dessinée et de la littérature. « Ex–libris » rend ainsi hommage à des auteurs comme Jorge Luis Borges, Julio Cortázar, Vladimir Nabokov ou encore Italo Calvino dont la nouvelle « Si par une nuit d'hiver un voyageur » a d’ailleurs inspiré ce livre. Matt Madden signe avec « Ex–libris » une bande dessinée labyrinthique qui se joue des frontières entre le réel et l’imaginaire

Jumelle, tome 1 : Inséparables

Clairement, le plus gros défaut de cette histoire, c’est qu’elle n’est pas finie. Car, c’est une jolie petite merveille.

Jumelle, tome 1 : Inséparables de Florence Dupré la Tour

Florence explore son enfance et sa relation avec sa sœur jumelle, Béné. Une relation fusionnelle faite de rapprochements, de jalousies, de désirs, de rôles à tenir, de fantasmes, de déceptions et de retrouvailles… Tout y passe et tout semble tellement juste que c’en devient troublant.

Un dessin naïf aux sublimes aquarelles pour une introspection d’une grande profondeur.

Et je viens de voir le titre et la couverture du deuxième tome… il me fend déjà le coeur

Jumelle, tome 2 : Dépareillées

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je suis si seule...
Qui parmi la multitude saura me comprendre ?
M'aimer sans condition.
Me tendre toujours la main.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
La quête de l'être aimé peut parfois prendre toute une vie. Florence, elle, aura connu sa plus grande histoire d'amour dès sa naissance : celle qu'elle a vécu avec sa jumelle, Bénédicte.

Flo et Béné vont faire l'expérience du bonheur le plus pur, mais aussi, corollaire de toute relation fusionnelle, de la souffrance.

Florence arrivera-t-elle à trouver sa place dans ce couple gémellaire ? Comment construira-t-elle son identité, sa singularité ? Et les autres, les « touseul », comment font-ils pour survivre ?

Faut pas prendre les cons pour des gens, tome 3

Après deux premiers tomes époustouflants, que dire de la déception face à cet insipide opus, aux maigres blagounettes (dont certaines ressortent toutefois de ce petit lot d’une cinquantaine de pages).

Faut pas prendre les cons pour des gens, tome 3 de Emmanuel Reuzé, Nicolas Rouhaud, Vincent Haudiquet et Jorge Bernstein

Un gros zut pour une bédé toujours aussi politique et engagée mais qui ne m’aura tiré que quelques petits sourires convenus.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Après les succès des deux premiers tomes, Faut pas prendre les cons pour des gens revient en novembre pour un tome trois toujours aussi hilarant et terriblement efficace. Un petit bijou d'humour noir et absurde sur la bêtise ordinaire. Après deux années de travail à manipuler la mécanique de l'absurde pour mieux tordre les clichés de notre société, Emmanuel Reuzé approfondit son analyse de la bêtise humaine et publie un troisième opus toujours aussi drôle et grinçant. Dans ce nouvel album, il aborde par l'absurde des grands sujets de société tels que l'enseignement, la pauvreté, le racisme ordinaire, l'intelligence artificielle, la radicalisation, le dopage, l'eugénisme, le harcèlement publicitaire, la corrida, les services après vente, les déserts médicaux... Chaque gag est construit avec intelligence, dans un style réaliste dont la répétition de cases creuse le décalage comique entre dialogues et situations. Mais s'il a bien conservé son style réaliste, Reuzé a continué à développer son dessin sur ce troisième tome pour nous offrir de superbes pages qui fourmillent de détails. Avec un humour absurde et féroce, Emmanuel Reuzé, Nicolas Rouhaud, Jorge Bernstein et Vincent Haudiquet font une fois de plus la démonstration de la bêtise du réel, et dénoncent sa violence.

Le manuel de la jungle

Nicoby et Joub se sont retrouvés dans un petit périple en Guyane française dans la forêt amazonienne. Deux froussards paniqués au milieu d’une jungle hostile… Heureusement fort bien accompagnés !

Manuel de la jungle, un voyage avec Olivier Copin de Nicoby et Joub. dessin Nicoby et aquarelles de Joub

Ce très drôle voyage démontre que les plus grands dangers ne sont pas ceux qu’on aurait attendu, même si les piqures de raies, les dents des crocodiles, les mygales, serpents et autres fourmis ne sont pas à sous-estimer.

Un récit de voyage bien alcoolisé aux dessins et couleurs très vivants.
Et BANG ! BANG !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Comment survivre au milieu des serpents, des araignées et des orpailleurs de la jungle guyanaise quand on est un auteur de bandes dessinées habitué à la quiétude de son atelier climatisé ? Nicoby vit en Bretagne et son ami Joub s'est installé à Cayenne. Là-bas, ils ont rencontré un coureur de forêt qui a voulu leur prouver que l'Enfer vert pouvait être un paradis des sens. Entre expédition initiatique et récit documentaire, les deux dessinateurs esquissent avec drôlerie - et parfois gravité - un portrait unique et inédit de la plus fascinante et de la plus inquiétante de toutes les jungles de notre planète.

Gianna

Derrière un dessin très intéressant avec des aquarelles rehaussées de crayonnés de couleurs osés et pleins d’émotions se trouve un album très fort sur la liberté sexuelle, le regard de l’autre et sa puissance destructrice dans la bouillonnante (et encore bien pensante) Italie des années 70, les années de plomb, de répression des révoltes étudiantes et de soif de liberté.

Gianna de Arianna Melone

Était-il alors possible pour une fille d’y mener la sexualité qu’elle souhaitait ?

Les réponses sont dures et sanglantes avec une fin qui n’est pas sans rappeler la triste vie (euphémisme) de Rosemary Kennedy… Car oui, cette fiction est bien proche de la sordide réalité !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les gens se donnent souvent beaucoup de mal pour paraître « différents »... Pour se sentir uniques, spéciaux. Ils ignorent à quel point il est difficile d'être vraiment différent.

Un premier roman graphique en forme de manifeste pour le droit à la sexualité féminine.

Ces jours qui disparaissent

Acrobate dans une troupe, Lubin se cogne la tête et depuis… il disparait un jour sur deux. Jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’une autre personne prend possession de son corps ces jours-là. Un autre lui, plus travailleur, investi professionnellement et aussi, bien plus propre… même s’il mange un peu n’importe comment et qu’il est bien moins sportif.

Ces jours qui disparaissent de Timothé Le Boucher

Mais alors… qui est-il ? Qui est le vrai ? Lui ou son autre lui ? Comment s’accrocher à sa vie ? Lutter pour elle ? Qui est légitime ? Peut-on partager une vie ? Et ses amours ?

Une bande-dessinée qui m’a bien scotché, me laissant plein d’empathie pour celui qui s’est fait faucher sa vie un jour sur deux… pour le moment ! Et dans cette BD qui fait la part belle au looser, difficile de ne pas espérer jusqu’au bout.

Un album porté par un scénario brillant et un dessin très frais à la ligne claire. Une grosse réussite !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Lubin... Ta tête ?
Ça va, je sens presque plus rien...
J'ai juste perdu un paquet de neurones.
Encore faudrait-il qu'il y en ait eu.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Que feriez-vous si d'un coup vous vous aperceviez que vous ne vivez plus qu'un jour sur deux ? C'est ce qui arrive à Lubin Maréchal, un jeune homme d'une vingtaine d'années qui, sans qu'il n'en ait le moindre souvenir, se réveille chaque matin alors qu'un jour entier vient de s'écouler. Il découvre alors que pendant ses absences, une autre personnalité prend possession de son corps. Un autre lui-même avec un caractère bien différent du sien, menant une vie qui n'a rien à voir. Pour organiser cette cohabitation corporelle et temporelle, Lubin se met en tête de communiquer avec son « autre », par caméra interposée. Mais petit à petit, l'alter ego prend le dessus et possède le corps de Lubin de plus en plus longtemps, ce dernier s'évaporant progressivement dans le temps. Qui sait combien de jours lui reste-t-il à vivre avant de disparaître totalement ?

Au-delà d'un récit fantastique vraiment prenant, Ces jours qui disparaissent pose des questions fortes sur l'identité, la dualité de l'être et le rapport entre le corps et l'esprit.

Gauguin : loin de la route

Comme indiqué dans l’avant-propos, cette bande dessinée ne tient pas à relater l’entièreté de la vie de Gaugin, mais s’attache plutôt à la fin de la vie du peintre aux Marquise :

C’est vers un Gauguin cynique – en Diogène des îles Marquises -, boiteux et bringueur, fort en gueule et fragile, bourlingueur incontrôlable, ogre d’égoïsme et de sublime, que nous naviguerons. Un Gauguin qui fit honneur à la mémoire de sa grand-mère, Flora Tristan, écrivaine et ouvrière féministe, socialiste et internationaliste. Un Gauguin qui vécut ses dernières années, celles que nous avons choisi de retracer tout au long de ces pages, comme chante le cygne de la légende avant de tirer sa révérence.

Gauguin : loin de la route de Maximilien Le Roy, dessin de Christophe Gaultier, couleurs de Marie Galopin

Et, en ce sens, c’est un portrait plutôt réussi, magnifié par un dessin fort en trait très affirmé et dont les sales couleurs renforcent magnifiquement le propos de ce rude personnage, monstre boiteux finissant.

Un album bien loin des vahinés alanguies pour un âpre portrait, certainement plus ressemblant que les images d’Epinal de l’imaginaire publicitaire. Et franchement, cet anarchiste, anticolonialiste et anticlérical me plait beaucoup.

Maintenant… pour ce qui est des très jeunes filles… une vision plus critique aurait peut-être été utile, et ce malgré le bien léger avertissement préliminaire

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
2 septembre 1903, Papeete, Tahiti
Cinq francs ici, qui dit mieux ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Lassé de sa vie en France, Paul Gauguin débarque à Tahiti où il décide de s'installer. Face au dépaysement absolu que lui procure la vie sous les Tropiques, le peintre retrouve un nouveau souffle, un appétit de vivre et une inspiration renouvelée.

Je partirai là-bas et je vivrai en homme retiré du monde soi-disant civilisé pour ne fréquenter que les soi-disant sauvages.
Paul Gauguin

L’âge des corbeaux

Vladimir Principal n’arrive pas à se faire publier. Pourtant, il est bien convaincu par son talent. En plein désespoir il laisse femme et enfant et sort noyer sa misère dans l’alcool. Il rencontre alors un éditeur de destin qui va, en un éclair, changer sa sa vie.

L’âge des corbeaux de Parno, dessins de Jicé

Mais que désirait-il vraiment ?

Une fable un peu gentillette aux dessins fort soignés, un tourbillon bien rythmé au milieu d’un magnifique Paris la nuit des années 40-50

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
En panne d'inspiration
«... à la faveur du brouillard, les corbeaux envahirent le terrain...»


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Vladimir Principal, écrivain malchanceux, n’est jamais parvenu à se faire publier. Un beau soir, il va boire son désespoir et faire le deuil de son inspiration dans un bar. Il y rencontre un bien mystérieux individu, un vieil homme qui se dit « éditeur de destin ». Ce dernier propose à Vladimir ni plus ni moins que d’avoir ce qu’il a toujours voulu.
Le voici donc écrivain célèbre, honoré, convoité, chouchouté, adulé, suivi, harcelé…

La tristesse de l’éléphant

Il y a tout dans cette bande dessinée. L’histoire est d’une rare poésie, le dessin crayonné superbe alterne entre monochrome et un rouge et bleu aux couleurs cirque, des personnages attachants… C’est magnifique.

La tristesse de l’éléphant de Nicolas Antona, dessins de Nina Jacqmin

Mais c’est triste aussi (peut-être limite mélo, mais c’est réussi).

L’histoire de (Lou-)Louis, un garçon orphelin en surpoids, souffre douleur du pensionnat qui tombe amoureux d’une petite dresseuse d’éléphants.

Une merveille !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Tu sais, mon vieux compagnon...
Quelqu'un m'a dit un jour :
« La vie, c'est des étapes...
La plus douce, c'est l'amour,
La plus dure, c'est la séparation,
La plus pénible, c'est les adieux,
La plus belle, c'est les retrouvailles. »


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Louis est un adolescent mal dans sa peau élevé chez les jésuites. Il n'a pas d'ami et sert de bouc émissaire à ses camarades. Mais cette existence morose s'illumine quand Louis se rend au cirque Marcos et qu'il y retrouve Clara, une jeune dompteuse d'éléphants