Mère à l’horizon

Quel passeur d’émotions ! Elle sont toutes là et Jacques Gamblin nous les fait toucher, sentir et en goûter les saveurs.

Après ça je ne dis plus rien et personne ne dit plus rien. Je m'accroche à ma ceinture pour survivre jusqu'à Burcy.
On roule parfois trop vite parfois trop lentement. Je fais les comptes, les minimes courent à 14 heures, il faut que j'y sois à 13 pour m'échauffer. Il y a soixante kilomètres, pas très doué en calcul mental, je conclus qu'avec une moyenne de soixante, on devrait mettre une heure. Je toussote pour regarder discrètement ma montre. 11 h 20. Mimile me dit tu es malade, je réponds non ça va. 
À la place du mort on a une meilleure conscience du danger mais on est moins malade. On ne peut pas tout avoir
Mère à l’horizon de Jacques Gamblin
Plus qu’une autobiographie qui part dans tous les sens, il s’agit plutôt d’un carton de photos qui serait tombé et dont l’auteur nous en rappellerait les souvenirs. L’enfance, la quincaillerie, les débuts à la technique, puis sur les planches et…Et surtout, la famille, la mère et sa mémoire qui s’en va.

Et c’est très touchant, un peu déconstruit, pas très bien fagoté… mais c’est tendre et chou

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Demain on change d'heure.
- Ah oui comment je vais m'y retrouver ?
- Je vais régler ta montre à l'heure de demain. Comme ça quand tu te réveilleras, tu seras à la bonne heure.
- Oui mais... demain il sera quelle heure ?
- Je ne sais pas. Quand tu vas te réveiller. Voilà j'ai réglé ta montre, la pendule, ton réveil... Ils seront à l'heure de demain.
- Oui mais l'heure elle va tourner cette nuit !
- Eh oui et comme ça demain elle sera à la bonne heure de demain.
- Oui mais si tu la mets maintenant à l'heure de demain et qu'elle continue de tourner cette nuit, elle ne sera pas à l'heure demain.
- Maman...


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un hommage bouleversant de Jacques Gamblin à sa mère, où le rire n'est pourtant jamais loin, prêt à déferler sur la grève.

Je n'ai plus que la mémoire de l'instant, dit-elle.
Elle reste assise de longues heures, les rideaux à peine ouverts.
Elle veut bien voir le dehors mais que le dehors ne la voie pas.
Elle se met du rouge à lèvres quand elle reçoit une visite.
Son premier baiser, elle l'a donné entre les casseroles et les pinces multiprises.
Elle rêvait de jouer le jazz.
Un jour, elle est montée à la grande échelle.
Comment tu vas te déguiser au prochain carnaval ? Elle répond :
En courant d'air.
Elle a commencé à perdre l'audition il y a quelques années. La mémoire a suivi et couru à sa perte. Sans bruit. Sans choc. Avec la vie qui change de volume.
Pour combler les phrases qu'elle ne prononce plus, j'écris. J'attrape son silence au vol, le fais rebondir, pour l'aimer encore, autrement, pour l'aimer mieux.

Un hommage bouleversant à la mère, où le rire n'est pourtant jamais loin, prêt à déferler sur la grève.

Les trois crimes de mes amis

Voilà un roman dur bien atypique. En est-ce d’ailleurs vraiment un ?
Deux hommes qui ont passé la quarantaine et l'âge de la séduction.
Laquelle des deux femmes va vouloir s'affranchir la première ?
Lequel des deux tuera le premier ?Simenon raconte ici sa jeunesse interlope et celle de trois de ses amis d’alors. Proxénètes, mythomanes, manipulés ou manipulateurs, suicidés ou meurtriers.

Ma mère disait :
 - C'est une « mauvaise maison »...
Mauvaise maison parce qu'on y louait des chambres meublées à des étudiants riches. Tout le quartier, certes, louait des chambres aux étudiants, mais il existait deux catégories de maisons celles où les locataires ne pouvaient pas recevoir de femmes et celles où ils avaient, comme on disait, « entrée libre ».
Or, là où nous sonnions, l'entrée était libre, très libre, et on voyait de la lumière aux fenêtres jusque tard dans la nuit tandis que de la musique filtrait par-dessous les portes.
On nous introduisait dans un appartement spacieux qui sentait l'eau de Cologne et, dès le premier coup d'œil, je prenais pied dans un monde nouveau.
D'abord cette femme en peignoir de soie qui nous pilotait et qui, à chaque pas, laissait entrevoir ses jambes jusque bien au-dessus des bas...
Les trois crimes de mes amis de Georges Simenon
Autobiographie ou roman ? Probablement un peu des deux. L’occasion pour l’auteur de se questionner sur la destinée. Pourquoi eux, pourquoi moi ? Quels furent nos choix, à quel moment furent-ils décisifs ?Alors, j'ai presque envie de demander à chacun :
- Combien d'assassins, combien d'assassins manqués comme les Deux Frères, avez-vous connus pendant votre enfance ?
N'ai-je reçu en partage que la proportion normale ? Est-ce le déchet naturel d'une société ?
Sinon, pourquoi, en si peu d'années, en un lieu déterminé, ai-je vu mourir le petit K..., ai-je connu Hyacinthe Danse et ai-je collaboré avec Deblauwe, tandis que je tutoyais les Deux Frères ?Un roman un peu vide, à l’instar de ces questions dont on ne réussi à trouver de réponse

Le 32e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
C'est déroutant ! Tout à l'heure, que dis-je, il y a un instant encore, en écrivant mon titre, j'étais persuadé que j'allais commencer mon récit comme on commence un roman et que la seule différence consisterait dans la véracité.

Or, voilà que je découvre soudain ce qui fait l'artifice du roman, ce qui fait qu'il ne peut jamais être une image de la vie : un roman a un commencement et une fin !


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je ne me doutais de rien et mes amis étaient des assassins ! Je ne me doutais de rien quelques années plus tard quand je commençais à écrire des romans policiers, c'est-à-dire des récits de faux crimes, tandis que ceux avec qui j'avais vécu jadis, qui avaient respiré la même atmosphère que moi, partagé les mêmes joies, les mêmes distractions, discuté les mêmes sujets, se mettaient à tuer pour de bon. »

Willibald

Il y a des livres où, même à la dernière page tournée, on se demande encore si l’histoire est vraie. Un peu, beaucoup… ? Qu’importe.

Les doigts de Willibald travaillent patiemment. Un petit tas de clous se forme à côté de son genou droit. Il se lève, fait le tour de la toile, assouplit les plis du tissu criblé de trous. Désolidariser le Sacrifice du cadre en bois.
Plier une peinture est un sacrilège. Plier une toile signifie en abîmer les multiples couches qui la recouvrent: enduits, peinture, vernis. C'est une blessure profonde qui demande chirurgie, une cicatrice indélébile. Willibald ne l'ignore pas et pourtant il n'hésite pas. Combien de plis pour placer Le Sacrifice dans sa valise ? Quelle nécessité le pousse à un tel geste, alors que sa vie est en danger ?
Willibald de Gabriella Zalapì
L’histoire d’un aïeul juif, collectionneur d’art à Vienne fuyant l’Anschluss avec le tableau d’un élève de Rembrandt, « Le sacrifice d’Abraham ».
Une histoire de famille comme elles le sont toutes, avec des joies et des souffrances, des richesses, des douleurs et des non-dits qui laissent un voile de mystère auréoler les fables pour les enfants.

Un roman fascinant entre Vienne, le Brésil et Genève autour de deux personnages : Willibald et son tableau

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La salle est surchauffée. Une voix d'homme annonce « Lot numéro 467 ». C'est leur lot. Silence. Elle ne voit pas les mains discrètes qui font grimper les prix. Les visages restent impassibles. Quand le marteau du commissaire-priseur frappe, cela produit un bruit sec, clac. C'est dans l'autorité de ce « clac-adjugé » que Mara réalise l'aspect définitif de la situation.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis l’adolescence Mara est habitée par un tableau suspendu dans le salon de son H.L.M. Willibald, qui a acheté cette toile dans les années 1920, la hante toute autant. Lorsqu’il fuit Vienne en 1938, il n’emporte que ce Sacrifice d’Abraham, soigneusement plié dans sa valise. Entrepreneur et collectionneur juif, il refait sa vie au Brésil, loin des siens. Lors d’un séjour en Toscane chez sa mère Antonia, Mara déchiffre les lettres de Willibald qu’elle retrouve dans un hangar. Elle observe les photos, assaille de questions Antonia, « qui sait mais ne sait pas ».

J’ai péché, péché dans le plaisir

S’il m’a été difficile de rentrer dans ce livre (principalement à cause de mon ignorance – et de mon peu de goût pour la poésie), il m’a bouleversé !

J’ai péché, péché dans le plaisir de Abnousse Shalmani
Une biographie croisée qui suit Forough Farrokhzad et Marie de Régnier, vies de passions, de poésie et de liberté.

Mais la liberté est dangereuse.

Merci Abnousse Shalmani. Forough, Marie et Cyrus, je vous ai aimé

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Téhéran, avril 1956
Seul un regard peut enhardir un timide. Celui intense de Forough enflamme instantanément le jeune homme planqué derrière la mince rangée de lecteurs, cigarettes en main, journaux en guise d'éventails sous la chaleur printanière de Téhéran, qui se poussent du coude pour attirer le regard de la poète. Forough, craintive, regarde justement au-delà des volutes de fumée et des initiés qui se regroupent dans l'arrière-salle d'une librairie, pour écouter la poète qui, paraît-il, révolutionne la poésie classique et assume le scandale d'une vie libre, et elle se fixe sur le timide se ratatinant sur son siège, comme sur une échappatoire, un horizon. Il prend ce regard pour lui et se sent capable, se promet-il, de lui adresser la parole - c'est la première fois qu'elle le regarde.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Téhéran, 1955. A la suite d’une lecture de ses poèmes, le regard de Forough Farrokhzad (1934-1967), égérie des milieux littéraires iraniens qui n’a que vingt ans, est accroché par celui d’un jeune homme. Elle s’apprête à repousser les avances de Cyrus, ou la Tortue, comme elle le surnomme, et ignore qu’il va bouleverser son existence. Erudit, francophile, Cyrus lui traduit en persan les poèmes de Pierre Louÿs tout en lui racontant la vie du poète et celle de son grand amour, Marie de Régnier.

A travers celle de Marie, Forough entrevoit la vie dont elle aurait rêvé. Grâcieuse, intelligente, perverse, la fille du grand poète José-Maria de Heredia est une des reines de la très libre Belle Epoque, tout Paris se l’arrache. Elle collectionne amants et maîtresses, publie sans cesse et s’amuse dans les salons les plus prestigieux. La poétesse iranienne, elle, mariée à 16 ans à un artiste sans fantaisie, est bridée par sa famille, son militaire de père et les mœurs de son pays. Tout le monde s’épie, tout se sait. Mais Forough ne sait qu’être libre et provoque scandale sur scandale au fil de la parution de ses recueils. Elle célèbre la chair, la vie, l’émancipation et ne se renie pas. Toute son existence, Forough cheminera avec l’histoire de Marie de Régnier et de Pierre Louÿs au cœur, au point de venir à Paris avec Cyrus, sur les traces des deux amants et de leur cohorte d’amis, Claude Debussy, Marcel Proust, Léon Blum, Liane de Pougy et Nathalie Clifford-Barney. Sa mort tragique, à 32 ans, mettra un terme à son œuvre d’une immense intensité, qui en fait sans aucun doute la plus grande poétesse de l’Iran contemporain.

Dans ce roman puissant et subtil, au rythme effréné, Abnousse Shalmani met en regard les vies extraordinaires de ces deux écrivaines qui firent toujours le choix de la passion, amoureuse, poétique ou purement sensuelle, au risque de s’en brûler les doigts. Une ode très contemporaine à la liberté artistique et à celles qui ne renoncent jamais, en Occident comme en Orient.

Patronyme

Peut-on tout écrire impunément sur les gens ? À priori, il me semblerait plutôt que non. Enfin… s’ils sont morts, et en plus de la famille, c’est plus simple. Pour autant ?

Patronyme de Vanessa Springora
Autant le consentement m’avait semblé légitime et important (en plus d’être brillant) ; autant ici… la démarche ne me semble guère utile, voir même franchement irrespectueuse. Que sa relation avec son père ait été difficile, qu’il ait été un sombre mytho colérique ou que sais-je… Avait-elle le droit de révéler son homosexualité qu’il avait toujours pris soin de cacher ?
Les écrivains sont des ogres.Reste une enquête plutôt passionnante sur son grand-père et son rôle durant la seconde guère mondiale qui laisse quand-même la porte ouverte à bien des interprétations

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il m'est plus facile de te le dire, maintenant que tu es mort : tu as toujours été pour moi un personnage intrigant. Toute ta vie, tu as tenté d'être quelqu'un, tu t'es inventé de multiples personnalités, une aura et une légende aussi fictives que l'était l'histoire de notre nom de famille. Tu es mort seul sur ton vieux canapé élimé, et tu ne m'as laissé qu'un mystère, ce champ de ruines qu'a été ta vie.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Un nom sans passé ni mémoire, un nom fantôme, en quelque sorte, c'était inhabituel. Mais peut-être avait-il tout de même une histoire ? »

Quelques jours après la sortie de son premier livre, Vanessa Springora apprend la disparition brutale de son père. En vidant son appartement, elle y découvre deux photos de son grand-père paternel qui la plongent dans la sidération. C'est le début d'une traque obsessionnelle pour comprendre qui était réellement cet homme pris dans la tragédie des deux totalitarismes du XXe siècle.

Questionnant le roman de ses origines et la mythologie des figures masculines de son enfance, l'autrice nous entraîne dans une enquête kaléidoscopique où se réfléchissent tour à tour légendes familiales, récit intime et sources documentaires, fiction et témoignages, petite et grande Histoire.

À travers l'aventure de son patronyme se révèlent l'héritage d'un passé enfoui et les effets dévastateurs du non-dit.

Paul

Ce roman biographique semble dès le début, dirigé vers sa fin : la folie, la maladie et la mort. Et les nombreux retours dans la vie de Paul Gauguin ne témoignent que de l’inéluctabilité de sa piteuse extrémité.

Paul de Zoé Valdés
Une vie consacrée à la peinture rongée par l’alcool, les problèmes d’argent, la maladie et la douleur.

La biographie de Gauguin est foisonnante, ses rencontres avec Pissaro ou van Gogh, ses voyages et sa mort aux marquises, sa femme et les très jeunes marquisiennes… Zoé Valdés en tire un sombre portrait, aux couleurs des hallucinations d’un alcoolique délirant au seuil de la mort

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Son auriculaire fut pris de tressautements, sa main se mit à trembloter toute seule, à un rythme effréné ; ses doigts n'avaient plus désormais l'assurance et la précision d'autrefois. Il gagna péniblement le centre de la pièce.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Il n'allait plus guère tarder à claquer comme un chien. Tout seul. La petite Chinoise n'était pas revenue lui apporter la soupe cuisinée par son père. Ou peut-être ne l'avait-il pas vue, en proie à ses accès de douleur et de delirium tremens. Il connut la faim, certes, mais sa peinture s'éclaircissait, elle respirait mieux. Une peinture qui respire est la plus grande réussite d'un peintre, car elle porte la vie ; il lui insuffle sa vie, sa respiration, les battements de son cœur, ses palpitations heureuses et ses craintes les plus profondes. »

Accablé par la maladie, sur une île paradisiaque de la Polynésie française, Paul Gauguin affronte les fantômes de son passé. Fiévreux et délirant, il se souvient de sa vie bourgeoise de financier avant que la peinture, devenue pour lui une passion, le pousse à tout quitter. Ce roman crépusculaire met en scène l'artiste en proie à ses ultimes visions et à ses derniers désirs.

Zoé Valdés livre ici « son » Paul, rhapsodie intime où les voix du passé se mêlent, comme des litanies. L'écrivaine fait la part belle aux corps, aux sens, à l'intime, et poursuit sa réflexion autour de l'amour, la mort, l'exil, la création et bien sûr la transgression, autant de thèmes qui nourrissent son œuvre.

Tous les silences ne font pas le même bruit

Choquant, bouleversant, intime… c’est une foule d’adjectifs qui me viennent après cette intense lecture.

Un livre à prendre dans son entier. A lire tout en empêchant son cerveau de lever la main et de crier oui mais moi…

Tous les silences ne font pas le même bruit de Baptiste Beaulieu
Le témoignage magnifique de la vie d’un homosexuel (homme blanc et d’un milieu aisé), de son enfance à aujourd’hui avec toutes les frustrations, salissures et humiliations… mais aussi les belles rencontres, la famille, l’amour et les amitiés.A l’heure de la montée des masculinistes (y en a-t-il plus ? Je ne sais pas, mais en tout cas, ils se permettent de faire de plus en plus de bruit) et des fascismes décomplexés, il est important de comprendre leur toxicité, leur violence, leur haine ! Que ce soit pour les femmes, les homos ou toutes les minorités…

Une nocivité qui, finalement, touche toute la société si on l’observe sous l’angle de l’intersectionnalité

Le concept d’intersectionnalité dans le cadre de la réussite universitaire au Canada

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Tu es enfant, c'est dimanche soir, tu es installé sur le divan en osier, dans les bras de ta mère, merveilleux bras qui n'ont jamais trahi, jamais manqué à leurs devoirs. Tu portes un pyjama bleu en pilou-pilou, tu as glissé tes pieds nus sous les cuisses de ton père pour les tenir au chaud.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tu es un garçon de 8 ans. Un dimanche soir, en famille, tu regardes un film qui se moque d'un couple d'hommes. Qu'y a-t-il de si drôle ?

Tu deviens un adolescent que l'on insulte : « Sale pédé ! » Tu contemples l'eau noire du canal du Midi, prêt à abandonner. Sur tes épaules, un sac à dos rempli de pierres et ton secret.

Te voilà jeune homme, tenant la main de ton amoureux au risque d'être tabassé, puis père à ton tour. Un médecin révolté, un écrivain qui ne peut plus se taire.

C'est l'histoire d'un homosexuel, aujourd'hui, en France. Son récit nous fait entrer dans sa peau et adopter son regard. Il raconte les préjugés, le harcèlement, la mise à l'écart et les silences qu'il doit affronter. Il y a l'homophobie qui nous révolte et celle que l'on ne soupçonne pas, logée en chacun de nous.

Un grand texte, bouleversant et universel.

L’effondrement

Est-ce que tout était écrit d’avance ? Le déterminisme social explique-t-il cet effondrement ?

L’effondrement de Édouard Louis
Édouard Louis nous parle de son frère, mort de son alcoolisme, de sa propre violence, ses colères et son besoin de reconnaissance… Mais aussi de son enfance, de ses relations familiales, professionnelles, amoureuses et amicales.

Le sombre gâchis d’une vie sous le regard d’un enquêteur la tête pleine de pourquoi ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je n'ai rien ressenti à l'annonce de la mort de mon frère; ni tristesse, ni désespoir, ni joie, ni plaisir. J'ai reçu la nouvelle comme on recevrait des informations sur le temps qu'il fait dehors, ou comme on écouterait une personne quelconque nous dérouler le récit de son après-midi au supermarché. Je ne l'avais pas vu depuis presque dix ans.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Mon frère a passé une grande partie de sa vie à rêver. Dans son univers ouvrier et pauvre où la violence sociale se manifestait souvent par la manière dont elle limitait les désirs, lui imaginait qu'il deviendrait un artisan mondialement connu, qu'il voyagerait, qu'il ferait fortune, qu'il réparerait des cathédrales, que son père, qui avait disparu, reviendrait et l'aimerait.

Ses rêves se sont heurtés à son monde et il n'a pu en réaliser aucun.

Il voulait fuir sa vie plus que tout mais personne ne lui avait appris à fuir et tout ce qu'il était, sa brutalité, son comportement avec les femmes et avec les autres, le condamnait ; il ne lui restait que les jeux de hasard et l'alcool pour oublier.

À trente-huit ans, après des années d'échecs et de dépression, il a été retrouvé mort sur le sol de son petit studio.

Ce livre est l'histoire d'un effondrement.
É. L.

Nos âmes oubliées

Quelle adaptation ! Quelle créativité graphique. Panaccione déchire tout et pourtant… Qu’en dire sur le fond alors que je n’ai pas lu le livre original et que les errements spirites et ésotériques (bien inutiles d’ailleurs) m’ont quelque peu agacés.

Nos âmes oubliées de Grégory Panaccione, d’après le livre de Stéphane Allix
Et pourtant, l’histoire est poignante et le sujet glaçant. Son traitement en images est fabuleux avec des planches tellement parlantes !Un magnifique album avec un gros bémol sur les parties divinatoires et pseudoscientifiques

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je suis parti du Lot après le déjeuner. Plusieurs heures de route. Je m'arrête dans hôtel sur le bord de l'autoroute.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Librement inspirée du roman éponyme autobiographique de Stéphane Allix, Grégory Panaccione nous plonge dans la vie d`un homme qui n`a aucun souvenir de son enfance. Quand se développe une maladie auto-immune, il se rend vite compte que la médecine classique ne peut rien pour lui et il se tourne vers les neurosciences, libérant peu à peu son esprit jusqu`à une découverte fatidique : un traumatisme profond lors de son enfance, entraînant une amnésie traumatique. La confrontation avec son agresseur et la remise en question de ses propres souvenirs l`amènent à un voyage intérieur poignant en quête de l`apaisement émotionnel, offrant une leçon sur la résilience et la reconstruction de soi après des traumatismes profonds.

La vie juste

Bienvenue dans la tête d’une jeune femme neurodivergente (enfin… c’est mon impression) un peu dépressive à la recherche du bonheur.

La vie juste de Laure Federiconi
Une sorte de journal de la recherche de soi et de ses motivation ou d’un sens quelconque. Des questionnements à l’écriture légère et fluide… pour qui arrive à suivre les pensées zigzagantes de leur autrice.Et c’est génial et brouillon, désarçonnant (oui, il faut s’attacher un peu et insister parfois), drôle et pathétique comme la vie peut l’être parfois lorsqu’on la regarde avec un peu de recul

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je suis nue et je mange du guacamole. Je suis précisément couchée dans un coin d'ombre, à fixer les ouvriers qui s'affairent dans le petit parc d'en face. Leur regard m'est égal. Mes voisins doivent se lasser de mes allers-retours nue vers la bouilloire pour reprendre du thé.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Une jeune libraire en proie à un alanguissement existentiel ­observe la vie autour d'elle avec nostalgie. Elle multiplie les activités pour aller mieux : les séances psy, l'achat compulsif de pommes de terre et la méditation. À travers ces tribulations, elle se remémore par fragments son enfance en Italie, son rapport à l'autre et à la foi. Convaincue qu'elle allait mieux il y a six ans en ­arrière, elle décide de trouver la faille, le moment où tout a basculé. Le flux de ses pensées se déroule alors comme une ­bobine de film marquée d'un état et d'une tendance : celle du ­bonheur à tout prix.