Camiothécaire-biblioneur aux lectures éclectiques. Romans, essais, biographies et autobiographies, récits de voyage, bandes dessinées, nouvelles, chroniques, témoignages… des critiques selon l'humeur
La forme est travaillée, recherchée, poétique à l’excès. Elle en enrobe le fond et l’histoire pour en devenir une figure de style ampoulée qui m’a lassé et laissé en surface.
Et même l’histoire (qui baigne dans un ésotérisme qui me laisse généralement froid, il est vrai), de guérisseurs et guérisseuses se transmettant leurs dons pour soigner celles et ceux pour qui les hommes ne peuvent rien, ne m’a pas vraiment touché
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Car c'est ainsi que les hommes naissent, vivent et disparaissent, en prenant avec les cieux de funestes engagements: leurs mains caressent et déchirent, rendent la peau si douce qu'on y plonge facilement des lances et des épées.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) À la tombée du jour, un jeune guérisseur se rend dans un village reculé. Sa mère lui a toujours dit : « Ne laisse jamais de traces de ton passage. » Il obéit toujours à sa mère. Sauf cette nuit-là.
Cécile Coulon explore dans ce roman des thèmes universels : la force poétique de la nature et la noirceur des hommes.
Avec La Langue des choses cachées, ses talents de romancière et de poétesse se mêlent dans une oeuvre littéraire exceptionnelle.
Je suis fait de leur absence avance masqué, mais aussi rapidement qu’insidieusement, il devient plus sombre. Et au fil des flash-back (un peu lassants, certes), la noirceur s’installe au cœur d’un amour naissant.
Un livre marquant sur les féminicides. Mais plus encore, sur ceux qui restent, les victimes collatérales, les enfants et la famille qui devront vivre avec. Avec la culpabilité et la douleur des survivants
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) J'adore cette maison. Elle raconte ma famille comme personne; d'où nous venons, nos enfances, nos miracles, nos aberrations. Roseville- sur-Mer. C'est là que tout s'est joué et que tout se joue encore.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Je me concentre sur la panoplie de cartes postales. Sophie écrit d'une colonie de vacances, à l'été 1975, d'un trait large et penché de petite fille. Je trouve un calepin. Dépassent une branche, des pétales séchés. Se suit, page après page, une succession d'herbiers. Ces fleurs font apparaître en moi la grive de mes rêves, l'oiseau de la culpabilité. Les feuilles sont datées à l'encre noire, sur chaque coin gauche, d'une écriture plus mûre. Sous le carnet, d'autres cartes. Un fjord s'étire, blanchi de flocons, sous une brume mortuaire. L'image est paisible, appelle à plonger le regard comme pour se déverser dans l'interdit. Je la retourne. Un haut-le-coeur. Je la parcours, tremblant. Les empreintes de Sophie sont là. Elle a dû la lire, la relire un nombre incalculable de fois ; d'abord transie d'amour, puis cherchant un soupçon d'espérance à mesure que tout sombrait. »
Dans un paysage balayé par le sel et le vent, le premier roman de Tim Dup explore avec nuances la question des violences intrafamiliales, tout en reconduisant le lecteur dans la maison universelle de son enfance.
Un pur western, avec des tueurs à gages, bien méchants (et peut-être pas tant que ça), du sang, des chevaux, des chercheurs d’or, de la folie et beaucoup, beaucoup d’humour !
Vraiment un très, très bon livre qui m’a bien fait rire et dont Jacques Audiard en a fait une adaptation pas trop dégueu
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Assis devant le manoir du Commodore, j'attendais que mon frère Charlie revienne avec des nouvelles de notre affaire.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Oregon, 1851. Eli et Charlie Sisters, redoutable tandem de tueurs professionnels aux tempéraments radicalement opposés mais d'égale (et sinistre) réputation, chevauchent vers Sacramento, Californie, dans le but de mettre fin, sur ordre du « Commodore », leur employeur, aux jours d'un chercheur d'or du nom de Hermann Kermit Warm. Tandis que Charlie galope sans états d'âme - mais non sans eau-de-vie - vers le crime, Eli ne cesse de s'interroger sur les inconvénients de la fraternité et sur la pertinence de la funeste activité à laquelle lui et Charlie s'adonnent au fil de rencontres aussi insolites que belliqueuses avec toutes sortes d'individus patibulaires et de visionnaires qui hantent l'Amérique de la Ruée vers l'or.
Dans ce roman jubilatoire où l'humour noir le dispute à une subtile excentricité, Patrick de Witt rend un hommage décalé aux classiques du western tout en invitant le lecteur à en explorer les ténèbres, sous l'inoubliable houlette de deux frères moins liés par le sang et la violence que par l'indéfectible amour qu'en silence ils se portent.
Quel impressionnant premier roman ! Construction, personnages, lieux, forme et fond… tout est maîtrisé, les éléments du récit se répondent les uns aux autres, sans fioritures dans un furieux roman.
Et dans cette furie, la force des femmes s’élève en rempart contre la barbarie des hommes, de Daesh, de la guerre en Syrie.
Un roman ou la tendresse trouve toutefois sa place, même parfois dans le cœur des hommes. Furies vengeresses, résilientes ou utopistes… toujours combattantes
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) "On vit dans un monde de coïncidences. Un homme et une balle qui se rencontrent, c'est une coïncidence."
Elle ne savait pas pourquoi, mais les mots d'Aragon tournaient en boucle dans sa tête et elle ne pouvait rien y faire. Cela faisait pourtant longtemps qu'elle n'avait pas relu Aurélien. Elle fixait les grappes d'air qui s'agglutinaient à la surface de son café bouillant. On aurait dit des œufs d'insecte en train d'éclore.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) En mission à la frontière turque, Bérénice, archéologue française dévoyée en receleuse d'antiquités, se heurte à l'expérience de la guerre. Dans la convulsion des événements, elle recueille la fille d'une réfugiée, et fait la rencontre d'Asim, pompier syrien devenu fossoyeur. Poussé par l'avènement de l'État islamique, ce dernier s'est exilé en Turquie, où il fabrique de faux passeports. Aux morts enterrés dans son pays, il tente de redonner vie par la résurrection de leurs noms. La grandeur de sa tâche est à la mesure de sa folie. Celle de maintenir une mémoire vive, au moment même de son effondrement. Cette cause, qui perdure au-delà du seul pari individuel, les mènera jusqu'au Rojava, sur la trace des guerrières peshmergas et de leur combat pour la liberté.
Entre ce que Bérénice déterre et ce qu'Asim ensevelit, il y a l'élan d'un peuple qui se lève et qui a cru dans sa révolution. Quand les événements s'emballent et qu'ils contractent les existences, seules les coïncidences peuvent retisser ce qui a été défait par la guerre.
Sondant notre histoire contemporaine à la recherche des Furies antiques, le roman de Julie Ruocco rend un hommage puissant aux femmes qui ont fait les révolutions arabes, et à leur quête de justice.
Partant d’un jeune résistant de la seconde guerre mondiale tué à 20 ans, Hervé Le Tellier met les petits plats dans les grands et nous parle de la résistance et de la collaboration ; du nazisme et des victimes ; de l’odieux et du vertueux ; de la petitesse et du suivisme face à au refus de céder.
Un livre qui m’a souvent rappelé Exterminez toutes ces brutes tant les même schémas se répètent, encore et encore.
Et que penser de l’après guerre, des fondateurs du FN (futur RN), de cette amnistie générale servant à former un roman national destiner à réunir le pays ?
Et s’il est désespérant d’y constater nos compétences moutonnières, voilà un livre indispensable à l’heure de la remontée des fascismes et des extrémismes populistes
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Je cherchais une « maison natale ». J'avais expliqué à l'agent immobilier : pas une villa de vacances, pas une ruine « à rénover », pas une « maison d'architecte », pas un « bien atypique », ces bergeries ou magnaneries transformées en habitations où l'on se cogne dans les chambranles de portes à hauteur de brebis.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Je ne suis pas l'ami d'André Chaix, et aurais-je d'ailleurs su l'être, moi que presque rien ne relie à lui ?
Juste un nom sur le mur.
Chaix était un résistant, un maquisard, un jeune homme à la vie brève comme il y en eut beaucoup.
Je ne savais rien de lui. J'ai posé des questions, j'ai recueilli des fragments d'une mémoire collective, j'ai un peu appris qui il était. Dans cette enquête, beaucoup m'a été donné par chance, presque par miracle, et j'ai vite su que j'aimerais raconter André Chaix. Sans doute, toutes les vies sont romanesques. Certaines plus que d'autres.
Quatre-vingts années ont passé depuis sa mort. Mais à regarder le monde tel qu'il va, je ne doute pas qu'il faille toujours parler de l'Occupation, de la collaboration et du fascisme, du rejet de l'autre jusqu'à sa destruction. Ce livre donne la parole aux idéaux pour lesquels il est mort et questionne notre nature profonde, ce désir d'appartenir à plus grand que nous, qui conduit au meilleur et au pire.
Ce monde véritable est sous titré « fable ». Une fable tendant à illustrer une leçon de vie… Et donc ? De quelle leçon Jim Fergus souhaite donc nous parler ? Il y a des méchants ? Le bonheur ne dure jamais, soyons vigilants ? Il faut faire confiance aux animaux ?
Un petit opus qui m’a semblé bien inutile et fort loin de la puissance des Mille femmes blanches.
Restent de très belles illustrations de Anne-Gaëlle Amiot qui agrémentent une bien faiblichonne fable
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Je m'appelle Molly McGill Hawk et je suis arrivée ici, en compagnie d'un certain nombre de mes concitoyennes, à l'automne de l'an de grâce 1877.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) 1877 : Victime de violences conjugales, Molly McGill, une jeune institutrice, est condamnée pour le meurtre de son mari. Emprisonnée à Sing Sing, elle a l'occasion de s'en sortir en acceptant de rejoindre un convoi de mille femmes blanches destinées à épouser des guerriers indiens. Bientôt, elle découvre les mœurs des Cheyennes, leur culture, leur communion avec la nature, et trouve une liberté inespérée en adoptant leur mode de vie. Mais quelques mois plus tard, en dépit de tous les traités, l'armée américaine décime sa tribu. Molly a désormais le choix entre rejoindre une prétendue « civilisation » dont elle ne connaît que trop les méfaits ou dépérir dans une réserve. Elle décide alors, en compagnie d'un petit groupe de femmes, de suivre une vieille Cheyenne aveugle vers le « Monde véritable », un paradis selon la mythologie amérindienne. Et elle se retrouve en effet dans un véritable Éden, une prairie luxuriante au pied des montagnes, en compagnie de Hawk, son époux indien, de leurs filles, et de leur chien, Falstaff. Mais bientôt, une voyageuse impromptue se présente pour prévenir la petite communauté d'une menace imminente...
Après Mille femmes blanches, c'est sous la forme d'une fable que Jim Fergus nous raconte ici la destinée de Molly, une héroïne hors du commun. Il nous offre à la fois un magnifique portrait de femme et un hommage bouleversant à une culture pleine de vie que la civilisation moderne s'est efforcée d'éradiquer. On peut aussi y lire une parabole d'une actualité brûlante sur les dangers qui guettent notre monde.
Le vent léger, c’est l’enfance heureuse, joyeuse et insouciante. La vie qui naît, ensemble, en famille avec une sœur et des frères. La musique des saisons et l’amour qui porte et transporte.
Et la maladie et la mort qui s’invitent.
Et c’est très beau, même si ça force un peu sur le mélo et le « c’était plus authentique avant »
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Un matin de l'été mille-neuf-cent-soixante-cinq, peu après le passage de la benne à ordures, la verroterie des dernières étoiles a cessé de scintiller, et la nuit noire du monde a majestueusement cédé sa place aux rayons poétiques et très anciens du soleil.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) À l’automne de l’année mille-neuf-cent-soixante-et-onze, une famille composée de six enfants délurés et de leurs parents vit une existence paisible à la campagne. La mère, bientôt malade, est l’objet de l’attention tendre et des soins empressés du père et de ces enfants aimants, à la fois graves et légers, introspectifs et expressifs. À leur récit de ce passage obligé par le malheur et le chagrin s’enchevêtrent divers événements ponctuant l’histoire récente du Québec et du monde. Comme si l’aventure humaine n’était en vérité ni petite ni grande, mais jalonnée de faits, de courants et de hasards, tragiques ou frivoles, formant à la fin un collier, ou une chaîne, celle de cette existence dérisoire et merveilleuse que nous traversons tous.
Terrasses, c’est la vie qui aime, joyeuse et impatiente et qui va rencontrer la mort, l’arbitraire, la violence indicible.
Comment comprendre ce que tout sépare ?
Au travers des voix qui seront au mauvais endroit, Laurent Gaudé célèbre la vie, l’entraide, l’amour et la résilience face à la barbarie
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) J'ouvre les yeux. Je me dis que cette journée est belle puisque nous allons nous voir ce soir. Je souris à l'idée de ce rendez-vous et sens, dès le matin, cette boule dans le ventre qui dit que je t'aime peut-être plus que je ne le pensais.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Vendredi 13 novembre 2015, il fait exceptionnellement doux à Paris - on rêve alors à cette soirée qui pourrait avoir des airs de fête. Deux amoureuses savourent l'impatience de se retrouver ; des jumelles s'apprêtent à célébrer leur anniversaire ; une mère s'autorise à sortir sans sa fille ni son mari pour quelques heures de musique. Partout on va bavarder, rire, boire, danser, laisser le temps au temps. Rien n'annonce encore l'horreur imminente.
Laurent Gaudé signe, avec Terrasses, un chant polyphonique qui réinvente les gestes, restitue les regards échangés, les quelques mots partagés, essentiels - écrit l'humanité qui éclot au cœur d'une nuit déchirée par l'impensable. Et offre à tous un refuge, face à un impossible oubli.
Mariée de force, battue et violée par son mari, Fatemeh va être pendue dans quelques jours. Elle en profite pour écrire son histoire, la suite des événements qui ont précédé la sentence.
Aujourd’hui, des femmes sont lapidées pour être tombées amoureuses et avoir eu des relations en dehors du mariage. Aujourd’hui, des femmes sont violées et battues en toutes impunité.
Chahdortt Djavann raconte à travers la voix de Fatemeh, une vie de femme en Iran. Et c’est glaçant !
Une autrice indispensable, une plume qui découpe les faux-semblants mieux qu’un scalpel
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) J'ai quinze ans, je m'appelle Fatemeh, mais je n'aime pas mon prénom. Dans notre quartier, tout le monde avait un surnom, le mien était la nièce de la muette. La muette était ma tante paternelle. Je vais être pendue bientôt : ma mère m'avait nommée Fatemeh parce que j'étais née le jour de la naissance de Mahomet, et comme j'étais une fille, elle m'avait donné le prénom de la fille du Prophète. Elle ne pensait pas qu'un jour je serais pendue ; moi non plus.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « J'ai quinze ans, je m'appelle Fatemeh mais je n'aime pas mon prénom. Je vais être pendue bientôt... »
L'amour fusionnel d'une adolescente pour sa tante muette, l'amour passionné de celle-ci pour un homme tournent au carnage dans l'Iran des mollahs. Chahdortt Djavann fait un récit incisif et dénué de tout artifice. Une histoire qu'on n'oublie pas.
Que signifie le voile, socialement, culturellement, religieusement ?
Chahdortt Djavann a une vision très claire sur la question. Née en Iran et ayant vécu l’arrivée de l’ayatollah Khomeini elle l’a porté de 13 à 22 ans.
Elle dénonce dans ce court, mais très pertinent essai, l’aveuglement d’une société démocratique et laïque – la France – qui permet que des jeunes filles mineures se retrouvent obligées de porter le voile.
Et tout d’abord, pourquoi voile-t-on les filles ? Pourquoi que les filles ? Que veut-on montrer en cachant leurs cheveux, leur corps ?
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) J'ai porté dix ans le voile. C'était le voile ou la mort. Je sais de quoi je parle.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) «Mais qu'est-ce que c'est que porter le voile, habiter un corps voilé ? Que signifie être condamnée à l'enfermement dans un corps voilé puisque féminin ? Pourquoi voile-t-on les filles, seulement les filles ? Pourquoi cache-t-on leur corps, leur chevelure ? Qui a le droit d'en parler ?
J'ai porté dix ans le voile. C'était le voile ou la mort. Je sais de quoi je parle.»