Maigret à l’école

Après plusieurs Maigret, des schémas et pattern récurrents transparaissent et permettent de mieux évaluer et jauger les différents volumes. Et cette histoire m’a semblé assez emblématique, même si elle ne se passe pas à Paris, mais en Bretagne où le commissaire se rend, motivé par une grosse envie d’huître et de vin blanc.

Ils passèrent devant une mercerie derrière les vitres de laquelle le commissaire aperçut une femme si vieille et si décharnée qu'on se demandait comment elle ne se brisait pas.
 - Qui est-ce?
 - Elles sont deux, à peu près du même âge, les demoiselles Thévenard.
Deux vieilles filles tenaient une boutique dans son village natal aussi. C'était à croire que les habitants des villages de France sont interchangeables. Des années avaient passé. Les routes s'étaient garnies d'autos rapides. Des autobus et des camionnettes avaient remplacé les carrioles. On voyait des cinémas un peu partout. On avait inventé la radio et bien d'autres choses. Et pourtant Maigret retrouvait ici les personnages de son enfance, figés dans leurs attitudes comme sur une image d'Epinal.
Maigret à l’école de Georges Simenon

Un commissaire empathique, bonhomme, qui passe son temps à boire des verres, causer le bout de gras et se promener jusqu’à ce qu’un plan se dessine de lui-même et que l’évidence apparaisse

Maigret 72/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
L'instituteur au purgatoire
Il y a des images qu'on enregistre inconsciemment, avec la minutie d'un appareil photographique, et il arrive que, plus tard, quand on les retrouve dans sa mémoire, on se creuse la tête pour savoir où on les a vues.
Maigret ne se rendait plus compte, après tant d'années, qu'en arrivant, toujours un peu essoufflé, au sommet de l'escalier dur et poussiéreux de la P. J. il marquait un léger temps d'arrêt et que, machinalement, son regard allait vers la cage vitrée qui servait de salle d'attente et que certains appelaient l'aquarium, d'autres le Purgatoire. Peut-être en faisaient-ils tous autant et était-ce devenu une sorte de tic professionnel ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'était un village de bouchots et de parcs à huîtres près de la Rochelle. Un village comme tant d'autres. Il y avait un adjoint qui buvait, des joueurs de cartes, un facteur qui se croyait un personnage important, un aubergiste qui connaissait les secrets de chacun et la vieille Léonie qui haïssait le monde entier. On n'y aimait pas beaucoup les étrangers.

Maigret tente d'innocenter Joseph Gastin, un instituteur de Saint-André-sur-Mer, en Charente-Maritime, accusé du meurtre de Léonie Birard, la bête noire du village.

Ressac

Suite à un accident de la route de son beau-père qu’elle ne reconnaissait plus depuis quelques temps, enfermé dans des troubles bipolaires, Diglee s’évade dans une abbaye en Bretagne.

Aujourd'hui je pars pour moi. Vers moi. Je ne pars pas explorer une ville, visiter des musées, arpenter des ruelles classées et rendre compte de mon périple sur les réseaux : je pars pour entrer en moi-même. J'embarque pour le dedans, prise entre terreur et impatience.
Ressac de Diglee

Cinq jours de retraite et de rencontres, un autre rythme loin des réseaux sociaux.

Le gérant du café pose un plat sur la table centrale, celle au bouquet. C'est un far breton. Il ne manquait que cela à mon bonheur. Criminelle en fuite de sa propre vie, j'en demande  fébrilement une part, et elle a le goût de paradis.

Le récit touchant d’une pause introspective entre femmes et sœurs, à la recherche de signes, d’une épiphanie, de réponses, de partages ou juste d’un moment, une parenthèse pour lever le pied

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Sur un coup de tête, Maureen Wingrove décide de s'éloigner du monde et des réseaux sociaux pour tenter de se retrouver. Direction la Bretagne, pour une semaine de retraite dans une abbaye battue par les embruns. Une semaine dense, intense. Une semaine assaillie par des vagues de souvenirs, par des émotions, par des portraits de femmes, par des rencontres insolites et inoubliables. Une semaine face à elle-même, en quête de sérénité. Ressac est le journal de cette parenthèse

L’auberge du bout du monde

Une histoire de malédiction assez classique aux splendides aquarelles, plutôt bien racontée, parfois un petit peu tarabiscotée.

L’auberge du bout du monde de Tiburce Oger et Patrick Prugne

Le bonheur de deux enfants joyeux sur les plages de Bretagne, et le malheur arrive.

Une bande dessinée avec des monstres, des maladies inexpliquées, une femme muette à la beauté renversante et aux pouvoirs de guérison (une sorcière ?), des villageois jaloux et apeurés, une usine maudite, une passion et un fier combattant, un château avec un maître aussi maléfique que mystérieux et… des mouettes et la mer

Le tout raconté par un vieux chauve mourant dans une ancienne auberge (oui, classique mais très beau)

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Bretagne, 1884.
Dans l'Auberge du bout du monde, lugubre bâtisse perchée au bord d'une falaise, un vieillard au seuil de la mort raconte une étrange histoire à un écrivain en mal d'inspiration. Celle de la mystérieuse Iréna, revenue d'entre les morts alors qu'on la croyait assassinée.
Amour fou, malédiction venue des Indes, merveilleux celtique : Patrick Prugne et Tiburce Oger nous embarquent dans une aventure haletante, le long des côtes bretonnes

D’oncle

Un oncle bien curieux et un livre tout autant. Un style d’écriture assez foufou ou les paragraphes (qui sont souvent aussi long qu’une page) ne sont souvent composés d’une phrase à rallonge entrecoupée de « et » et de virgules. L’histoire d’un oncle en Bretagne un peu simple, un peu original, franchement cracra dans une maison au bord de mer.

D’oncle de Rebecca Gisler

Une histoire touchante et amusante qui sent le vécu. Celle d’un oncle aussi attachant que repoussant

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
D'oncle raconte l'histoire d'un oncle. D'un homme-limite jamais grandi, coincé depuis cinquante ans quelque part en enfance et au bord de la mer, au bout du monde.
À la faveur de circonstances exceptionnelles, la narratrice est amenée à observer de près cet homme à l'hygiène douteuse, aux manies bizarres, à la santé défaillante, aux proportions anormales, définitivement trop petit, trop gros et trop boiteux pour ce monde.
En filigrane, c'est le portrait d'une famille et d'une époque qui se dessine. Biscornues comme toutes les familles et toutes les époques. Ou disons un peu plus

Algues vertes : l’histoire interdite

Lobbying, déni, intimidation, menace, disparition de dossiers, euphémismes, paroles officielles, procès, accidents, morts… Le scandale puant des algues vertes décortiqué sous la forme d’une BD

Algues vertes : l’histoire interdite de Ines Leraud, Pierre Van Hove et Mathilda

Un dossier solide avec une trame historique, les événements clés, les responsables, les coupables, les facilitateurs, les embrouilleurs, les actionnaires, les consortiums, les politiques, les maires et préfets… Mais aussi les activistes et tous ceux qui ont lutté et payé parfois cher pour que ce scandale soit reconnu…

Mais de là à ce que cela cesse…

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis la fin des années 1980, au moins quarante animaux et trois hommes se sont aventurés sur une plage bretonne, ont foulé l'estran et y ont trouvé la mort.

L'identité du tueur en série est un secret de polichinelle. Son odeur d'oeuf pourri le trahit. L'hydrogène sulfuré (H2S) émanant des algues vertes arrive en tête de la liste des suspects. De nombreux citoyennes et citoyens ont lancé l'alerte à de multiples reprises, sans réussir à empêcher la répétition des accidents. Thierry Morfoisse est ainsi décédé en 2009, après avoir charrié une benne d'algues en décomposition de trop. C'est seulement en juin 2018, neuf ans après son décès, que sa mort a été reconnue en accident de travail.

Les algues maudites sont le symptôme d'un mal profond qui prend ses racines dans les lois de modernisation agricole des années soixante, leur fumet méphitique s'immisce dans une nébuleuse d'intérêts et de lâchetés mêlant gros bonnets de l'agro-industrie, scientifiques à la déontologie suspecte, politiques craignant pour l'emploi ou leur réputation touristique.

C'est ce que révèle l'enquête choc de la journaliste Inès Léraud et du dessinateur Pierre Van Hove

Un océan d’amour

C’est tout simple, pas besoin de paroles, les images suffisent et c’est une petite merveille de poésie

Un océan d’amour de Wilfrid Lupano et Grégory Panaccione

L’histoire d’un marin sur son bateau à la dérive accompagné d’une mouette et une bigoudène qui part à sa recherche.

Un vrai délice de sardines à l’huile

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Chaque matin, Monsieur part pêcher au large des côtes bretonnes. Mais ce jour-là, c'est lui qui est pêché par un effrayant bateau-usine. Pendant ce temps, Madame attend. Sourde aux complaintes des bigoudènes, convaincue que son homme est en vie, elle part à sa recherche. C'est le début d'un périlleux chassé-croisé, sur un océan dans tous ses états. Une histoire muette avec moult mouettes

Madeleine

C’est triste comme le mauvais temps, la solitude et l’isolement. Il y a du sexe, mais sans paroles, il y aurait bien des cris, mais ils ne sortent pas, il y a des pleurs, mais on ne voit que les larmes.

Madeleine de Amanda Sthers
Madeleine de Amanda Sthers

Ça fout un peu le blues quand-même.

Un livre déconseillé aux dépressifs, avec quelques clichés et effets de styles dispensables, mais à l’atmosphère bien rendue.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«Il l'a vouvoyée. Il n'a parlé de rien. Ni de maisons, ni de ce lit, ni de cette fois. Est-ce un rendez-vous ? Une deuxième visite ? Il a donné l'heure d'arrivée de son avion. Le même, même jour. Déjà deux mois plus tard. Le souvenir est bien là, brûlant sur les cuisses de Madeleine. Est-ce qu'il faut aller chez le coiffeur ? Du noir, ça mincit mais la peur aussi, le lointain. Du marine ? Du marron ? Du temps, pas beaucoup ? Que dit-elle ? Elle dit oui, je vous attendrai. Le silence est long. "Vous me reconnaîtrez ?" essaie-t-elle. Il ne répond même pas. Elle ne sait pas comment on attrape un homme, ils lui glissent entre les doigts comme du vif-argent, et celui-là est bien plus qu'un homme. Il est celui qu'elle aime, celui qu'elle attendait.»

La tête sous l’eau

Une ado disparait, enlevée, séquestrée, abusée. Une famille détruite.

La tête sous l'eau de Olivier Adam
La tête sous l’eau de Olivier Adam

Un roman simple et efficace, rude et percutant comme un épisode d’esprits criminels.

Plutôt pour un public jeune… mais pas que ! Ça se lit vite et c’est bien foutu.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Quand mon père est ressorti du commissariat, il avait l'air perdu. Il m'a pris dans ses bras et s'est mis à pleurer. Un court instant j'ai pensé : ça y est, on y est. Léa est morte.

Puis il s'est écarté et j'ai vu un putain de sourire se former sur son visage. Les mots avaient du mal à sortir. Il a fini par balbutier : « On l'a retrouvée. Merde alors. On l'a retrouvée. C'en est fini de ce cauchemar. »

Il se trompait. Ma soeur serait bientôt de retour mais nous n'en avions pas terminé

Le crieur de nuit

Un petit roman (une autofiction?) sur la violence, celle du père, tyran familial. Une violence psychologique qui laisse des séquelles.
Un récit en sept jours, du décès à l’enterrement du père où les enfants se retrouvent avec leur mère et font face aux souvenirs, aux émotions et aux tracas pratiques.

Le crieur de nuit de Nelly Alard
Le crieur de nuit de Nelly Alard
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« J'ai appris la nouvelle ce matin, en écoutant le répondeur. Isa disait : Papa est décédé. Je me suis fait couler un café et je l'ai rappelée, puis j'ai composé le numéro d'Air France. Thierry est entré en bâillant, m'a regardée et a dit : Qu'est-ce qui se passe ? J'ai répondu : Papa est mort. Isa dit : décédé. Moi je dis : mort. Je ne vois pas pourquoi je prendrais des gants. Depuis le temps que l'idée de la mort m'accompagne, je ne dirais pas qu'elle m'est devenue familière, non, mais j'ai quand même le droit de l'appeler par son nom.

Tu es mort. Enfin. »