La végétarienne

Séparé en trois parties, la végétarienne ressemble à un conte malaisant duquel personne ne pourrait ressortir indemne.

La première partie raconte une famille coréenne qui bascule autour de Yonghye qui devient végétarienne. Inconcevable !

Le dîner que ma femme m'avait préparé était composé de feuilles de batavia, accompagnées de pâte de soja, d'une soupe aux algues sans viande ni coquillages, et de kimch'i. C'était tout.
 - Qu'est-ce que c'est cette histoire ? Tu veux dire que tu as balancé toute notre viande à cause d'un fichu rêve ? Tu te rends compte de ce que ça représentait comme argent ?
Je me suis levé pour aller ouvrir la porte du congélateur. À part de la poudre de céréales grillées, des piments moulus, de jeunes piments surgelés et un sachet d'ail haché, il n'y avait plus rien.
La végétarienne de Kang Han
La deuxième s’attache plutôt aux fantasmes artistiques du beau-frère sur le corps de Yonghye, et les événements s’enchaînent dans la dernière partie qui la voit sombrer du véganisme à une délirante anorexie devant l’impuissance de sa sœur.

Il reste à la fin de cette troublante lecture, un malaise, une sorte d’impuissance devant le déroulement des événements, la sensation que tout a été pris à l’envers et que personne n’a vraiment compris comment aider Yonghye

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Avant qu'elle ne commençât son régime végétarien, je n'avais jamais considéré ma femme comme quelqu'un de particulier. Pour être franc, je n'avais pas été attiré par elle quand je l'avais vue pour la première fois. Ni grande ni petite, des cheveux ni longs ni courts, une peau jaunâtre qui desquamait, des paupières lourdes, des pommettes un peu saillantes et une tenue aux couleurs ternes qui semblait dénoter un souci de fuir toute marque d'originalité. Chaussée de souliers noirs du modèle le plus simple, elle s'était approchée de la table où je l'attendais, d'un pas qui n'était ni rapide ni lent, ni énergique ni indolent.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Une nuit, Yonghye se réveille et va au réfrigérateur, qu'elle vide de toute la viande qu'il contient. Guidée par son rêve, elle a désormais un but : devenir végétale, se perdre dans l'existence calme et inaccessible des arbres et des plantes.

Ce dépouillement qui devient le sens de sa vie, le pouvoir érotique, floral de sa nudité vont faire voler en éclats les règles de la société, dans une lente descente vers la folie et l'absolu.

Made in Korea

S’agit-il d’un prospectus de l’office du tourisme de Séoul ou manuel pour apprendre à gérer son diabète sans stress ?

Il sourit stupidement à son adversaire qui en profita pour lui balancer son pied droit dans la figure. Il lui sourit encore plus stupidement. Depuis l'arrivée de son petit frère, il n'avait pas vécu un si beau jour !
Made in Korea de Laure Mi Hyun Croset

Agréable et facile à lire, souvent drôle, ce petit livre reste en surface de toute problématique. Reste un joli voyage à Séoul pour y découvrir quelques curiosités et, pourquoi pas, stimuler les volontés touristiques…

Mais cette fin, misère ? Vite, entamons notre Glucose révolution avec Jessie Inchauspé ? Non ! Là, c’est trop

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Le diagnostic était tombé. Il allait devoir modifier drastiquement ses habitudes, lui qui ne s'était jamais amusé à les définir avec précision.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un jeune Français, enfant adopté, solitaire et apathique, passe son temps devant un écran d’ordinateur. Adepte de jeux vidéo et de junk food, il se soucie peu de sa santé, jusqu’au jour où il apprend qu’il a du diabète et qu’il doit modifier fondamentalement son hygiène de vie. Il décide alors de partir en Corée pour y pratiquer le taekwon- do, bénéficier de la saine gastronomie de la péninsule et, par la même occasion, découvrir sa culture d’origine.

Loin d’être une énième variante sur la quête identitaire d’un individu déraciné́, ce roman réjouissant, à la fois mélancolique et tendre mais non dénué́ d’ironie, relate l’histoire d’une renaissance, sans faits glorieux ni émotions de pacotille.

Éclipses japonaises

Les faits sont passionnants, la construction est plutôt réussie et l’histoire vraiment intéressante. Enlever des japonais pour former des espions en Corée du Nord.

Éclipses japonaises de Éric Faye
Éclipses japonaises de Éric Faye

Mais crotte, qu’est ce que je me suis ennuyé avec ce livre, quel manque de ressort, zut.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
En 1966, un Gl américain s'évapore lors d'une patrouille dans la zone démilitarisée, entre les deux Corées.

À la fin des années 1970, sur les côtes japonaises, des hommes et des femmes, de tous âges et de tous milieux, se volatilisent. Parmi eux, une collégienne qui rentrait de son cours de badminton, un archéologue qui s'apprêtait à poster sa thèse, une future infirmière qui voulait s'acheter une glace. « Cachés par les dieux », ainsi qualifie-t-on en japonais ces disparus qui ne laissent aucune trace, pas un indice, et qui mettent en échec les enquêteurs.

En 1987, le vol 858 de la Korean Air explose en plein vol. Une des terroristes, descendue de l'avion lors d'une escale, est arrêtée. Elle s'exprime dans un japonais parfait. Pourtant, la police finit par identifier une espionne venue tout droit de Corée du Nord.

Longtemps plus tard, le lien entre ces affaires remontera à la surface, les résolvant du même coup. Par la grâce de la fiction, Éric Faye saisit l'imaginaire et la vie secrète de ces destins dévorés par un pays impénétrable et un régime ultra autoritaire

Hiver à Sokcho

Fin et délicat, comme les murs de papier d’une pension déserte au milieu de l’hiver en Corée du Sud. La rencontre entre Kerrand, auteur de bande dessinée en mal d’inspiration et la jeune employée de l’hôtel.

Hiver à Sokcho de Elisa Shua Dusapin
Hiver à Sokcho de Elisa Shua Dusapin

Comme des non-dits en points de suspension, gracieux et aériens.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
À Sokcho, petite ville portuaire proche de la Corée du Nord, une jeune Franco-coréenne qui n'est jamais allée en Europe rencontre un auteur de bande dessinée venu chercher l'inspiration loin de sa Normandie natale. C'est l'hiver, le froid ralentit tout, les poissons peuvent être venimeux, les corps douloureux, les malentendus suspendus, et l'encre coule sur le papier, implacable : un lien fragile se noue entre ces deux êtres aux cultures si différentes. Ce roman délicat comme la neige sur l'écume transporte le lecteur dans un univers d'une richesse et d'une originalité rares, à l'atmosphère puissante.

« En collant ma joue contre l'embrasure, j'ai vu sa main courir sur une feuille. Il l'avait posée sur un carton, sur ses genoux. Entre ses doigts, le crayon cherchait son chemin, avançait, reculait, hésitait, reprenait son investigation. La mine n'avait pas encore touché le papier. Lorsque Kerrand a commencé à dessiner, son trait était irrégulier. Il reprenait les lignes plusieurs fois, comme pour les effacer, les corriger, mais chaque pression les gravait. Le sujet, méconnaissable. Un branchage, un tas de ferraille peut-être. J'ai fini par reconnaître l'amorce d'un oeil. Un oeil noir sous une chevelure brouillonne. Le crayon a poursuivi sa route jusqu'à ce qu'apparaisse une figure féminine. Des yeux un peu trop grands, une bouche minuscule. Elle était belle, il aurait dû s'arrêter là. Mais il a continué à passer sur les traits, tordant peu à peu les lèvres, déformant le menton, perforant le regard, a remplacé le crayon par une plume et de l'encre pour en badigeonner le papier avec une lente détermination, jusqu'à ce que la femme ne soit plus qu'une pâte noire, difforme. Il l'a posée sur le bureau. L'encre dégoulinait jusqu'au plancher. Une araignée s'est mise à courir sur sa jambe, il ne l'a pas chassée. »