Petit éloge de l’embrassement

Depuis de nombreuses années, Belinda Cannone danse le tango.

On me pardonnera d'avoir régulièrement fait ce grand écart en évoquant, en face de l'une des plus joyeuses manières d'être en relation, le tango, la plus cruelle, celle que suscite l'homme exilé et errant qui se présente sous nos yeux. Même si nous estimons qu'une personne a eu tort en prenant le risque d'escalader une falaise, sommes-nous libérés du devoir de l'aider, quand elle tombe devant nous ? J'embrasse qui j'aime, mais ne dois-je pas aussi prendre dans mes bras celui qui se tient, démuni et affaibli, devant moi ?
Petit éloge de l’embrassement de Belinda Cannone

Elle voit dans le tango l’accueil de l’autre, l’hospitalité, la sensualité et la séduction. Mais aussi un art d’improvisation extrêmement codifié qui mérite travail, répétition, travail, répétition, travail, répétition, travail…

Un éloge comme un essai, surprenant, et qui ravira certainement les danseuses et danseurs

Bref, pas vraiment un livre pour moi… par contre, son petit éloge du désir est un vrai bonheur !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Toi, Tu, Autre, mes autres. Prééminence d'autrui dans mon existence.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Lorsque dans la milonga (ainsi nomme-t-on le bal de tango) les danseurs se rejoignent sur le parquet, leurs bras se lèvent doucement et ils s'enlacent - ils se prennent dans les bras, ils s'embrassent, étymologiquement. D'où le terme argentin, adopté par les Français : l'abrazo. La main gauche de la femme se place sur le haut du bras de l'homme ou sur son omoplate, ou bien encore passe par-dessus son épaule, tandis que celui-ci, glissant sa main droite par en dessous, la pose sur le dos de sa partenaire. De l'autre côté, leurs mains se tiennent en l'air, paume contre paume. Dès qu'on entre dans l'abrazo, on devine, à son corps, sa tenue, sa prise, on devine quelque chose de son partenaire. »

Il était une fois dans l’Est

Cette bd-bio – aux nombreux flash-back sur la jeunesse d’Isadora Duncan – raconte la relation mouvementée entre le poète russe Sergueï Essenine et la danseuse.

Il était une fois dans l’Est de Julie Birmant, dessin de Clément Oubrerie

Au faît de sa gloire, Isadora décide de partir à Moscou soutenir la révolution et danser pour les masses travailleuses. Elle y rencontre Sergueï, de 18 ans son cadet pour une relation mouvementée, comme sa vie d’ailleurs !

Isadora Ducan

Un dessin très dansant pour une bio qui m’a semblé peu claire dans ses intentions.

Et finalement, est-ce réellement un tome 1 sans suite ou faut-il voir Isadora comme le tome 2 d’une série tarabiscotée ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Voyou aimant à se fracasser les poings dans les fenêtres, poète adulé telle une rock star, Serge Essenine est un cow-boy de Moscou.

Avec son ami Mariengof, à la chevelure lustrée comme un piano de concert. Ils sont les chefs de la bande des imaginistes et... inséparables.

Mais un beau jour de 1921 surgit du fin fond de l'Ouest une danseuse plus si jeune, une Américaine aussi célèbre que Lénine, Isadora Duncan...

Ordures Entrée Nord – Sortie Sud

C’est une loi qui semble universelle, les plus gros bouffent les plus petits… et ainsi de suite

Ordures, tome 1 : Entrée Nord de Stéphane Piatzszek, illustrations de Olivier Cinna

Dans les banlieues, 9-3, périfs et autres portes de Paris interlopes, tout le monde se sert. De la petite criminalité à la police, c’est la loi du plus fort et la justice… il faut la faire soi-même.

Ou crève !

Ordures, tome 2 : Sortie Sud de Stéphane Piatzszek, illustrations de Olivier Cinna

Deux albums au traitement scénaristique un peu hésitant, mais avec un traitement graphique de Cinna remarquable (entre Eisner et Vivès), aux noirs et blancs aussi violents que le monde qu’elle décrit.

La loyauté y est-elle possible ? Et l’amour ? Une vie en désespérance

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Entrée Nord
N3
Bobigny
Meaux
Pantin - centre

Sortie Sud
Carrefour
Salut, Cheyenne.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
1. A Paris, Moudy, Alex et Samir tentent de survivre tant bien que mal. Les deux premiers travaillent dans un centre de tri des ordures ménagères, tandis que le troisième vend des cigarettes de contrebande sous le métro aérien

2. Comme des funambules, Moudy, Alex et Samir marchent sur le bord de la vie. Moudy tue un vigile lors d'une manifestation, sa vie bascule. Celle de Samir est plus agréable. Avec la belle Cheyenne, ils s'en vont en direction du soleil

Louise : le venin du scorpion

Louise Brooks, actrice du cinéma muet au jeu tout en retenue et naturel à une époque ou la surenchère était de mise.

Louise : le venin du scorpion de Chantal Van den Heuvel et Joël Alessandra

Une femme libre (à l’époque les mots étaient bien différents) qui paya fort cher le prix de son indépendance.

Un bande dessinée aux traits et couleurs très réussis, illustrant l’histoire de cette femme forte au caractère affirmé qui, par ses refus de se plier aux hommes de pouvoir, se fit blacklister de Hollywood

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Louise,
Tu étais la beauté, l'esprit, la grâce incarnés. Et ton jeu était sublime.
Pourtant, un seul film, LouLou, aura marqué ta carrière.
Hollywood, «l'inhumaine usine à films», t'a très vite blacklistée.
Parce que tu en refusais les règles ? Sans doute...
Mais aussi, tu disais de toi-même : «Je suis le poignard de ma propre plaie».
Pourquoi, Louise ?

Isadora

Julie Birmant propose ici une Isadora Duncan emportée par sa soif de vivre, un peu illuminée et capricieuse, obsédée par la gloire et rencontrant le grand monde à la recherche de notoriété.

Isadora de Julie Birmant et Clément Oubrerie

Malheureusement, peu de danse et d’envolée alors que le dessin de Clément Oubrerie est absolument parfait pour ces représentations.

Une artiste radicale qui tente d’imposer sa vision de la danse, peut-être un peu trop moderne pour l’époque

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Isadora Duncan a vingt ans et c'est une énigme.
Comment cette Américaine sans le sou, exaltée, aussi libre que naïve, parvient-elle au sommet de la gloire en 1903 ?

Scandaleuse sans le savoir, petite flamme que rien ne peut éteindre - sauf peut-être une écharpe trop longue - elle danse sa vie et ne ressemble à personne.

La musique la traverse, Chopin ou Wagner, elle bouge en s'inspirant des vagues, de la Grèce antique, de Rodin.

Que vient donc voir la foule qui se presse à ses spectacles ? Un phénomène, une artiste aux pieds nus ou une guerrière vaillante, livrant bataille contre l'Histoire et ses tragédies ?

Chavirer

Une histoire dans laquelle je suis entré à reculons, porté par les éloges et freiné par crainte de voyeurisme. Les éloges sont méritées et de voyeurisme, heureusement, pour une histoire aussi sordide, on en trouve pas ici.

Chavirer par de Lafon

L’histoire d’une fondation bidon recrutant de jeunes danseuses pré-pubères pour satisfaire les appétits de gros porcs infects.

Un livre sur les regrets, la volonté d’oublier, la résilience et la culpabilité tenace.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
1984. Cléo, treize ans, qui vit entre ses parents une existence modeste en banlieue parisienne, se voit un jour proposer d'obtenir une bourse, délivrée par une mystérieuse Fondation, pour réaliser son rêve : devenir danseuse de modern jazz. Mais c'est un piège, sexuel, monnayable, qui se referme sur elle et dans lequel elle va entraîner d'autres collégiennes.

2019. Un fichier de photos est retrouvé sur le net, la police lance un appel à témoins à celles qui ont été victimes de la Fondation.

Devenue danseuse, notamment sur les plateaux de Drucker dans les années 1990, Cléo comprend qu'un passé qui ne passe pas est revenu la chercher, et qu'il est temps d'affronter son double fardeau de victime et de coupable.

Chavirer suit les diverses étapes du destin de Cléo à travers le regard de ceux qui l'ont connue tandis que son personnage se diffracte et se recompose à l'envi, à l'image de nos identités mutantes et des mystères qui les gouvernent.

Revisitant les systèmes de prédation à l'aune de la fracture sociale et raciale, Lola Lafon propose ici une ardente méditation sur les impasses du pardon, tout en rendant hommage au monde de la variété populaire où le sourire est contractuel et les faux cils obligatoires, entre corps érotisé et corps souffrant, magie de la scène et coulisses des douleurs

Nu intérieur

Est-il possible d’aimer deux femmes ? La question ne semble pas se poser, mais comment faire ? Dire, cacher, mentir ? Est-ce satisfaisant et pour qui, pour combien de temps ?

Nu intérieur de Belinda Cannone

Belinda Cannone se met dans la peau de cet homme qui pense y parvenir et tente d’éviter la tempête qui s’annonce. Enfant gâté qui ne veut pas lâcher ses jouets mais qui n’a peut-être pas suffisamment de mains pour tout tenir

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«Elle était exactement faite pour mon désir. Je lui chuchotai Je voudrais vous faire l'amour. Elle rit légèrement, Maintenant ou tout de suite ?»

Un homme amoureux de deux femmes, et que cela ne dérange en rien, quoi de plus banal aujourd'hui ? Le temps n'est plus où le péché d'adultère inspirait aux coupables les pires tourments - et à la littérature ses oeuvres les plus incandescentes.

Ce livre nous montre pourtant qu'il n'en est rien, et qu'à l'époque de la libération sexuelle, de la psychanalyse et du féminisme, la passion, la jalousie et la mauvaise foi ont encore de beaux jours devant elles. Car c'est bien de passion qu'il est question dans ce roman d'analyse. L'obscénité y croise le grand style, les mots crus se conjuguent à l'acuité du verbe, et le désordre des sentiments n'affecte jamais la syntaxe. Comme si les personnages d'un roman de Benjamin Constant et ceux d'un récit érotique s'étaient donné rendez-vous, afin de faire plus ample connaissance.

Cette confession d'un enfant du siècle - le nôtre - est un des romans les plus brûlants qui se puissent lire en ce moment. Car qu'y a-t-il de plus sexy que l'intelligence ?

Amour dans une petite ville

Parfois, on passe à côté d’un livre, on arrive pas à y entrer. On voit bien qu’il y a quelque chose, mais la porte résiste.

Amour dans une petite ville de Anyi Wang

Un petit échec donc, que cette histoire de jeune danseuse et jeune danseur. Je ne comprenais pas ce que je lisais et après avoir insisté, repris, continué jusqu’au bout… Je n’en ai rien retenu.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Dans une petite ville de Chine, à l'époque de la Révolution culturelle, un garçon et une fille vivent une passion physique intense et bouleversante.

Tous deux danseurs dans la même compagnie, ils luttent avec violence contre l'irrésistible attirance qui les lie l'un à l'autre en défiant tous les interdits. Les corps qui dansent, qui se battent, qui s'aiment avec une fureur désespérée ou une joie radieuse, leurs odeurs, la sueur, la mélopée des porteurs d'eau près du fleuve où ils se rencontrent en secret, l'ardeur du soleil et le refuge de la nuit : dans une langue envoûtante, lancinante, d'une brûlante sensualité, ces pages racontent l'irruption du désir et des corps à une époque où ils étaient bannis.

Les deux adolescents combattent en vain cette flamme qui jaillit du plus profond de leur être et qui incarne la force même de la vie.

Ce roman, paru en 1986 en Chine, fit scandale par la franchise avec laquelle était abordée la sexualité. C'est un texte d'une grande violence, curieusement détaché aussi, sans autre morale que celle des corps, de la puissante palpitation du désir qui ne connaît ni mot d'ordre, ni loi, ni tabou

Polina

Avec des ombres, Bastien Vivès met de la lumière sur une carrière de danseuse, toute en subtilité.

Polina de Bastien Vivès
Polina de Bastien Vivès

Une histoire touchante, un dessin splendide

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Il faut être souple si vous voulez espérer un jour devenir danseuse. Si vous n'êtes pas souple à 6 ans, vous le serez encore moins à 16 ans. La souplesse et la grâce ne s'apprennent pas. C'est un don. Suivante... »