L’âne rouge

Comme un cerf pris dans les phares d’une voiture la nuit, Jean Cholet, fasciné par un nouveau monde hypnotique, incapable du moindre mouvement salvateur, va se laisser sombrer.

C'était arrivé quand même ! Tout ce qui devait arriver était arrivé ! Or, il savait qu'il n'était pas né pour traîner sa misère à Paris, ni pour être toute sa vie l'amant d'une Lulu.
N'est-ce pas un peu pour cela qu'il regardait les gens avec effronterie et qu'il se complaisait à défier le sort ? Et, quand il s'attendrissait dans les bras de Lulu, n'y avait-il pas un Cholet qui regardait Cholet pleurer ?
A l'instant même, il se voyait dans une grande glace, enfoncé dans l'angle de la banquette, un bras déployé sur le rebord. Il avait une barbe de trois jours. Son faux col était sale, une cravate mal nouée. Dans le même miroir, il apercevait le pianiste droit sur son tabouret et, en face de lui, un bourgeois rutilant qui venait pour la première fois avec sa femme dans un cabaret de Montmartre et qui observait tout avec avidité.
Cholet devait lui faire peur, avec ses yeux fiévreux, son visage ravagé, son air absent.
L’âne rouge de Georges Simenon
Dans ce récit d’une descente annoncée, l’âne rouge, une boîte de nuit aux accortes danseuses va entraîner un trop jeune journaliste à perdre tous ses repères, son argent et ses valeurs dans un tourbillon alcoolisé.

Et dans ce bon 2e roman dur, on trouve déjà nombre des excellentes caractéristiques des opus suivants avec cette inexorabilité des destins et cette fatalité qui guident les protagonistes

Le 2e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Un navire qui descendait la Loire lança deux coups de sirène pour annoncer qu'il évoluait sur tribord et le cargo qui montait répondit par deux coups lointains qu'il était d'accord. Au même moment le marchand de poisson passait dans la rue en criant et en poussant sa charrette qui sautait sur les pavés.
Avant d'ouvrir les yeux, Jean Cholet eut encore une. autre sensation : celle d'un vide ou d'un changement.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Jean Cholet, jeune journaliste à la Gazette de Nantes, vit chez ses parents, une famille de petits employés consciencieux et effacés. Un soir, alors qu'il assiste à son premier banquet officiel, il se laisse aller à boire outre mesure et provoque un scandale puis échoue dans un cabaret, L'Ane Rouge, dont l'ambiance l'attire désormais irrésistiblement...

Ils sont tous morts

Tout ça pue, c’est crade, aucun but ni aucun sens, de l’alcool, de la drogue, du sexe, du fric… Juste ici et maintenant. Une descente à la Trainspotting version Suisse-romande et départ pour la Thaïlande façon enfers.

Cynthia tend l'oreille quelques instants, puis, rassurée, elle devient très câline. Elle promène ses mains sur mes cuisses et me couvre de baisers. J'angoisse. Elle m'embrasse carrément, glisse ses doigts dans ma bouche, me pelote le paquet. Je saisis le whisky, en bois une bonne rasade pour me calmer un peu. Je suis terrorisé à l'idée que son mec surgisse, mais trop fier pour l'avouer, j'invoque l'amitié. La Vénus s'en fout, sa respiration s'accélère, son halètement est obscène. Tétanisé, je la laisse faire ce qu'elle veut de mon corps, impossible de la repousser, pas moyen de participer. Je bois, je bois vite et beaucoup. En moins d'une demi-heure, j'ai torché la bouteille.
Ils sont tous morts de Antoine Jaquier

Un livre pour des mains averties qui souhaitent se frotter au vide d’une bande de copains fumeurs de joints qui réussissent leur coup pour foirer leurs vies.

Je n'arrive pas à situer le moment où tout a basculé. En regardant la vue depuis notre terrasse, je constate, étonné, la présence des baigneurs. Ces derniers n'ont sans doute jamais quitté le paysage. Je sors d'un mois de rêve éveillé et le réveil est pénible, le cauchemar continue.

Un premier roman luisant comme une flaque de vomi et sordide comme une liasse de billets de banques.

Nous sommes sales et ce n'est pas par manque de moyens. Ici, des petites mains se proposent de laver nos vêtements pour un franc le kilo de linge sale. C'est juste notre crasse intérieure qui suinte à la surface. À cet instant d'ailleurs, nous suons comme des porcs.
Manu ayant déjà vomi dans le petit avion, il se contente maintenant de perdre connaissance devant des dizaines de passants.

Jack, des joints et ses potes… Ils sont tous morts

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Selon vous, qui de Dieu ou du diable est le plus puissant? demande Manu en passant le tuyau.
L'ambiance autour du narguilé est si intime, si oppressante, que l'on pourrait croire qu'en dépit du bon sens, la réponse de Stéphane va révolutionner deux mille ans d'inepties.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Campagne vaudoise, crépuscule des années 80. L'adolescence de Jack et ses potes se consume au rythme des bières et des mégots de joints. Des potes et des joints, il ne restera bientôt que des cendres. Ils sont tous morts, tués par les illusions de l'argent facile, par les mirages thaïlandais, par les différentes nuances de blanche et par la silhouette furtive d'une âme soeur. L'anesthésie se généralise, de la tête au coeur, et l'âme flotte, se dissipe, puis se rend

Encyclopédie de la connerie ambiante

C’est pourtant le genre de livre qui me fait rigoler, un moment de détente aux toilettes, des petits articles courts, des travers qui nous font sourire… Mais là, non, c’est loupé.

Encyclopédie de la connerie ambiante de Samir Bouadi et Sébastien Dourver

Un pot pourri (vraiment !) de blagues pas drôles de vieux réacs qui mettent tout dans le même panier… Et hop, tous des cons : l’écriture inclusive, les végans, le foot, le web, les macronistes, les populistes, les clients de l’homéopathie, de la sophro ou de la téléréalité.

C’est suffisant et condescendant. Ben oui, nous, on est bien au dessus de ça, on a tout compris et on ne nous la fait pas !

Bouarf !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« La connerie est un sujet sérieux, pour ne pas dire grave. Un sujet trop grave pour être confié aux gens sérieux, tout comme la guerre, qui, pour Clemenceau, était un sujet trop sérieux pour être confié à des militaires.
Il semblerait que l'époque soit particulièrement fertile en connerie. Et ce pour une simple raison : jamais, dans l'histoire de l'humanité, les êtres humains n'ont eu accès à autant de savoir objectif, jamais elle n'a atteint un tel degré de maîtrise technologique et scientifique et, dans le même temps, jamais l'être humain n'aura autant douté de la science et de ses promesses.
Dans ce livre, tout le monde va en prendre pour son grade, du plus puissant au plus modeste.
Chers amis, nous vous proposons une petite promenade dans les allées ombragées d'une époque gavée à la niaiserie. »

Un océan d’amour

C’est tout simple, pas besoin de paroles, les images suffisent et c’est une petite merveille de poésie

Un océan d’amour de Wilfrid Lupano et Grégory Panaccione

L’histoire d’un marin sur son bateau à la dérive accompagné d’une mouette et une bigoudène qui part à sa recherche.

Un vrai délice de sardines à l’huile

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Chaque matin, Monsieur part pêcher au large des côtes bretonnes. Mais ce jour-là, c'est lui qui est pêché par un effrayant bateau-usine. Pendant ce temps, Madame attend. Sourde aux complaintes des bigoudènes, convaincue que son homme est en vie, elle part à sa recherche. C'est le début d'un périlleux chassé-croisé, sur un océan dans tous ses états. Une histoire muette avec moult mouettes

Nick Cave : Mercy on me

J’ai pas tout compris, ce n’était pas forcément le but.

Nick Cave : Mercy on me de Reinhard Kleist
Nick Cave : Mercy on me de Reinhard Kleist

Une bio de Nick Cave bien barrée, pour se mettre la tête à l’envers, perdue entre le réel, les chansons, les fantasmes et les hallucinations.

Une BD magnifiquement soutenue par un dessin bien noir et agressif.

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
C'est un lundi que je partis, laissant tout derrière moi.
La nuit était froide et semblait interminable.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Reinhard Kleist, maître du roman graphique et créateur de mythes a, une fois de plus, repoussé les conventions de la bande dessinée en élaborant un terrifiant mélange de chansons, de demi-vérités biographiques et de totales affabulations. Il a ainsi tracé un voyage étrange et complexe à vous glacer le sang dans l'univers de Cave, plus proche de la réalité qu'aucune autre biographie, c'est évident ! Enfin, pour info : je n'ai jamais tué Elisa Day. »
Nick Cave

Notre-Dame des égarées

Un amour qui nait avec une enfant, et qui meurt avec elle. Ne reste rien que l’errance, la quête inutile. Un homme qui se perd.

Note-Dame des égarées de Alexandre Voisard
Note-Dame des égarées de Alexandre Voisard

Une écriture délicate et sensible, peut-être parfois un peu précieuse pour accompagner cette dérive aux notes d’un violon qui s’égarent.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Colmar, à l'aube du XXe siècle, Hélène native du Midi et Karel le violoniste venu de l'Est donnent naissance à une petite Stella. Après de courtes années de bonheur, l'enfant meurt soudainement. Puis Hélène disparaît sur les traces de sa fille, qu'elle imagine toujours vivante. Karel décide de rejoindre le Rhône, fleuve de coeur d'Hélène, dans l'espoir de l'y retrouver.

Voisard puise à la double source du conte et de la poésie pour mener ce roman du dépouillement. En compagnie du vagabond walsérien Karel, il nous entraîne à la rencontre des gens qui peuplent la route du Sud, l'abbé Viénot et son « eau de la vie », ou la famille Goldberg, au fils violoniste de génie.

« Voilà ce que tu deviens, Karel, tu sais ou ne sais pas, tu es ce bateau de carton mis à l'eau par bravade, jurant mais à quoi bon qu'il te porterait à la rencontre d'Hélène emportée sur les mêmes eaux dont les remous répliquent aux rameurs par de violents caprices. Tu vas droit devant toi, comme emporté par le courant mais en réalité tu es ballotté et les rives sans fin te rabattent de l'une à l'autre. N'êtes-vous pas, toi et Hélène, des naufragés que votre petite étoile au ciel a égarés ? »

Lettre à un paysan sur le vaste merdier qu’est devenue l’agriculture

Un bref – peut-être trop bref – historique des dérives et erreurs de la politique agricole des 100 dernières années. Tout y passe, agrochimie, productivisme, industrialisation, remembrement, déshumanisation, mécanisation… pour arriver au gros merdier actuel.

Lettre à un paysan sur le vaste merdier qu'est devenue l'agriculture de Fabrice Nicolino
Lettre à un paysan sur le vaste merdier qu’est devenue l’agriculture de Fabrice Nicolino

Un essai à charge, au pas de charge, pas de quartier !

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ce qui a été fait peut-il être défait ? Oui, jurent quelques siphonnés, dont je suis. Pour les besoins d'un projet industriel amoral, on a vidé des milliers de villages et rempli les banlieues de millions de prolétaires, dont beaucoup devenus des chômeurs perpétuels.

Mon vieux Raymond, ne me dis surtout pas que tu ne regrettes rien. Moi, si. Une autre histoire était possible.

Fabrice Nicolino, dans ce brillant essai, dresse un état des lieux de l'agriculture, soumise depuis un siècle à une folle industrialisation, au recours incontrôlé à la chimie et à des politiques productivistes désastreuses.

Un livre incontournable pour retrouver la raison et imaginer une agriculture qui remette l'humain au centre de ses préoccupations

Vernon Subutex 1

Scotché par Vernon Subutex 1 de Virginie Despentes. Je pense que je ne vais pas beaucoup sortir ce weekend. Finalement cette neige ne me dérangera pas trop!

Vernon Subutex 1 de Virginie Despentes
Vernon Subutex 1 de Virginie Despentes
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Qui est Vernon Subutex ?

Une légende urbaine.
Un ange déchu.
Un disparu qui ne cesse de ressurgir.
Le détenteur d'un secret.
Le dernier témoin d'un monde révolu.
L'ultime visage de notre comédie inhumaine.
Notre fantôme à tous

Peine perdue

Une galerie de portraits qui tissent une histoire glauque de bord de mer, c’est Peine perdue de Olivier Adam, et c’est pô mal du tout, et très bien construit!

Peine perdue de Olivier Adam
Peine perdue de Olivier Adam
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les touristes ont déserté les lieux, la ville est calme, les plages à l'abandon. Pourtant, en quelques jours, deux événements vont secouer cette station balnéaire de la Côte d'Azur : la sauvage agression d'Antoine, jeune homme instable et gloire locale du football amateur, qu'on a laissé pour mort devant l'hôpital, et une tempête inattendue qui ravage le littoral, provoquant une étrange série de noyades et de disparitions. Familles des victimes, personnel hospitalier, retraités en villégiature, barmaids, saisonniers, petits mafieux, ils sont vingt-deux personnages à se succéder dans une ronde étourdissante. Vingt-deux hommes et femmes aux prises avec leur propre histoire, emportés par les drames qui agitent la côte