Le syndrome du varan

C’est tellement violent, tellement dur, rude, la chair à vif, la viande à nu, la merde et la tripaille à l’air. Un cri rauque, primal.

Le syndrome du varan de Justine Niogret
Le syndrome du varan de Justine Niogret

Je suis confus, parce que ce livre oxymore est magnifique, alors que ce qu’on y lit force à vomir.

Le livre d’une enfance démolie par une mère perverse et un père pédophile. Comme un cri pour tenter de revivre et reprendre son souffle.

Et aussi un livre qui ne laisse pas le lecteur ni la lectrice sagement installés dans leurs canapés mais les forcent « a minima » à un poil d’introspection. Et moi, suis-je un héros ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Ça m'a longtemps pour comprendre pourquoi le varan. Ça se voit ici, dans ces lignes-là. Je ne sens rien. Enfin, si, quelque part dans un espace auquel je n'ai pas accès, je sens. Je dois hurler de haine et de terreur, avec la bouche pleine de bave. Mais je ne m'entends pas. Je suis là, sur le bord du marigot, à épaissir encore, à durcir, à cuire au soleil et à la boue. Je raconte, je dis les faits, je les écris, je les relis, une fois. Je les fais lire. Il y a les faits, il y a un goût d'ironie, de douleur passée, mais il n'y a pas ce que j'ai ressenti. Il n'y a pas ma fibre, celle qui hurle et crie et voudrait brûler le monde dans l'acide jusqu'à ce qu'il n'en reste que les os. Il n'y a pas ça. Il n'y a que le varan. Le varan épais qui parle de sa vieille voix de cadavre dans une langue trop tiède pour qu'elle lui plaise.
Cette nuit-là, quand je me suis réveillée, le monde a changé. »

Roman choc sur une enfance esquintée, récit de la reconstruction aussi, Le Syndrome du varan possède une voix unique et brûlante, qui marque pour longtemps

Juliana les regarde

Difficile de critiquer un bouquin pas aimé qui n’est sûrement pas dénué de valeur tant il montre bien ce que je n’avais pas vraiment envie de voir. Car là, c’est pas passé.

Juliana les regarde de Evelio Rosero
Juliana les regarde de Evelio Rosero

Un fille de dix ans découvre le trouble dans une atmosphère glaucasse entre l’alcoolisme de sa mère qui baise avec le chauffeur, une copine qui avale les pilules roses et bleues de ses parents, au milieu du fric, des piscines…

Un mélange entre attirance et répulsion très bien rendu mais qui laisse une sensation désagréable.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Soit Juliana, dix ans, fille d'un ministre important et d'une maîtresse de maison alcoolique, qui fête aujourd'hui son anniversaire. Juliana raconte, dialogue avec un canard à l'oeil fluo, tente d'échapper aux chatouilles de son père et se fait traiter de garçon par sa mère. Autour, la haute société s'esclaffe et se consume entre les whiskys et les cordillères blanches.

Mais Juliana rencontre Camila, à peine plus grande, capable de tout : boire des vodkas, s'envoler. Son premier amour, sa première fois, son exaltation et sa terreur. Tous les après-midi, enfermées dans une chambre, les enfants découvrent les jeux érotiques et les terribles cruautés de l'amour. La narration explose, minée par le désir et par la fièvre, les temps se mélangent et composent un précipité halluciné, couleurs, sons, lumière et eaux dormantes, un vertige poétique entre la tendresse et l'horreur

Barbara, roman

Le choix assumé de la romance fait cette biographie un livre très touchant. Pour autant, il faut accepter ce choix d’écriture plutôt osé tant les occasions de trahir semblent se présenter au fil de ce récit très intimiste.

Barbara, roman de Julie Bonnie
Barbara, roman de Julie Bonnie

Reste un livre fort sur une passion, sur l’inceste et sur une chanteuse hors du commun.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je décide de m'appeler Barbara Brodi. Grany, ma chère Grany s'appelait Brodsky. Je suis sa lignée, l'héritière de sa Moldavie. Je me plais dans ce nouveau nom, vierge de la petite Monique que l'on n'écoute pas. Barbara Brodi, ma nouvelle vie. Lorsque je l'annonce à Claude, il me dit, «Alors, Barbara, que nous chantes-tu ce soir ? » et je lui réponds, diva, « Ce soir, je chante pour toi, le répertoire de Barbara. » Nous éclatons de rire. »
J. B.

Julie Bonnie raconte Monique, enfant juive fuyant le nazisme, fille victime d'inceste, adolescente détestant son corps, pianiste empêchée. Sous ses yeux sensibles de chanteuse-écrivain, une jeune femme perdue décide de poursuivre son rêve, se transforme, s'invente. De l'enfant cachée pendant la guerre à la création de la chanson Nantes, comment Barbara est-elle devenue Barbara ?

Qui a tué mon père

Le temps des colères s’apaise. Celle du père et celle du fils. Et enfin, il devient possible de se voir, se reconnaître.

C’est beau comme le début d’un je t’aime.

Qui a tué mon père de Édouard Louis
Qui a tué mon père de Édouard Louis

Mais aussi le témoignage de la misère qui broie et avilit. Un réquisitoire contre les politiques qui stigmatisent les faibles et tailladent les aides sociales.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
"L'histoire de ton corps accuse l'histoire politique."

Dans le ventre du loup

Un livre de mémoire, pour la (re)trouver et réussir à la construire. Comment réagir en apprenant, vingts ans plus tard, que sa cousine fut violée et tuée à l’age de neuf ans? Héloïse Guay de Bellissen part à sa découverte et plonge dans les archives judiciaires pour retrouver Sophie.

Dans le ventre du loup de Héloïse Guay de Bellissen
Dans le ventre du loup de Héloïse Guay de Bellissen

Le livre part dans le passé, revient, navigue dans le temps, bifurque et m’a perdu parfois. Un livre pour tuer l’Ogre sous le lit, à la recherche de l’apaisement.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'est un conte, un conte bien réel. Une jeune femme ouvre les archives du tribunal d'Annecy pour revenir sur le fait divers qui a détruit sa famille, trente ans auparavant. Pourquoi ne lui a-t-on jamais parlé de sa cousine Sophie, victime à 9 ans du « monstre d'Annemasse » ? Elle plonge dans son histoire comme on plonge dans la gueule du loup. Le loup qui la guette depuis l'enfance. Le loup qui a tué, jeune assassin dont la vie a été pulvérisée par un drame. Le loup qui agit silencieusement au sein de chaque famille. Héloïse fait oeuvre de vérité, met en images les mauvais rêves, revient dans la maison de vacances où les petites filles vivaient en dehors du temps des adultes.

Revisitant le mythe du Chaperon rouge, Héloïse Guay de Bellissen, dans son roman le plus ambitieux, décrit admirablement le monde noir et solaire de l'enfance, et redonne au fantôme d'une fillette existence, dignité et amour

Les rêveurs

Un livre tout en douces rondeurs, l’histoire de sa vie, de son enfance et de celle de ses parents.

Les rêveurs par Isabelle Carré
Les rêveurs par Isabelle Carré

Une famille de « rêveurs », une tendre excentricité qui peut pourtant devenir une douce violence ou même une froide tyrannie.

Et c’est parfois drôle, toujours touchant.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« On devrait trouver des moyens pour em- pêcher qu'un parfum s'épuise, demander un engagement au vendeur - certifiez-moi qu'il sera sur les rayons pour cinquante ou soixante ans, sinon retirez-le tout de suite. Faites-le pour moi et pour tous ceux qui, grâce à un fla- con acheté dans un grand magasin, retrouvent l'odeur de leur mère, d'une maison, d'une époque bénie de leur vie, d'un premier amour ou, plus précieuse encore, quasi inaccessible, l'odeur de leur enfance... »
I. C.

Quand l'enfance a pour décor les années 70, tout semble possible. Mais pour cette famille de rêveurs un peu déglinguée, formidablement touchante, le chemin de la liberté est périlleux. Isabelle Carré dit les couleurs acidulées du moment, la découverte du monde compliqué des adultes, leurs douloureuses métamorphoses, la force et la fragilité d'une jeune fille que le théâtre va révéler à elle-même. Une rare grâce d'écriture

Neverland

C’est doux et pur comme de la nostalgie heureuse, c’est l’enfance en tons pastels, les trains électriques et les écorchures au genoux.

Neverland de Timothée de Fombelle
Neverland de Timothée de Fombelle

Il y a les parents, les grand-parents, les chambre, la pluie, le vélo… et c’est plutôt réussi. Un peu comme une petite douceur poétique un peu (trop) sucrée.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je suis parti un matin d'hiver en chasse de l'enfance. J'avais décidé de la capturer entière et vivante. « Regarde, elle est là, tu la vois ? » Je l'avais toujours sentie battre en moi, elle ne m'avait jamais quitté. Mais c'était le vol d'un papillon obscur à l'intérieur, le frôlement d'ailes invisibles dont je ne retrouvais qu'un peu de poudre sur mes bras au réveil. »

Neverland est un retour au pays d'enfance, un irrésistible voyage vers ces hauts territoires perdus que nous portons tous en nous

Fairyland

C’est doux et tendre. Une histoire racontée par une fille qui grandi auprès de son père homosexuel. Son enfance après la mort de sa mère dans un accident de voiture alors qu’elle n’avait que deux ans.

Fairyland de Alysia Abbott
Fairyland de Alysia Abbott

Et comme deux adultes-enfants dans une barque, pris dans la tempête de leurs émotions, ils tentent de rester à flot. Bousculées entre leurs incompréhensions et un amour indéfectible.

Une enfance chahutée dans le San Francisco de la drogue, des hippies, des gay, de la poésie et du regard des « autres ».

Et l’arrivée du SIDA

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je passais mes matinées au centre aéré de Haight-Ashbury. Papa faisait peu à peu la connaissance des mères célibataires les plus excentriques du quartier. La mère de Lola, une actrice des Angels of Light, avait joué dans un film de Warhol. La mère de Moonbeam vendait de l'herbe dans son appartement d'Oak Street. Elle avait pour habitude de sortir avec des jeunes hommes, de les faire s'inscrire à l'assistance sociale et d'empocher leurs chèques.
Quand je ne m'amusais pas avec Moonbeam ou Lola, j'étais souvent livrée à moi-même. "Les pédés la trouvent mignonne mais ils ont peur d'elle", écrit mon père dans une lettre. "Enfant = responsabilité, la panique ultime pour les égoïstes et les planqués."
Cette remarque ne valait pas pour Eddie Body. Chaque après-midi, il venait me chercher au centre aéré, le visage barré d'un large sourire. Une fois, il est arrivé en robe. Les animateurs ne l'ont pas laissé entrer dans la classe, jusqu'à ce que j'entende sa voix et que je coure me jeter dans ses bras. »

1974. Après la mort de sa femme, Steve Abbott, écrivain et militant homosexuel, déménage à San Francisco. Avec sa fille de deux ans, Alysia, il s'installe dans le quartier de Haight-Ashbury, le centre névralgique de la culture hippie. Commence pour le duo père-fille une vie de bohème, ponctuée de déménagements, de fêtes et de lectures de poésie

Venise n’est pas en Italie

C’est plus vraiment ma tasse de thé, mais j’aurais adoré lire ce livre plus jeune. Des punchlines bien senties, un humour plein d’autodérision et de sensibilité. Une famille décalée, avec ses petits soucis… et des plus gros.

Venise n'est pas en Italie de Ivan Calbérac
Venise n’est pas en Italie de Ivan Calbérac

Mais bon, un peu snobinard, je n’ai pas osé aimer ce livre pour ce qu’il est, un moment très sympa, tendre et léger comme les premiers émois.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Émile a quinze ans. Il vit à Montargis, entre un père doux dingue et une mère qui lui teint les cheveux en blond depuis toujours, parce que, paraît-il, il est plus beau comme ça. Quand la fille qui lui plaît plus que tout l'invite à Venise pour les vacances, il est fou de joie. Seul problème, ses parents décident de l'accompagner...

C'est l'histoire d'une famille inclassable, l'histoire d'un premier amour, miraculeux et fragile, d'un voyage initiatique et rocambolesque où la vie prend souvent au dépourvu, mais où Venise, elle, sera au rendez-vous.

Un roman dans la lignée de La Vie devant soi, du film Little Miss Sunshine, où l'humour se mêle à l'émotion

L’arbre qui donna le bois dont on fit Pinocchio

Une réappropriation de Pinocchio, pour en faire une jolie histoire. Mais juste une jolie histoire, c’est un peu juste. Justement.

L'arbre qui donna le bois dont on fit Pinocchio de Jean-Marie Gourio
L’arbre qui donna le bois dont on fit Pinocchio de Jean-Marie Gourio

Une jolie déception. Jolie, oui ! Mais décevante quand-même.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Giacomo, fils de menuisier, n'a connu depuis l'enfance que l'univers des jouets fabriqués par son père. Pour sauver l'entreprise familiale, il décide de se rendre dans le petit village de Collodi, en Toscane, où se trouverait l'arbre magique dont on fit Pinocchio. Une fois sur place, tout l'enchante : l'Italie, sa langue, son vin, ses femmes... Mais doit-il se fier au mystérieux inconnu qui lui promet de lui révéler son secret ? Et ce trésor qu'il convoite tant, existe-t-il vraiment ?