Pucelle, vol 1 : Débutante

Dans ce premier tome qui raconte plus ou moins la même période que Cruelle ou Jumelle, Florence s’attache beaucoup plus à la découverte du monde en dessous de la ceinture. Un monde inconnu, sale et tabou !

Pucelle, vol 1 : Débutante de Florence Dupré la Tour

Alors, quand les premières règles arrivent…

Comme à son habitude, Florence s’attache à TOUT dire et parfois on lui en voudrait presque un peu de tant de sincérité. Mais pourtant, c’est bien là que se trouve toute la puissance de ses albums !

Une enfance au sein du patriarcat religieux, des tabous, de la toute puissance des hommes et de la docilité des épouses et des enfants. Mais aussi, une enfance avec Béné.

Un premier album fort qui casse bien des tabous et des non dits

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il courait dans la famille une savoureuse anecdote à propos d'une Grand-tante paternelle et maman se délectait souvent à nous la raconter.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis sa plus tendre enfance, Florence ignore tout ce qui se passe… en-dessous de la ceinture.
Elle imagine que le papa met la petite graine dans le nombril de la maman, et puis de toute façon, il est tacitement interdit, dans la famille, de parler de « la chose qui ne doit pas être dite ».
Alors … Florence imagine des scénarii terribles, parfois idiots; Florence s’angoisse devant le poids de la tradition qui place inéluctablement la femme dans une position inférieure ; Florence, à sa façon, résiste pour ne pas sombrer.

Ne jamais couler

Marie est un bouchon de liège, comme sa grand-mère. C’est sa mère qui le lui a dit. Même dans la tempête, elle ne coule jamais.

Ne jamais couler de Marie de Brauer, dessins de Lucy Macaroni

Cette bande dessinée autobiographique sur la grossophobie, les problèmes de poids, l’amour de soi et le regard des autres est franchement bien foutue. Tout en restant rose, girly et très accessible, elle parle avec beaucoup de profondeur et de sensibilité.

Alors certes, je ne suis pas monstre fan du style de dessin ou de la typo, mais Marie de Brauer m’a beaucoup touché par sa sincérité et son humour.

Un album à mettre dans toutes les mains !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Tu penses à ta maman parfois ?
Tous les jours.
Elle était comment ?
Elle était super. Tu lui ressembles un peu.
Ah ouais ?
Oui... Vous êtes des bouchons de liège.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« La grossophobie définit l'ensemble des discriminations que vivent les personnes grosses dans notre société. Elle est constante dans nos vies, de l'enfance à l'âge adulte. C'est une discrimination silencieuse, ignorée, légitimée.

Alors voilà, la grossophobie elle est partout, tout le temps. Et tout le monde s'en fout. »

Avec une approche ludique et un humour décapant, Marie de Brauer nous raconte son histoire et son combat contre l'injustice qu'elle vit au quotidien, portés par les illustrations pétillantes de Lucymacaroni.

Le salon de massage

A la lecture de ce salon de massage, j’ai vraiment eu l’impression que Mazarine avait créé Souheila, lui avait donné un âge, un copain et un métier et s’était ensuite contentée de la regarder vivre…

… et entrer dans un salon de massage et…

Tout mon corps réagissait à ses mains calleuses dont j'aimai immédiatement la texture. Lorsqu'elle remonta le long de mes jambes vers mes fesses, je ne savais plus si j'espérais qu'elle s'y aventure ou si je le redoutais. Mon corps s'ouvrait et se détendait, mon esprit commençait à son tour à lâcher prise. Elle s'en tint au bas des fesses, puis au bas du dos. Rien dans son attitude ne laissait penser que son métier eût un aspect sexuel. D'ailleurs, il était bien noté sur une feuille imprimée et scotchée au mur que toute demande explicite serait sanctionnée par la loi. J'ignorais de quelle loi il s'agissait mais commençais à considérer que cette activité était tout à fait normale: masser était un métier à part entière, [...]
Le salon de massage de Mazarine Pingeot

Une Souheila qui semble vivre comme un bateau en papier qui descend le courant, se laissant porter, coincer, chahuter par les éléments.
Sur le chemin du retour, je laissai couler des larmes de rage et d'impuissance. Je ne savais plus ce que je faisais ni pourquoi. La gratuité de mon existence me sautait aux yeux. J'aurais pu sauter du pont de Tolbiac, mais même ça n'aurait pas eu de sens.

Une vie où même le désir, les rencontres ou les conflits ne semblent réussir à la toucher. Et pour qui ne se laisse pas toucher, quoi de mieux qu’entrer dans un salon de massage ?

« Chaque roman dit au lecteur : "Les choses sont plus compliquées que tu ne le penses." C'est la vérité éternelle du roman mais qui se fait de moins en moins entendre dans le vacarme des réponses simples et rapides qui précèdent la question et l'excluent. »
Milan Kundera, L'Art du roman
Un roman qui commence avec un épigraphe bien sympatoche !
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je venais d'avoir 28 ans et un poste à Paris dans une école du XII arrondissement quartier tranquille dont l'ambiance me rappelait Nevers, là où j'ai commencé à enseigner. Je connaissais Paris pour y avoir fait mes études. Ce n'était pas nouveau pour moi, je n'y débarquais pas comme une provinciale apeurée ou au contraire curieuse de tout et qui va au-devant du danger. J'avais aimé la province bien plus que je ne l'avouais à mes amies ou à mon compagnon. Secrètement j'en nourrissais une nostalgie qui me donnait un air blasé, un air de Parisienne.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tout va bien pour Souheila. Ou, plus exactement, rien ne va mal. Alors, qu'est-ce qui la pousse à entrer dans ce salon de massage thaïlandais à deux pas de chez elle qu'elle n'avait jamais remarqué ? Et pourquoi n'en parle-t-elle pas à Rémi, l'homme avec qui elle partage sa vie ? C'est la question à laquelle elle va devoir répondre quand un scandale éclate, qui met au coeur de l'attention le salon de massage et ses clientes.

Souheila, plus à l'aise dans l'ombre et les interstices, se voit contrainte de se rapprocher de ces femmes avec lesquelles elle ne partage rien, si ce n'est d'avoir été victime des mêmes trafiquants. Mais être victime est-il suffisant pour créer des liens ? C'est pourtant par le biais de ce petit groupe que Souheila rencontre un homme qui va bouleverser le cours de son existence, l'obligeant à faire des choix, elle qui s'en remettait au hasard.

Avec une plume saillante et un humour mordant, Mazarine Pingeot s'attaque ici aux sujets les plus brûlants de notre époque

L’allumeuse

Ce recueil de nouvelles commence en force avec cette allumeuse, une petite fille abusée par le bedeau de l’église. Et malgré une fin un peu curieuse, voilà une fort belle façon de commencer (si, si !).

 - Ce n'est pas un péché ça non plus. Le petit Jésus peut nous voir. On ne ferait pas ça dans son dos.
Son haleine sentait la craie de tableau noir.
Il n'a pas fait grand-chose cette première fois, le bedeau Lacasse. Il n'a qu'effleuré le bas de mon dos avec sa main et un peu ma poitrine, là où elle commençait à déformer mon tricot mou en mohair. Je n'ai rien dit, le long frisson qui me secouait m'aurait coupé la parole si un mot avait voulu passer mes lèvres. Et mes lèvres, de toute façon, étaient à moitié clouées par celles du bedeau, douces au milieu mais entourées d'épines qui me perforaient la peau et me picotaient le pourtour de la bouche comme si elle se frottait contre un cactus.
L’allumeuse de Suzanne Myre

La suite, même s’il s’agit souvent de brèves histoires de femmes fortes et de la rue Balzac de Montréal-Nord (pas vraiment le meilleur quartier, semblerait-il), m’a moins parlé, avec des thématiques moins puissantes des scénarios moins poussés…

Un petit zut, donc, pour ce livre qui avait si bien commencé.

Allez, un double pouce en l’air pour la très touchante Enfance de petit Frigo (qui m’a un peu rappelé la brillantissime BD Cabot-Caboche en version chaton) et le drôlissime Préavis de décès !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Montréal-Nord n'est vraiment pas l'arrondissement le plus excitant de la ville de Montréal. Je le sais, j'y ai vécu les dix-huit premières années de ma vie avant de décamper. Tante Henriette a fini par me mettre à la porte de son appartement de la rue des Chrysanthèmes parce que j'étais soi-disant ingérable. Peut-être bien que les gangs de rue ont ajouté de la couleur aux environs, mais à cette époque, à la fin des années 70, c'était le calme plat, plus que plat. Nous pouvions jouer dans la rue sans risquer de nous faire frapper par une voiture tant il en passait rarement sur Balzac, et escalader l'hiver les montagnes de neige qui dentelaient le bord des trottoirs.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Voici des histoires comiques et venimeuses où se succèdent les mères égoïstes et les pères absents, les minets et les marmots, et, surtout, les pécheresses tristes et les femmes vampires qui séduisent les hommes pour les réduire en poupées de chiffon. Car les héroïnes de Suzanne Myre sont puissantes. Ce sont des battantes qui n’hésitent pas à mettre le monde à feu et à sang pour se faire justice. Pourtant, aucune d’elles n’est un démon. Elles sont même gentilles, au fond. Mais elles ne veulent plus qu’on les blesse. Il y a, au cœur de ces récits, une profondeur bouleversante. Une complexité, une introspection, une tendresse qui désemparent et qui persistent longuement après la lecture. Dans L’ALLUMEUSE, l’écriture de Suzanne Myre se fait touchante comme jamais.

Par ailleurs, l’auteure nous y fait visiter le quartier de son enfance : Montréal-Nord, un lieu bigarré auquel la littérature ne s’intéresse jamais. La paroisse Saint-Vincent-Marie-Strambi, la polyvalente Calixa-Lavallée, le boulevard Industriel deviennent le théâtre de cent douleurs et rires grinçants. C’est là un livre fabuleux où les personnages rêvent indifféremment d’assassinats et de hamburgers chez Dic Ann’s. Bref, en douze histoires et un préavis de décès, L’ALLUMEUSE célèbre les têtes brûlées qui mettent le feu aux poudres.

Ce qu’un jeune mari devrait savoir

Aux siècles précédents, les manuels destinés aux jeunes filles foisonnaient et, évidemment, prodiguaient leurs invraisemblables conseils au premier degré. Il fallait bien les instruire, les pauvresses. Aujourd’hui, celles-ci ont désormais de l’instruction et force est de constater que ce sont plutôt les jeunes hommes qui auraient bien besoin de quelques judicieuses recommandations ! Ce manuel réunit nombre d’autrices (et quand même un ou deux auteurs) canadiennes pour palier à ce cruel manque.

Traitez votre amante comme si c'était elle, la seule. Parce que, dans les moments que vous passez avec elle, elle ne doit penser qu'à son clitoris - que vous êtes en train de chatouiller -, et non à votre téléphone, auquel vous répondez invariablement, que ce soit votre papa ou votre admiratrice favorite de Gwyneth Paltrow qui vous appellent.
Votre femme aime Gwyneth Paltrow et c'est correct.
Si vous avez un chien ou un furet, ne le promenez pas avec votre amante.
Ce qu’un jeune mari devrait savoir : guide du jeune mari parfait de Mélodie Nelson

Si la plupart des autrices s’en sortent fort bien avec beaucoup d’humour, de second degré, de dérision, de parodie et de moqueries… d’autres ont pris leur travail avec plus de sérieux. Zut.

Il m'a malheureusement rendu la tâche impossible.
Ce n'est pas moi qui exagère, c'est lui qui était dégueulasse. Il avait le rire aussi gras que sa conversation était mince. D'une vulgarité inégalée, il n'arrêtait pas de prendre mon amie par la taille pour l'asseoir de force sur ses cuisses. Je le soupçonne même d'avoir tenté de la doigter entre les deuxième et troisième services. Il a fumé un cigare tandis que je desservais la table. Un-ci-ga-re-tan-dis-que-je-des-ser-vais-la-ta-ble
Ce qu’un jeune mari devrait savoir : un travail de funambule de Rose-Aimée Automne T. Morin

Mais voilà bien un charmant recueil de bonnes drôleries (qui ne sera, hélas, par forcément lu par les personnes qui en auraient le plus besoin).

Spéciale dédicace à Mélodie Nelson ! Merci, je ris encore !

Avec :
les Réflexions de
Martine Delvaux, Martina Chumova, Eli Tareq El Bechelany-Linch, Stéphanie Boulay, Mélodie Nelson, Léa Stréliski
les Désirs de
Heather O’Neill, Lili Boisvert, Ariane Lessard
la Révolution de
Roseline Lambert, Véronique Grenier, Rose-Aimée Automne T. Morin, Coco Belliveau, Stella Adjokê
et l’Alliance de
Mikella Nicol, Jolène Ruest, Patrick Watson, Simon Boulerice

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je n'ai jamais voulu de mari, jamais voulu me trouver un mari, me faire un mari, me dessiner un mari, me tricoter un mari, m'écrire un mari. Non. Jamais. Surtout pas un mari. Une femme, oui, une fois, je l'ai ardemment désiré, et puis je l'ai fait, j'ai dit oui à la question Prenez-vous cette femme pour épouse ? Mais un mari ? Un vrai ?
Non. Jamais.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les manuels de la femme parfaite, de la ménagère parfaite ou de la fille parfaite pullulent depuis deux siècles. Règles de savoir-vivre, conseils vestimentaires, comment utiliser une fourchette, comment blanchir des draps, bref comment apprendre, obéir et aimer. Les éditeurs et les magazines féminins de l’ère victorienne à nos jours n’ont jamais eu peur de nous dire comment bien dresser les jeunes filles. Nous souhaitons renverser la vapeur en demandant aux autrices et auteurs de nous dire ce que serait le «mari parfait», afin d’offrir un guide un brin décalé. Sans jamais moraliser. Comment texter avec élégance et compassion, comment cuisiner un repas, comment gérer les anniversaires, les demandes en mariage, les voyages, le confinement, les excursions du dimanche au Ikea, les longues conversations d’été, les rénovations, l’éducation des enfants? Les récits de ce livre sont parfois historiques, parfois personnels; ils racontent des moments de douleur ou de compassion qui contribuent à montrer comment être un mari parfait.

Le péril Dieu

« Féminisme religieux », impossible oxymore
Le péril Dieu de Tristane Banon

Une lecture éclairante pour qui voudrait comprendre les sens premiers de féminisme ou de laïcité et leurs relations. Un réquisitoire implacable contre le sexisme des religions, sans jamais confondre foi et clergé, intime et politique, croyances et manipulation.

Des trois monothéismes, c'est bien le christianisme qui, le premier, exige des femmes qu'elles portent un voile en avançant des arguments strictement religieux, alors que dans le même temps, voulant se démarquer du judaïsme, il libère la tête des hommes.

Un livre qui commence par un gros saut en arrière, à la naissance des trois grandes religions monothéistes, pour comprendre comment elles se sont constamment assises sur les droits des femmes, simples outils procréatoires.

La femme, pourtant chargée de faire grandir les enfants, n'a paradoxalement aucune autorité sur eux.
Seul l'homme détient le droit au commandement, Dieu l'a voulu ainsi. Amen!
C'est alors logiquement qu'avec beaucoup de clairvoyance et un certain sens de l'à-propos, complètement dans l'air de son temps, le grand théologien saint Augustin s'interroge aux alentours de l'an 400 : « Je ne vois pas quelle utilisation peut faire l'homme de la femme, si on exclut la fonction d'élever les enfants » !

Un essai qui démontre, pas à pas, comment les religieux ont conservé leur emprise et quelles révolutions (française, bolchevique, féministes…) ont petit à petit redonné aux femmes des droits sur leur corps et leurs libertés.

Mais également combien ces avancées sont constamment remises en questions, comme elles sont fragiles.

Tristane Banon termine aujourd’hui, avec les débats autour du voile ou de la laïcité avec une position claire et étayée qui n’est pas sans rappeler les brillantes plaidoiries de Richard Malka.

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je suis née des trois religions du Livre.
Mon grand-père était musulman, ma mère est catholique et mon père, juif.
Longtemps j'ai voulu suivre une voie religieuse. C'eût été réconfortant et confortable, balisé.
La religion vous prend au berceau, littéralement, et s'occupe de vous jusqu'à la mort. Elle vous exempte de beaucoup de questionnements, elle pallie le doute, les incertitudes, vous console des accidents de la vie, aussi. Avec les années, elle vous dit quoi faire, comment, qui respecter, quoi espérer, quel chemin emprunter.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Quand « Dieu » est érigé en maître à penser politique, c'est la femme qui, la première, courbe l'échine. Il suffit d'observer les fondamentalistes islamistes imposer le niqab, la burqa, le tchador ou le hijab, les juifs ultra-orthodoxes perruquer leur femme, ou encore les traditionalistes catholiques aller jusqu'au meurtre lors de raids anti-avortement, pour s'en convaincre. Bien sûr, ils sont les radicaux, les extrémistes, ils sont ceux pour qui la religion est le moyen d'installer un ordre social au sein duquel la femme se soumet, s'oublie et vit cachée, à l'ombre des hommes.

Ce livre ne veut pas faire le procès de la croyance, il appartient à chacun de décider ce en quoi il veut placer sa confiance, cela relève de l'intime.

Mais aucun texte sacré - ni la Torah, ni la Bible, ni le Coran - ne veut l'émancipation de la femme, aucun ne lui reconnaît les mêmes possibles qu'aux hommes. Seuls existent des croyants humanistes, conscients de ce que les écrits ont à enseigner, et de ce qu'il faut savoir laisser au bord du chemin de l'universalisme.

Alors que l'obscurantisme intégriste gagne doucement du terrain, bien plus ancré dans les mentalités que ce que l'on croit, Tristane Banon dénonce les grands marionnettistes de droit divin et rappelle qu'il n'y a pas de féminisme envisageable sans l'irrespect des religions et une bonne part de laïcité

Confidences à Allah

Le roman duquel est tirée cette bande dessinée est un chef d’œuvre. Remarquez que tous les livres de Saphia Azzeddine valent le détour ! Mais Confidences à Allah est son premier roman et c’est vraiment un livre qui m’avait marqué par sa puissance !

Confidences à Allah de Saphia Azzeddine, dessin et couleurs de Marie Avril, récit de Eddy Simon

Mais alors, que dire de cette adaptation ? Oui, forcément, j’ai été un peu déçu. J’aurais imaginé des visages différents, d’autres corps, couleurs… Mais surtout, un trait moins lisse, un rendu plus râpeux, rêche, rude comme le désert et toutes ces personnes qui se trouvent sur le chemin de Jbara.

Alors certes, la bande dessinée est fidèle et il est difficile de lui faire d’autres reproches que : « je n’aurais pas vu ça comme ça ».

Je vous laisserais donc vous faire votre avis, mais avant tout : lisez le roman et vous aussi, vous serez envoutés par l’écriture de Saphia Azzeddine

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Allah, si j'étais née dans une famille bien, dans une ville bien, avec une éducation bien, j'aurais forcément été une fille bien. Mais ce n'est pas comme ça que ça s'est passé au départ, Tu avoueras que je suis partie avec vachement plus d'emmerdes.

Eddy Simon et Marie Avril adaptent le monologue fiévreux de Saphia Azzeddine, portrait sans concession d'une jeune femme qui rêve d'émancipation et refuse de se soumettre

La paix des ruches

Publié la première fois en 1947, ce livre commence par cette phrase incroyable et puissante :
« Je crois que je n’aime plus mon mari. »

Nul besoin de dire qu’à l’époque (avant même Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir), il dû surprendre !

C'est que nous étions des amoureuses, et qu'ils ont fait de nous des ménagères, des cuisinières... Voilà ce que nous avons peine à leur pardonner.
La paix des ruches de Alice Rivaz

Et malgré quelques longueurs (trouvais-je), voilà un génialissime explicatif des injonctions faites aux femmes, inégalités, épuisements… (et encore, passe-t-on ici l’épisode de la maternité)

Les hommes, m'expliquait ma jeune voisine dans son lit d'accouchée, croyez-moi, c'est la simplicité même! Là où vous imaginez qu'il y a quelque chose, en général, il n'y a rien. Oui, croyez-moi. Je m'en suis vite aperçue, heureusement. Deux ou trois mois après mon mariage.

Et alors ? septante-cinq ans plus tard… on fait le bilan ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je crois que je n'aime plus mon mari.
Et dire que toute ma famille s'imagine que c'est l'homme de ma vie parce que pendant longtemps j'ai beaucoup peiné, travaillé pour lui, à cause de lui. Mais est-ce à cela que se mesure l'amour? Je ne le pense pas. Ce qui se mesure là, ce qui porte témoignage, n'est-ce pas plutôt une certaine obéissance à une destinée?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je crois que je n'aime pius mon mari. » Ainsi s'ouvre le Journal dans lequel Jeanne raconte les désillusions de sa vie avec Philippe. Au fil des pages, elle observe ses congénères masculins, époux en tête ; note les conversations qu'elle tient avec collègues et amie au sujet de l'amour ; et livre une réflexion sans dogmatisme ni discours idéologique sur la condition des femmes et leurs relations aux hommes, « dans un mélange d'acuité impitoyable et d'espoir obstiné »
(Mona Chollet)

La chair est triste hélas

Ovidie est en grève depuis 4 ans, l’occasion d’un bilan et de crier. Le besoin de tout mettre sur la table pour voir s’il est possible d’en tirer quelque chose, s’il est possible de redémarrer… pour aller où ?

Ovidie est en grève du sexe avec les hommes, donc.

Un jour, je n'ai plus pu.
Oh, bien sûr, il y a eu des signes avant-coureurs, ce genre de choses n'arrive pas ex nihilo. Le dégoût, d'abord ponctuel, a pris place insidieusement, jusqu'à m'envahir complètement. Comme un épuisement psychique, un burn-out, une impossibilité de faire un pas de plus, de rouler un kilomètre supplémentaire sur cette longue route de la perte de sens.
La chair est triste hélas de Ovidie

Constat d’une grosse déception avec le sexe et les hommes. Jeu de dupes dans une société patriarcale co-entretenu tant par les hommes (au mieux incompétents et au pire abuseurs (voir pire encore)) que par des femmes qui seraient atteintes d’un syndrome de Stockholm.

Une triste chair portée par une grosse colère qui vise juste et s’apaise au fil du livre pour arriver à une fin très touchante.

Oui… hélas !

Un essai qu’on ne peut refermer sans se poser la question (quelque genre ou sexe que l’on soit). Et moi ?
… et fuir la absolument la réponse : non, moi, jamais !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Un jour, je n'ai plus pu.
Oh, bien sûr, il y a eu des signes avant-coureurs, ce genre de choses n'arrive pas ex nihilo. Le dégoût, d'abord ponctuel, a pris place insidieusement, jusqu'à m'envahir complètement. Comme un épuisement psychique, un burn-out, une impossibilité de faire un pas de plus, de rouler un kilomètre supplémentaire sur cette longue route de la perte de sens.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« J'ai repensé à ces innombrables rapports auxquels je m'étais forcée par politesse, pour ne pas froisser les ego fragiles. À toutes les fois où mon plaisir était optionnel, où je n'avais pas joui. À tous ces coïts où j'avais eu mal avant, pendant, après. Aux préparatifs douloureux à coups d'épilateur, aux pénétrations à rallonge, aux positions inconfortables, aux cystites du lendemain. À tous ces sacrifices pour rester cotée à l'argus sur le grand marché de la baisabilité. À toute cette mascarade destinée à attirer le chaland ou à maintenir le désir après des années de vie commune. Cette servitude volontaire à laquelle se soumettent les femmes hétérosexuelles, pour si peu de plaisir en retour, sans doute par peur d'être abandonnées, une fois fripées comme ces vieilles filles qu'on regarde avec pitié.

Un jour, j'ai arrêté le sexe avec les hommes. »

La position de la cuillère : et autres bonheurs impertinents

Voilà un livre qui nécessite une certaine culture littéraire pour pouvoir en profiter pleinement. Car les pensées de Deborah découlent principalement de ses lectures. Et là, elle m’a perdu bien des fois.

M
Midi (démon de)
Vous vous êtes acheté une moto, vous ne vous rasez plus, vous avez demandé à votre assistante de vous commander des livres écrits par des femmes. Et ce, parce que votre jeune petite amie a remarqué que votre bibliothèque ne comptait que des livres d'hommes. Vous écoutez du Sébastien Tellier sur vos appareils connectés (mais vous préférez Simon and Garfunkel), vous rêvez d'un bœuf bourguignon bien fondant mais vous foncez tête baissée vers un curry végane au bras de votre démon de midi adoré.
La position de la cuillère : et autres bonheurs impertinents de Deborah Levy

Mais lorsqu’elle parle de Ballard, de Crash ! et de voitures, de Marguerite Duras, de féminisme ou du désir j’ai pu me raccrocher plus facilement à ses pensées à l’humour fort britannique.

Marguerite Duras était une penseuse intrépide, égocentrique, même à vrai dire légèrement ridicule. Mais aurait-il pu en être autrement? Quand elle pousse sa créature frêle et audacieuse en chaussures lamé or dans les bras de son millionnaire chinois, Duras n'a pas le moindre mot d'excuse pour les libertés morales et psychologiques qu'elle prend pour exister.

Une lecture pleine de pistes de lectures

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Chère étrangère,
J'ai plusieurs fois commencé cette lettre mais jusque-là, je ne croyais pas à ce que j'écrivais. Je suis romancière et j'ai écrit des livres sur le bonheur comment la pression qu'on nous met pour être constamment heureux peut nous rendre malheureux et silencieux alors que tous les autres ont le bonheur bruyant.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Et si Deborah Levy nous ouvrait les portes de sa bibliothèque personnelle ? Si elle nous emmenait à la découverte des artistes qui l'inspirent et la secouent ? Et si, en passant, elle nous livrait une anecdote savoureuse impliquant les petites cuillères, son voisin de palier et Nietzsche ?
Tour à tour jeune femme aux yeux noircis de khôl, ses fidèles creepers aux pieds pour arpenter le Londres underground des années 1970, déjà fascinée par Colette et Simone de Beauvoir, amante féministe relisant Marguerite Duras et Sigmund Freud et Violette Leduc et Roland Barthes, voyante lorsqu'il s'agit de scruter l'âme des artistes qui l'obsèdent - Edouard Manet, Lee Miller, Francesca Woodman -, à l'affût du monde sous toutes ses coutures - technologie, pandémie, gastronomie... - Deborah Levy nous livre au fil de ces textes réjouissants, rassemblés ici pour la toute première fois, un véritable traité de l'indiscipline et une plongée revigorante dans son intimité loufoque et érudite.

Regarder le monde, négocier la façon dont en retour le monde nous regarde, est au coeur de l'écriture.