Troll me tender

Du feel-good version institutrice candide en ZEP sur les réseaux sociaux.

 - Écoute, j'ai failli te dire de ne pas venir, mais je n'ai pas voulu t'affoler... 
 - Ton père est parti.
 -Quoi? Comment ça, parti?
Il est allé retrouver sa PUTE! lance Chantal rageusement en tournant la clef de contact.
Abasourdie, Amandine se prend une décharge de dix mille volts, tétanisée sur son siège, le souffle coupé, la mâchoire béante. Choquée et effrayée par sa mère qui semble possédée. L'insulte l'a percutée de plein fouet. Et pour cause, Chantal ne s'est jamais rabaissée à pareil langage devant elle, dans sa bouche, ces propos relèvent du délire. D'ailleurs, Amandine reconnaît à peine son visage crispé de douleur, ses deux mains désespérément agrippées au volant, comme si, après son mari, on essayait aussi de lui voler sa voiture. En cinquante ans de mariage, ses parents ne se sont jamais quittés, ce sont des inséparables. Pendant trente-deux ans, ils ont travaillé côte à côte dans leur petite charcuterie de Saint-Désir, Chantal à la caisse, toujours coquette dans sa blouse fleurie, aimable et bien coiffée, tandis que Gérard s'affairait gaiement, jovial, derrière son comptoir pour servir au mieux leurs clients.
Troll me tender de Sophie de Villenoisy

Clairement, je ne suis pas le bon public, mais les vacances servent aussi à la découverte.

Une histoire rigolote pleine de bons sentiments à la morale pédagogique qui aligne les clichés et images préfabriquées et qui a eu raison de mon plaisir

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Un an déjà qu'elle enseigne au collège Georges-Brassens et la peur est toujours là, comme une intruse, tapie dans la chaleur de ses entrailles. L'appréhension de rentrer en classe. Ce sentiment irrépressible de ne pas être à la hauteur. La hantise d'être avalée crue par vingt-cinq ados survitaminés. C'est comme se retrouver dans la cage aux lions, sans fouet, ni protection.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Amandine Doucet, jeune professeure de français, est parachutée dans un collège sensible de banlieue parisienne. Sur place le constat est sans appel, elle n'a ni la bosse pédagogique ni l'autorité pour dompter ses élèves. Désabusée, elle se console en clashant sur les réseaux sociaux des influenceurs issus de la téléréalité, en particulier Sandra Faitout. Celle-ci cristallise à ses yeux la déchéance intellectuelle qui mine cette jeunesse.

Sous couvert d'anonymat, Amandine soigne son ego en se taillant une réputation de vanneuse et n'hésite pas à confronter en duel son ennemie virtuelle. Mais ce don pour la médisance pourrait bien se retourner contre elle...

Légère et court-vêtue

Il est impressionnant de voir à quel point chaque livre d’Antoine Jaquier est différent et pourtant comme des thématiques et ses préoccupations s’y cristallisent. A chaque fois une claque qui vient d’ailleurs !

J'ai autant envie d'une relation sexuelle que d'un cancer du côlon. Elle doit le savoir et me tend une pilule. C'est du Cialis, dit-elle, avec ça tu vas l'avoir dure jusqu'à demain soir. Je lui dis que je n'en ai pas besoin. D'un geste autoritaire elle signale que la réponse n'est pas à choix multiple. Après tout, pourquoi pas. Autant ça que bander mou. La pilule gobée elle m'invite à trinquer, boit sa coupe presque cul sec et fouille dans les paquets pour en sortir les strings.
 - Déshabille-toi mon loulou, je veux voir comment tu portes ça.
Légère et court-vêtue de Antoine Jaquier

Légère et court vêtue c’est l’histoire de Mélodie, une instagrameuse ex miss Suisse-romande coincée avec Tom, un looser addict au jeu. Et là, on devine rapidement qu’en grand spécialiste, Antoine Jaquier va les faire morfler grave.

Je me souviens particulièrement de cette phrase assénée comme un coup de massue: Si la solution est une redistribution des richesses, dire que les riches vont se crisper serait un euphémisme

Mais ! Chaque livre est différent et cette fois encore, Antoine réussit à surprendre.

Mamie disait que les plus grandes inventions du XXe siècle étaient le lave-linge et la pilule - qu'on aurait pu s'arrêter là.

Un livre glam-trash peut-être un peu plus facile que ses autres productions, l’histoire de l’émancipation d’une femme

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Mélodie
Le poids de Mango sautant sur le lit me tire de mon sommeil. Je n'ouvre pas les yeux. Ne veux pas que cette journée commence, mais mon chat préféré est déjà sans pitié. Sa petite patte touche mon visage. Assis sur le rebord de l'oreiller, il piaille. Ça m'arrache un sourire il insiste.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Découvrir les Parisiens affectés à ce point me bouleverse. Des mecs m'expliquent que mes robes légères deviennent politiques. Ma crinière démesurée qu'on disait m'as-tu-vu est aujourd'hui assimilée à un signe fort de liberté - on n'arrête pas de m'en féliciter. Mes gambettes et mes escarpins feraient rempart à l'extrémisme radical pour les plus exaltés. Ma frivolité est d'un coup perçue courageuse. En d'autres termes : je suis une cible. Continuer à s'amuser semble être le mot d'ordre même s'il sonne parfois creux dans ce milieu. Que peut-on faire d'autre de toute manière ?
C'est décidé, je m'entêterai à vivre bien maquillée, court-vêtue et riant à gorge déployée - jusqu'à ce qu'on me la tranche. »

Tendances : plaidoyer pour ne plus en suivre aucune

Oui, navrants ! Nous sommes navrants !

Art de vivre
Le hygge
L'hyperconnexion
Le culino-champêtre
La mompreneuse
Bien-être
#happy
La pleine conscience
La sylvothérapie
La détox
Mode
La fashtivisme
La mode ethnique
La mode digitale
Le greenwashing
Déco
Le style poorgeois
Le minimalisme/maximalisme
Airspace
Le rangement
Radicalité
Le survivalisme
Le hikikomori
Le métavers
Tendances : plaidoyer pour ne plus en suivre aucune de Saphia Azzeddine et Jennifer Murzeau

A vouloir être « nous-même » tout en cherchant à ressembler à … (à qui d’ailleurs ?). A nous regarder le nombril pour y trouver notre richesse intérieure. A acheter notre aura pour mieux étaler notre humilité…

Florilège d'objets connectés navrants
Hydratesparke, une bouteille d'eau intelligente qui « brille pour vous assurer que vous n'oublierez plus jamais de boire de l'eau ». Pour seulement 63 euros.
Kerastase Hair Coach, la brosse à cheveux intelligente et suréquipée (d'un gyroscope, d'un accéléromètre et d'un micro) qui vous dit comment vous brosser les cheveux.
Slide, le petit boîtier à 300 euros qui permet d'ouvrir ses rideaux avec son smartphone.

Un livre qui m’a souvent fait penser à l’excellent Développement (im)personnel de Julia de Funès. Démontage en règle de tous ces manuels, tous ces gourous, toutes ces tendances qui nous promettent le bonheur en nous vendant leurs techniques et merdouilles éphémères et standardisées (tout en salopant, exploitant, détruisant et exterminant en toute hypocrisie). L’industrialisation de nos tristesses ou comment tirer profit des misères humaines.

La réponse est dans un article du site américain The Verge, « Welcome to Airspace », de Kyle Chayka. Ou quand la décoration résulte d'algorithmes. Dans son texte, l'auteur se demande dans quelle mesure la Silicon Valley contribue à rpandre la même esthétique stérile à travers le monde. Tout à coup, on est saisi et l'on se rend compte en effet que les espaces se ressemblent de plus en plus malgré des propriétaires qui claironnent à tous vents décorer leurs intérieurs en fonction de leur personnalité, pour obtenir quelque chose qui leur ressemble vraiment, quoi... Mehdi se précipite sur tous ses magazines préférés, de Milk à Kinfolk et The Socialite Family, là où justement il se souvient avoir aimé ceci, moins cela, annoté et plié des pages pour y revenir

Un essai salutaire et hilarant d’une triste société consternante d’individualisme

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Le monde va mal. Ceux qui l'habitent, pas ouf. « L'environnement », comme un écran psychiatrique sur lequel nous autres humains projetons nos névroses, déversons nos poubelles, crachons notre détresse, se détériore dans des proportions jamais atteintes et
qui menacent jusqu'à la survie de l'espèce.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Quel est le point commun entre une architecte qui cherche son salut dans les plaids molletonnés, une jeune active qui tente de reprendre pied en enlaçant des arbres, une grande bourgeoise autoproclamée styliste qui fait bénir ses « créations » par un chaman, un trentenaire qui ingurgite des jus verts dans l'espoir de purifier son corps, accessoirement son âme, et une femme au foyer qui range compulsivement pour ne pas s'effondrer sous sa charge mentale ? Tous sont victimes des tendances.

Omniprésentes et insidieuses, sur nos écrans et dans nos magazines, suivies ou subies, elles se présentent comme des solutions miracles à tous nos maux. Un burn out ? La pleine conscience ! Un couple en crise ? Le minimalisme ! De l'éco-anxiété ? Le greenwashing ! Les tendances sont surtout des symptômes, ceux d'une époque où la religion consumériste fait marcher sur la tête, scier la branche sur laquelle on est assis, et chercher désespérément un sens qui se dérobe de plus en plus.

Dans ce faux guide de développement personnel, Saphia Azzeddine et Jennifer Murzeau démontrent sans jugement et avec beaucoup d'humour qu'il est essentiel d'arrêter de se soumettre à ces injonctions absurdes qui, en prétendant nous tendre les clés du bonheur, font de nos vies des simulacres. Et affirment qu'alors tout ira mieux !