Si vous n’êtes pas prêt à l’étrange, l’inexplicable, le dérangeant, l’incompréhensible… passez votre chemin !
Il faut dire que les albums de Nicolas de Crécy sont souvent déstabilisants, et celui-là mérite certainement une très bonne place sur ce podium.Un génial Prosopopus, écrasant de noirceur et lumineux d’amour pour les âmes aventurières.
– Et ça cause de quoi, en fait ?
– Laissez-vous surprendre, dis-je !
« Cet animal ne figure pas parmi les bêtes domestiques, on n'en trouve pas toujours dans le monde, aussi bien, son aspect ne se prête-t-il pas à une classification. Ce n'est pas comme un cheval ou un bœuf, un chien ou un porc, un loup ou un cerf. Dans ces conditions, même si on se trouvait en présence d'un prosopopus, il serait difficile de savoir que c'en est bien un. Les bêtes à cornes, on sait que ce sont des bœufs ; les bêtes à crinière, on sait que ce sont des chevaux. Le chien et le porc, le loup et le cerf, on sait qui ils sont. Il n'y a que le prosopopus qu'on ne puisse pas reconnaître. »
Il est grand comme un ours, a une peau tantôt blanchâtre comme du lait d'ânesse, tantôt jaunâtre comme de l'urine.
Il a deux dents qui crachent de la fumée, et des yeux tout à fait humains. Il a la queue d'un petit chien. Il a les pattes griffues.
Et c'est avec ces pattes qu'il attrape ceux qui l'approchent, et celui qui se fait attraper meurt sans espoir de salut.
Le prosopopus est qualifié en langue grecque d'anthropophage, car la plupart du temps il tue les hommes et les mange.
Mais il mange aussi le lait fermenté en grandes quantités.
Récit étrange et pénétrant, entièrement muet, Prosopopus nous révèle un monde d'où, à son image, brutal, sans pitié et grotesque dans sa démesure, jaillit un monstre moderne.
Avec cette oeuvre éblouissante, qui ne ressemble à aucune autre, Nicolas de Crécy laisse dans nos cœurs, une fois le livre refermé, une empreinte indélébile.