Camiothécaire-biblioneur aux lectures éclectiques. Romans, essais, biographies et autobiographies, récits de voyage, bandes dessinées, nouvelles, chroniques, témoignages… des critiques selon l'humeur
Après un livre d’images Noir fort surprenant, Sylvain Tesson revient à la vie avec ce Blanc. Une rando à peaux de phoque à travers les Alpes en compagnie de du Lac et de Rémoville, un autre montagneux rencontré sur les cimes enneigées. Quatre tronçons répartis sur quatre hivers. Du blanc, du blanc, du blanc et du blanc !
Mais trop d’effort vide la tête et ce carnet de bord fini par ressembler à un décompte des dénivelés, cols et bivouacs.
Oui, la plume est sublime et la route est belle. Mais plus créative est l’inaction, mère de l’introspection et des digressions
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Derrière nous, Menton, avec ses maisons jaunes en escalier sur des pentes de fleurs. On goûta l'eau des doigts. Je me léchai l'index car la mer est le sel de la Terre, puis du Lac marmonna « on y va, on n'est pas d'ici ».
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Avec mon ami le guide de haute montagne Daniel du Lac, je suis parti de Menton au bord de la Méditerranée pour traverser les Alpes à ski, jusqu'à Trieste, en passant par l'Italie, la Suisse, l'Autriche et la Slovénie. De 2018 à 2021, à la fin de l'hiver, nous nous élevions dans la neige. Le ciel était vierge, le monde sans contours, seul l'effort décomptait les jours. Je croyais m'aventurer dans la beauté, je me diluais dans une substance. Dans le Blanc tout s'annule - espoirs et regrets. Pourquoi ai-je tant aimé errer dans la pureté ?
S. T.
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Cette nuit, le voyagiste Thomas Cook a fait faillite. Cette nuit, des glaciers ont fondu encore un peu plus et demain leur dissolution sera honorée par une procession d'alpinistes orphelins.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) A l'annonce du décès de Jacques Chirac, une jeune femme se remémore son enfance dans les années 1990. Associant des souvenirs de scènes familiales à des réminiscences de choses vues ou entendues dans les médias, elle explore les liens entre histoires intimes et collectives ainsi que les transformations d'un pays.
Mais pourquoi ne donner que trois étoiles à un recueil de deux livres (Holy, etc. et Oh là mon Dieu) auxquels j’en avais donné quatre ?
Et bien justement, parce que j’ai l’impression de m’être fait refiler une seconde fois la même chose.
Certes, six petits textes et quelques illustrations (microscopiques) viennent agrémenter cette production, mais je suis quand même un peu déçu !
Mais ! Si vous n’avez jamais lu de Fabienne Radi, foncez ! C’est drôle, léger, plein de douceur et de dérision face aux petites choses de la vie. Karen et Karen vous amuseront et Zoé (Moby Dick ?) est une merveille
Alors s’il vous plait, Fabienne, remettez-vous vite à écrire, nous sommes impatients de nouvelles aventures, pensées, réflexions et anecdotes
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) KAREN & KAREN
Dans la famille des interprètes-instrumentistes de genre féminin du siècle dernier, on a connu les chanteuses-pianistes blondes et tourmentées (Véronique Sanson, Diana Krall), les chanteuses-guitaristes brunes et plaintives (Joan Baez, Claudine Longet dans The Party), les chanteuses-violonistes vibrantes ou avant-gardistes (Catherine Lara, Laurie Anderson), ou encore les chanteuses-bassistes frondeuses et boudeuses (Rhonda Smith, Kim Gordon). On a vu beaucoup de chanteuses à qui l'on donnait un tambourin, des clochettes, un triangle ou des maracas, ceci pour occuper leurs mains sur un plateau TV, mais ça ne compte pas. Enfin il y a eu, durant les années 1970 et 1980, deux chanteuses-batteuses qui ont squatté le petit écran de leur pays respectif en portant le même prénom, robuste et taillé comme un fjord norvégien: Karen Carpenter aux USA et Karen Cheryl en France.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Objet bâtard comme le fruit des amours d'un teckel et d'un lévrier afghan, ce livre concentre des formes et des sujets variés : essais convoquant des personnalités de la pop culture, de l'art et de la littérature (Flannery O'Connor, Marina Abramovic, Allen Ginsberg, Paul Thek, Dean Martin, Paul Newman), fictions fabriquées à partir d'oeuvres d'artistes contemporains (Nina Childress, Jean-Luc Manz, Joëlle Flumet), poèmes bricolés en se servant de matériaux trouvés (manuels de développement personnel, injonctions contemporaines au bonheur), ainsi qu'une lettre d'aveux de l'auteure à propos d'une paire de cochons d'Inde
Un bijou de petites phrases, pensées et anecdotes sur le désir et la jouissance.
Le tout entrecoupé de (trop) rares illustrations de Mélanie Baillargé.
Une femme qui parle – avec beaucoup de style – de son amour des femmes, de sexe, de domination, de masturbations et autres infinis plaisirs lesbiens.
Un cadeau à mettre entre tous les doigts polissons sans les avertir
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) - Qu'est-ce qu'il y a là-dedans ? me demande-t-elle en feuilletant le carnet écarlate.
- Le meilleur de moi-même.
- Vraiment ?
Alors je dois lui faire l'amour. Elle lèche une page comme s'il s'agissait de mon sexe, effaçant petit à petit de sa salive tout ce que j'avais écrit, puis offre à ma bouche un petit bout de langue bleue. Vedette anarcha-féministe du wild wild web, Anne Archet fait son entrée officielle dans la littérature papier avec ce recueil joyeux et sans complexe. À la fois torride et tendre, cruel et hilarant, Le carnet écarlate réunit des centaines d'aphorismes et microrécits sulfureux mettant en scène l'érotisme lesbien sous toutes ses formes. Un livre cochon et féministe qui vous fera rire aux éclats, pour un public large (d'esprit).
Avec les dessins de Mélanie Baillairgé
Voilà, c’est la fin. Dans un bloc de béton avec une centaine d’autres pensionnaires dont la moitié n’y résidera pas plus d’une année. Une fin de vie dans un établissement médicalisé. Des souvenirs pour tout bagage, un bagage qui diminue d’ailleurs.
Un moment de réjouissance. Voilà, c’est bientôt fini, je suis prêt, la vie est belle. Elle se termine. Bonheur du crépuscule.
Je ne sais pas si j’y crois, mais c’est très poétique
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Lâcher prise
22 avril 2019
J'ai vécu les poings serrés, me suis agrippé à bien des choses, n'ai rien voulu lâcher. Je tenais à ceci et à cela, tout me semblait devoir dépendre de moi. Voilà un défaut tout à fait humain, nous nous croyons responsables de tout.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Je suis prêt, m'efface délicatement derrière l'éclat d'une dernière joie : celle de voir ma vie se terminer. Je m'en réjouis comme j'ai dû me réjouir de voir ma vie commencer. Je m'en réjouis comme d'une évidence absolue, et parce que je suis enfin conscient et certain, là, maintenant, de la joie inouïe qu'est la vie. »
Tels sont les mots du résident d'une maison de retraite qui nous raconte son histoire et ses bonheurs d'homme au crépuscule de la vie. Hédoniste et mélancolique, il contemple les beautés et les douceurs qui l'entourent.
Un roman qui porte une voix rare, d'une grande délicatesse. Une tendre méditation sur la vie, le temps et la nature
Que dire de ce recueil de nouvelles un peu quelconques d’un auteur si talentueux. Qu’il a besoin de se raconter, qu’il est en panne de créativité, qu’il vieillit, qu’il se retrouve en manque de liquidités ?
Huit nouvelles pas forcément désagréables qui parlent de lui, de souvenirs, de musique, de rencontres féminines, de baseball ou même parfois un peu fantastiques avec un singe qui savait parler (et qui sauve ce recueil).
La sensation de passer une soirée avec un grand-père qui raconte des anecdotes de sa longue vie : – en 1964, je me souviens, les Beatles chantaient « I Want to Hold Your Hand »
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Après le succès de Des hommes sans femmes, Murakami renoue avec la forme courte. Composé de huit nouvelles inédites, écrites, comme son titre l'indique, à la première personne du singulier, un recueil troublant, empreint d'une profonde nostalgie, une sorte d'autobiographie déguisée dont nous ferait cadeau le maître des lettres japonaises.
Un homme se souvient
De la femme qui criait le nom d'un autre pendant l'amour
Du vieil homme qui lui avait révélé le secret de l'existence, la « crème de la crème » de la vie
De Charlie Parker qui aurait fait un merveilleux disque de bossa-nova s'il en avait eu le temps
De sa première petite amie qui serrait contre son coeur le vinyle With the Beatles
Des matchs de base-bail si souvent perdus par son équipe préférée
De cette femme si laide et si séduisante qui écoutait le Carnaval de Schumann
Du singe qui lui avait confessé voler le nom des femmes qu'il ne pouvait séduire
De ces costumes qu'on endosse pour être un autre ou être davantage nous-même.
Un homme, Murakami peut-être, se souvient que tous ces instants, toutes ces rencontres, anodines ou essentielles, décevantes ou exaltantes, honteuses ou heureuses, font de lui qui il est
Assis dans un fauteuil dans une belle propriété de son ami (bientôt ex-ami ?) au bout du Cap-Ferret, Frédéric se désole de vieillir.
Mais hélas, l’Atlantique, vagues après vagues, une marée après l’autre grignote les côtes aussi inexorablement que les années grisonnent les tempes des cinquantenaire.
Le petit Frédo nostalgise en se lamentant…
… mais au moins, ne s’évertuait-il pas à faire des phrases dans son roman français
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Je voudrais faire ici un aveu : je suis complotiste.
Je pense que la nature conspire pour éradiquer l'homme.
L'être humain ayant causé trop de dégâts à la surface de la Terre, il est logique qu'elle songe à s'en débarrasser.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Au hasard d’une galerie de Saint-Jean-de-Luz, Frédéric Beigbeder aperçoit un tableau représentant une cabane, dans une vitrine. Au premier plan, un fauteuil couvert d’un coussin à rayures, devant un bureau d’écrivain avec encrier et carnets, sur une plage curieusement exotique. Cette toile le fait rêver, il l’achète et soudain, il se souvient : la scène représente la pointe du bassin d’Arcachon, le cap Ferret, où vit son ami Benoît Bartherotte. Sans doute fatigué, Frédéric prend cette peinture pour une invitation au voyage. Il va écrire dans cette cabane, sur ce bureau.
Face à l’Atlantique qui à chaque instant gagne du terrain, il voit remonter le temps. Par vagues, les phrases envahissent d’abord l’espace mental et la page, réflexions sur l’écriture, la solitude, la quête inlassable d’un élan artistique aussi fugace que le désir, un shoot, un paysage maritime. Puis des éclats du passé reviennent, s’imposent, tels « un mur pour se protéger du présent ». A la suite d’Un roman français, l’histoire se reconstitue, empreinte d’un puissant charme nostalgique : l’enfance entre deux parents divorcés, la permissivité des années 70, l’adolescence, la fête et les flirts, la rencontre avec Laura Smet, en 2004… Temps révolu. La fête est finie. Pour faire échec à la solitude, reste l’amour. Celui des siens, celui que Bartherotte porte à son cap Ferret. Et Beigbeder, ex dandy parisien devenu l’ermite de Guétary , converti à cette passion pour un lieu, raconte comment Bartherotte, «Hemingway en calbute», s’est lancé dans une bataille folle contre l’inéluctable montée des eaux, déversant envers et contre tous des millions de tonnes de gravats dans la mer. Survivaliste avant la lettre, fou magnifique construisant une digue contre le réchauffement climatique, il réinvente l’utopie et termine le roman en une peinture sublime et impossible, noyée d’eau et de soleil. La foi en la beauté, seule capable de sauver l’humanité.
Une expérience de lecture, unique et bouleversante, aiguisée, impitoyable, poétique, et un chemin du personnel à l’universel
A l’occasion de l’exhumation de sa tante pour être placée dans le caveau familial, Théodore philosophe sur le sens de la vie et de vivre avec un certain humour désabusé.
Un Théodore dilettante de sa propre vie, vieil étudiant incapable de s’astreindre à un travail et satisfait d’une vie un peu minable et sans ambitions.
Bof. Une lecture d’un certain ennui (vraisemblablement assumé) à conseiller aux fétichistes de la date du 16 décembre ou des vieilles tantes décédées
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Cette «jeune prose» frappe autant par son aisance et sa vigueur que par la maturité de l’esprit qui la dirige, et les variations sur la mort qui forment le sujet de ce petit livre ont tant de vivacité, d’humour, de profondeur, qu’on le lit d’un trait avec un étrange plaisir. L’auteur s’y peint sous l’aspect peu flatteur d’un raté, vieil étudiant attardé, incapable de s’astreindre à un métier monotone, et supportant sans trop de répugnance sa vie minable dans une mansarde. Le prétexte de ses méditations sur la mort est l’exhumation des restes d’une tante, qu’il escorte ensuite jusqu’à un caveau de famille. Au cours de cette macabre expédition, il est visité par des souvenirs si vivaces des morts de sa famille et de son entourage qu’il acquiert le sentiment d’une sorte d’osmose, de douce familiarité entre les deux mondes et qu’il se représente lui-même comme un genre d’acrobate réussissant des bonds inimitables entre le temporel et le surnaturel. Il puise dans ces exercices un réel apaisement à ses regrets, à ses remords, même, et, sous le vocable un peu vague de l’« amour », y trouve contentement et plénitude
Jean-Paul a bien failli claquer sur un court de tennis lors d’un jeu avec Archie, un pote blindé de thunes (bien blindé, quand même !). Le voilà à passer au bloc entre les mains de la superstar des chirurgiens du myocarde
Passé le name dropping de toutes ses connaissances si illustres… Jean-Paul commence à réfléchir sur sa vie, ses relations et son besoin de statut social (pas sûr qu’il soit arrivé si loin dans ses réflexions), la célébrité, ses ex et sa présente, sa descendance et ses fantômes.
Introspection, humour et belle écriture
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Par quelle alchimie une peine de cœur peut-elle se transformer en accident cardiaque ?
Que se passe-t-il secrètement dans un cœur ardent et vivant qui, d'un coup, se brise ?
Tel est le mystère que tente d'éclaircir ce récit véridique, drolatique et fantasmagorique.
On y croise des balles de tennis et le chat de Schrödinger, des femmes fatales et un héros virgilien, une Thunderbird rutilante et des effluves d'outremer, Françoise Sagan et Michel Berger, des amitiés salvatrices, quelques doses de morphine et des souvenirs embrouillés de rêves.
Une saison en enfer ? Un aller-retour dans le néant ? Certainement pas.
Voici plutôt la confession d'un homme allégé, réconcilié, détaché, libéré, qui choisit d'en finir avec sa part de comédie.
Et de se raconter, soudain, à cœur ouvert
Dans les longueurs, sur les largeurs et vers la hauteur, Sylvain Tesson parcours le monde, les jours et les nuits. Il rencontre et se rencontre.
Un livre de vagabonderies.
L’amour de la route « by fair means » comme un wanderer ou un waldganger. Le désir de solitude, la détestation de la domination mâle, certains bivouac mémorables, l’attrait pour le lac Baïkal (qu’il racontera dans les forêts de Sibérie) l’escalade des cathédrales de pierre…
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Pour ralentir la fuite du temps, Sylvain Tesson parcourt le monde à pied, à cheval, à vélo ou en canot. Dans les steppes d'Asie centrale, au Tibet, dans les forêts françaises ou à Paris, il marche, chevauche, escalade aussi les monuments à mains nues. Pour mieux embrasser la terre, il passe une nuit au sommet de Notre-Dame de Paris, bivouaque dans un arbre ou sous un pont, construit des cabanes.
Cet amoureux des reliefs poursuit le merveilleux et l'enchantement. Dans nos sociétés de communication, il en appelle à un nouveau nomadisme, à un vagabondage joyeux. Ce Petit traité sur l'immensité du monde est un précis de désobéissance naturaliste, une philosophie de poche buissonnière, un récit romantique contre l'ordre établi