Putain

Nelly Arcan raconte sa vie avec des phrases longues comme les pages pour tenter de décrire tout ce qu’elle n’arrive pas à dire. Une lecture hypnotique qui parle d’une société malade, de la valorisation et marchandisation du corps, de la beauté et des choses.

Alors pour les antidépresseurs je ne dis pas non, en attendant que ma mère meure je veux bien prendre tout ce qu'on peut m'offrir, des comprimés bleus le jour et des blancs la nuit, je veux bien rire d'un faux rire et sans raison sous la pression de la dopamine, rire en attendant de trouver la force de me tuer,
Putain de Nelly Arcan

Un texte glaçant qui se déroule sans fin pour tenter de trouver… Mais trouver quoi dans toute cette putasserie ou les hommes paient pour baiser des jeunes femmes de l’âge de leurs filles ? Qu’un bain de mousse et un sac Hermès peuvent apporter du bonheur ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je n'ai pas l'habitude de m'adresser aux autres lorsque je parle, voilà pourquoi il n'y a rien qui puisse m'arrêter, d'ailleurs que puis-je vous dire sans vous affoler, que je suis née dans un village de campagne à la lisière du Maine, que j'ai reçu une éducation religieuse, que mes professeurs étaient toutes religieuses, des femmes sèches et exaltées devant le sacrifice qu'elles faisaient de leur vie, des femmes que je devais appeler mères et qui portaient un faux nom qu'elles devaient d'abord se choisir, sœur Jeanne pour Julie et sœur Anne pour Andrée, des sœurs-mères qui m'ont enseigné l'impuissance des parents à nommer leurs enfants, à les définir adéquatement auprès de Dieu, et que voudriez-vous savoir de plus, que j'étais somme toute normale, plutôt douée pour les études, que dans cette campagne de fervents catholiques où j'ai grandi on renvoie les schizophrènes aux prêtres pour qu'on les soigne par exorcismes, que la vie y est très belle lorsqu'on se contente de peu, lorsqu'on a la foi ? Et quoi encore, que j'ai joué du piano pendant douze ans et que j'ai voulu comme tout le monde quitter la campagne pour habiter la ville, que depuis je n'ai plus joué une note et que je me suis retrouvée serveuse de bar, que je me suis faite putain pour renier tout ce qui jusque-là m'avait définie, pour prouver aux autres qu'on pouvait simultanément poursuivre des études, se vouloir écrivain, espérer un avenir et se dilapider ici et là, se sacrifier comme l'ont si bien fait les sœurs de mon école primaire pour servir leur congrégation ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Cachée derrière les rideaux de sa chambre, une prostituée patiente entre deux clients. L'attente se nourrit du souvenir : une famille dévote, une mère absente et un père distrait. Et parfois la jouissance éprouvée avec ces hommes auxquels elle fait l'amour, ces hommes qu'elle déteste peut-être autant qu'elle-même. Un récit obsessionnel qui ressemble à un exorcisme désespéré pour se maintenir en vie

Guerre

C’est rêche, ça racle, c’est rude, sale, grossier, suintant de pus et de vomissements.
C’est aussi un premier jet qui n’avait jamais été corrigé ou repris, une découverte étonnante et fascinante.

Guerre de Louis-Ferdinand Céline

Un livre partiellement autobiographique où, durant la première guerre mondiale, Ferdinand blessé au bras et à l’oreille se retrouve hospitalisé à l’arrière du front avec un autre blessé, un souteneur violent qui ne pense qu’à faire venir sa protégée.

Une ambiance puante et merdique, des scènes à peine soutenables, une guerre où les hommes sont de la viande pour les canons et les femmes de la chair pour les hommes.

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Pas tout à fait. J'ai bien dû rester là encore une partie de la nuit suivante. Toute l'oreille à gauche était collée par terre avec du sang, la bouche aussi. Entre les deux y avait un bruit immense. J'ai dormi dans ce bruit et puis il a plu, de pluie bien serrée. Kersuzon à côté était tout lourd tendu sous l'eau. j'ai remué un bras vers son corps. j'ai touché. L'autre je pouvais plus. Je ne savais pas où il était l'autre bras. Il était monté en l'air très haut, il tourbillonnait dans l'espace et puis il redescendait me tirer sur l'épaule, dans le cm de la viande. Ça me faisait gueuler un bon coup chaque fois et puis c'était pire.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Parmi les manuscrits de Louis-Ferdinand Céline récemment retrouvés figurait une liasse de deux cent cinquante feuillets révélant un roman dont l'action se situe dans les Flandres durant la Grande Guerre. Avec la transcription de ce manuscrit de premier jet, écrit quelque deux ans après la parution de Voyage au bout de la nuit (1932), une pièce capitale de l'œuvre de l'écrivain est mise au jour. Car Céline, entre récit autobiographique et œuvre d'imagination, y lève le voile sur l'expérience centrale de son existence : le traumatisme physique et moral du front, dans l'« abattoir international en folie ». On y suit la convalescence du brigadier Ferdinand depuis le moment où, gravement blessé, il reprend conscience sur le champ de bataille jusqu'à son départ pour Londres. À l'hôpital de Peurdu-sur-la-Lys, objet de toutes les attentions d'une infirmière entreprenante, Ferdinand, s'étant lié d'amitié avec le souteneur Bébert, trompe la mort et s'affranchit du destin qui lui était jusqu'alors promis. Ce temps brutal de la désillusion et de la prise de conscience, que l'auteur n'avait jamais abordé sous la forme d'un récit littéraire autonome, apparaît ici dans sa lumière la plus crue. Vingt ans après 14, le passé, « toujours saoul d'oubli », prend des « petites mélodies en route qu'on lui demandait pas ». Mais il reste vivant, à jamais inoubliable, et Guerre en témoigne tout autant que la suite de l’œuvre de Céline

Mécaniques du fouet : vies de Sainte Eugénie

Une biographie mixant la bande dessinée, la peinture, le dessin, du texte et des réflexions personnelles. Un livre atypique et biscornu comme le fut la vie d’Eugénie Guillou (1861 – date de mort inconnue) et aussi fouillée que les traces de sa vie sont lacunaires.

Mécaniques du fouet : vies de Sainte Eugénie de Christophe Dabitch et Jorge González

De religieuse à mère maquerelle prodiguant le fouet, la vie d’Eugénie s’est déroulée à l’inverse d’une rédemption jusqu’à une fin inconnue.

En reprenant les rares vestiges de son passage principalement constitués de son dossier judiciaire, Christophe Dabitch restitue une histoire hypnotique – et un peu glaucasse quand même – très bien mise en valeur par les peintures et dessins aux techniques mixtes et déroutantes de Jorge González.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Eugénie Guillou fut nonne puis spécialiste de la fessée et des mises en scène sexuelles à Paris, au début du XXe siècle.
On la surnommait «La Religieuse»
Elle voulait être indépendante et inventer sa vie, elle aimait le théâtre du fouet. Disparue, morte, oubliée, elle n'a laissé que quelques traces, comme des petits cailloux.
Aujourd'hui, celui qui vous raconte son histoire a ramassé les petits cailloux.
Il y a un siècle entre eux, mais ils se parlent.
Il l'appelle Eugénie, puis Sainte Eugénie, parce qu'elle le vaut bien.
Laisse-moi t'appeler mon Chou.
Ce n'est pas vraiment mon style...
Ça fait pute, comme dans les romans de genre.
Ça doit te plaire puisque tu vas raconter mon histoire

Delirium

Bien souvent dans les romans de gare mal fichus, les rêves servent de cache-misère aux auteurs pour trouver une fin à leurs abracadabrantesques délires. Mais là, non. C’est pas Inception mais c’est un peu cul, un peu valaisan, pas assez gore et plutôt drôle.

Delirium de Louise Anne Bouchard

Un détective privé à la recherche d’infos sur une ancienne disparition mystérieuse, huit beautés marchandes de leurs charmes au Dolly Pop.

Une histoire qui n’est pas sans rappeler celle du célèbre portrait d’Oscar le Sauvage.

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Couleur3 et Canal diffusaient les infos en boucle : on recherchait un homme disparu depuis soixante-douze heures.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Jérôme boit trop, baise trop, et s’est fait virer de son job.
Il va se refaire une santé en Valais. Et là, encore, il baise trop, boit trop.
Dans son cauchemar, on l’enlève et on le malmène : séquestration et sévices pour l’empêcher de toucher à la légende du Dolly Pop, la mystérieuse disparition de huit beautés qui gagnaient leur vie en Valais en vendant leurs charmes et parfois leurs petites culottes

10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange

Du feel-good pas trop mal foutu, l’histoire d’une prostituée retrouvée morte dans une benne à ordures d’Istanbul.

10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange de Elif Shafak

L’occasion d’approcher la condition de la femme en Turquie et de donner la voix à celles (et ceux aussi) que l’on entend jamais.

Un livre gentil et bienveillant aux nombreuses ellipses sur les sujets trop glauques, et pour autant sans complaisance tant les non dits sont clairs (un exercice d’équilibrisme assez réussi)

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Et si notre esprit fonctionnait encore quelques instants après notre mort biologique ? 10 minutes et 38 secondes exactement. C'est ce qui arrive à Tequila Leila, prostituée brutalement assassinée dans une rue d'Istanbul. Du fond de la benne à ordures dans laquelle on l'a jetée, elle entreprend alors un voyage vertigineux au gré de ses souvenirs, d'Anatolie jusqu'aux quartiers les plus mal famés de la ville.

En retraçant le parcours de cette jeune fille de bonne famille dont le destin a basculé, Elif Shafak nous raconte aussi l'histoire de nombre de femmes dans la Turquie d'aujourd'hui. À l'affût des silences pour mieux redonner la parole aux « sans-voix », la romancière excelle une nouvelle fois dans le portrait de ces « indésirables », relégués aux marges de la société

La Maison

Emma Becker se retrouve à Berlin durant 2 ans dans un bordel (deux, en fait, le premier étant bien sordide) pour écrire un livre, témoignage de son expérience dans une maison close où elle s’appellera Justine.

La Maison de Emma Becker

C’est parfois drôle, des fois sexe, souvent intime et toujours très humain.

Un livre féministe ou celui d’un idiote utile cautionnant la prostitution, roman, récit, gonzo-journalisme ou autobiographie ? En tout cas, un vrai tendre moment

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
J'ai toujours cru que j'écrivais sur les hommes. Avant de m'apercevoir que je n'écris que sur les femmes. Sur le fait d'en être une. Écrire sur les putes, qui sont payées pour être des femmes, qui sont vraiment des femmes, qui ne sont que ça ; écrire sur la nudité absolue de cette condition, c'est comme examiner mon sexe sous un microscope. Et j'en éprouve la même fascination qu'un laborantin regardant des cellules essentielles à toute forme de vie

Margot la ravaudeuse

Courtisane affairée, Margot raconte comment elle pu s’assurer une jolie rente à l’aide de ses charmes… Bien aidée par sa beauté, sa complaisance et la niaiserie des hommes.

Margot la ravaudeuse de Louis-Charles Fougeret de Monbron

Un joli manuel qui (bien heureusement) ne s’embarrasse pas de moralité et où les flatteurs vivent aux dépens de ceux qui les écoutent

Coquin et amusant

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Louis-Charles Fougeret de Monbron fut un homme de lettres, doublé d'un grand voyageur. Il mena une vie d'aventure et de bohème. Il profita de ses périples et de sa connaissance du vaste monde pour écrire Le Cosmopolite ou le Citoyen du monde. On lui doit également des pamphlets, la traduction d'un livre érotique anglais - Fanny Hill - et des récits libertins, dont le présent Margot la ravaudeuse, qui lui valut la prison. Une jeune ravaudeuse quitte le domicile parental pour user de ses charmes et soutirer quelque argent à de riches messieurs.
Le plaisir, elle le prend en compagnie d'hommes de bien plus basse extraction. Dans une langue impeccable et avec un humour féroce, Fougeret de Monbron brosse en vérité le portrait des bourgeois et des notables du XVIIIe siècle, du milieu de la finance à celui de l'église, à travers le regard d'une femme qui assume sa liberté sexuelle tout en portant un regard on ne peut plus lucide sur les travers des « grands » hommes qui pensent la posséder, et le monde avec

La chair

Une femme mûre rencontre un gigolo. Mais est-il possible de le revoir une seconde fois sans risque. Et ensuite, et encore ?
Comme une plongée dans des jeux dangereux.

La chair de Rosa Montero
La chair de Rosa Montero

De la confusion des sens et des sentiments.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Pas facile d'accepter son âge quand on a soixante ans, qu'on vit seule et que votre amant vous quitte pour faire un enfant avec sa jeune épouse. Soledad engage donc un gigolo de trente ans pour l'accompagner à l'opéra et rendre jaloux le futur père. Mais à la sortie, un événement inattendu et violent bouleverse la situation et marque le début d'une relation trouble, volcanique et peut-être dangereuse.
Soledad se rebelle contre le destin avec rage et désespoir, avec humour aussi, et le récit de son aventure se mêle aux histoires des écrivains maudits de l'exposition qu'elle prépare pour la Bibliothèque nationale.

La Chair est un roman audacieux et plein de surprises, l'un des plus subtils et personnels de l'auteur. Son intrigue touchante nous parle du passage du temps, de la peur de la mort, de l'échec et de l'espoir, du besoin d'aimer et de l'heureuse tyrannie du sexe, de la vie comme un épisode fugace au cours duquel il faut dévorer ou être dévoré. Le tout dans un style allègrement lucide, cruel et d'une ironie vivifiante.

Une grande romancière décortique avec acuité et humour les sentiments d'une séductrice impénitente aux prises avec les ravages du temps

Histoire de Rosa qui tint le monde dans sa main

C’est qui qu’a la plus grosse ?

Fin de soirée et fins bourrés, les mâles du village se lancent dans le concours de celui qui est le meilleur au plumard. Faut-il encore trouver un arbitre. Et le meilleur, c’est quoi ?

Histoire de Rosa qui tint le monde dans sa main de Bernard Ollivier
Histoire de Rosa qui tint le monde dans sa main de Bernard Ollivier

Un bouquin sans trop de style mais plein d’humour et de malice.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Mariée à seize ans et violée le lendemain de ses noces par un ivrogne ayant le double de son âge, la jeune Rosa, paysanne normande du début du XXe siècle, semblait avoir un destin tout tracé : subir et se taire. Les hommes ont tout, peuvent tout, décident de tout. Sauf lorsque leurs passions les emportent au-delà du raisonnable et que la petite Rosa, devenue femme, les prend au piège de leurs rêves et de leurs vices. La grande Rosa tiendra alors le monde des hommes dans sa main...