Assise, debout, couchée !

Un livre surprise. Alors que je m’attendais à un essai sur les femmes qu’on traite comme des chiens (le parallèle est intéressant et y est quelque peu (oui, un petit peu quand même) abordé), Ovidie parle principalement ici des chiens de sa vie, Eddy, Raziel, Alaska, Freyja et Brünnhilde.

Alaska, la soumise
2012. À dix ans, Raziel se fait âgé. Il a cette fierté touchante des vieux molosses prêts à partir au combat pour peu qu'on leur demande, les yeux embrumés par la cataracte, quelques dents en moins et une légère surdité. Le tueur de taureaux est devenu un pépère qui vieillit sur son coussin. Je me mets en tête de lui trouver une amie. Mais Raziel est un chien compliqué, un brin égoïste, heureux d'être le clebs unique de la famille. Il faut qu'il choisisse lui-même celle qui partagera son panier,
Assise, debout, couchée ! de Ovidie

Et c’est une très bonne surprise mêlée d’anecdotes, de pensées, d’amour et de deuils (comme toujours avec les chiens).

Et la vision d’un Jésus bad ass entouré de femmes et de rebuts ou de Luther fantasmant sur des petits chiens d’or aux boucles en pierres précieuses m’a bien amusé

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
« Prends le chien avec toi ! » J'ai dix ans et je pars sur mon vélo acheter des barres chocolatées à la petite épicerie du village voisin, tenue par une femme à l'âge indéfinissable qui passe ses journées à tricoter.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les chiens accompagnent Ovidie depuis l'enfance. Animaux protecteurs, membres de la famille, thérapeutes, ils l'escortent. Ils sont des marqueurs biographiques, indissociables des moments importants de son existence.

Ovidie raconte ce lien, d'une plume précise, drôle et bouleversante. Elle questionne la place unique des chiens dans la vie des femmes. Car les chiens ne sont pas seulement les meilleurs amis de l'homme. Derniers remparts contre les agressions, enfants de substitution, ils ont passé avec les femmes une alliance mystérieuse pour survivre à la violence.

S’adapter

Il y eu d’abord l’aîné, puis la cadette et… l’inadapté. Né aveugle et amorphe, le cerveau mal connecté il ne vivra pas plus de 5 ans, peut-être un peu plus.

Ce livre raconte l’aîné, attentif, aimant et protecteur. Mais aussi la cadette en colère de son manque d’empathie, de ne rien ressentir.

Au bout de trois mois, on s'aperçut que l'enfant ne babillait pas. Il demeurait silencieux la plupart du temps, sauf pour pleurer. Parfois un sourire se dessinait, un froncement de sourcils, un soupir après le biberon, un sursaut lorsqu'une porte claquait. C'était tout. Pleurs, sourire, froncement, soupir, sursaut. Rien d'autre. Il ne gigotait pas. Il restait calme - « inerte », pensaient ses parents sans le dire. Il ne manifestait aucun intérêt pour les visages, les mobiles suspendus, les hochets. Surtout, ses yeux sombres ne se posaient sur rien.
S’adapter de Clara Dupont-Monod

Viendra encore le petit dernier, celui à qui on racontera.

Une histoire terrible toute en beauté. Peut-être trop. Sûrement trop, clairement trop. Mais c’est très beau

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
L'aîné
Un jour, dans une famille, est né un enfant inadapté. Malgré sa laideur un peu dégradante, ce mot dirait pourtant la réalité d'un corps mou, d'un regard mobile et vide. « Abîmé » serait déplacé, « inachevé » également, tant ces catégories évoquent un objet hors d'usage, bon pour la casse.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'est l'histoire d'un enfant différent, toujours allongé, aux yeux noirs qui flottent, un enfant inadapté qui trace une frontière invisible entre sa famille et les autres. C'est l'histoire de sa place dans la maison cévenole où il naît, au milieu de la nature puissante ; de sa place dans la fratrie et dans les enfances bouleversées. Celle de l'aîné, qui, dans sa relation fusionnelle avec l'enfant, s'abandonne et se perd. Celle de la cadette, dans la colère et le dégoût de celui qui a détruit l'équilibre. Celle du petit dernier qui a la charge de réparer, tout en vivant escorté d'un frère fantôme.
Comme dans un conte, les pierres de la cour témoignent. Comme dans les contes, la force vient des enfants, de l'aîné qui aime follement, de la cadette révoltée. Du dernier qui saura réconcilier les histoires.
La naissance d'un enfant handicapé racontée par sa fratrie. Magnifique et lumineux

Mortelle transparence

Ecrire un livre grand public sur la transparence des informations à l’heure numérique relève de la gageure. Les enjeux sont financièrement, politiquement, socialement, économiquement, individuellement, sociétalement (j’en passe) sont tellement vastes, importants, imbriqués et complexes qu’ils en deviennent abstraits tout en restant primordiaux.

Mortelle transparence de Denis Olivennes et Mathias Chichportich
Mortelle transparence de Denis Olivennes et Mathias Chichportich

Alors, à qui s’adresse ce livre qui tente de faire le tour de la question ? À toute personne un peu curieuse qui en ressortira fatalement dubitative. La vitesse des évolutions rend obsolètes les positions aussi rapidement que les spaghettis passent d’al dente à une bouillasse infâme.

Alors, autruche ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
La transparence devient totale. Nos déplacements, nos achats, nos goûts, nos maladies, nos échanges, nos conversations : rien n'y échappe. Au bureau, des entreprises expérimentent des dispositifs enregistrant les conversations de leurs employés.

Une opération « suspecte » sur votre compte ? Votre banquier a l'obligation de vous dénoncer à une cellule anti-fraude. Vous souhaitez en parler à votre avocat ? Un juge d'instruction l'a peut-être placé sur écoute. Pour un entretien d'embauche, une visite approfondie des réseaux sociaux - ah les photos sur Facebook ! - est devenu un préalable.

Bientôt notre ADN sera séquencé de manière à ce que nos maladies soient prévisibles : les médecins s'en félicitent, les assureurs se frottent les mains.

Quand, au diktat de la transparence, s'ajoutent les effets pervers du progrès technique, c'est toute notre vie qui bascule.

Peut-on encore inverser le cours des choses ? Sommes-nous condamnés à l'autodestruction de cette société de libertés que nous avons mis tant de siècles à constituer ?

Big Data : le nouveau visage de Big Brother ?

Denis Olivennes et Mathias Chichportich analysent cette marche forcée et inconsciente vers une société soumise aux injonctions souvent absurdes d'une prétendue modernité

Repose-toi sur moi

Sympa, cette passion, ça emporte.

Repose-toi sur moi de Serge Joncour
Repose-toi sur moi de Serge Joncour

Un livre sur la force, celle qui rassure et protège. Un peu « cliché sexiste » quand même, cette histoire de femme en désarroi qui recherche l’épaule solide. Non ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Aurore est une styliste reconnue et Ludovic un agriculteur reconverti dans le recouvrement de dettes. Ils n'ont rien en commun si ce n'est un curieux problème : des corbeaux ont élu domicile dans la cour de leur immeuble parisien. Elle en a une peur bleue, alors que son inflammable voisin saurait, lui, comment s'en débarrasser. Pour cette jeune femme, qui tout à la fois l'intimide et le rebute, il va les tuer. Ce premier pas les conduira sur un chemin périlleux qui, de la complicité à l'égarement amoureux, les éloignera peu à peu de leur raisonnable quotidien.

Dans ce grand roman de l'amour et du désordre, Serge Joncour porte loin son regard : en faisant entrer en collision le monde contemporain et l'univers intime, il met en scène nos aspirations contraires, la ville et la campagne, la solidarité et l'égoïsme, dans un contexte de dérèglement général de la société où, finalement, aimer semble être la dernière façon de résister

Les invasions quotidiennes

Et voilà plusieurs jours que je me sens envahi par les invasions quotidiennes de Mazarine Pingeot.

Les invasions quotidiennes de Mazarine Pingeot
Les invasions quotidiennes de Mazarine Pingeot
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis quelque temps, rien ne tourne plus rond dans la vie de Joséphine. D'abord, c'est son ex-mari, père de ses deux garçons, qui ne semble pas vraiment d'accord sur le sens à donner au mot «séparation». Ensuite, c'est l'inspiration qui lui fait faux bond, au moment même où son nouvel éditeur s'impatiente de lire son prochain livre pour enfants, peuplé comme toujours d'animaux malades. Et puis, ce matin-là, choisissant l'instant où son banquier l'appelle (pour lui parler de son découvert), c'est son lave-vaisselle qui la lâche. Le début de la fin ? Ou bien... le début d'une nouvelle vie ?

Rompant sans crier gare avec la gravité de ses précédents ouvrages, Mazarine Pingeot dévoile un surprenant talent pour la comédie. Au fil de mésaventures désopilantes, son personnage, gaffeuse et borderline, incarne cette génération de mères célibataires, croulant sous les contraintes du quotidien, mais toujours en quête d'amour