Camiothécaire-biblioneur aux lectures éclectiques. Romans, essais, biographies et autobiographies, récits de voyage, bandes dessinées, nouvelles, chroniques, témoignages… des critiques selon l'humeur
Pour Britney se lit dans un souffle, sans répit. C’est dur, la lecture est harassante, exigeante. Mais quel texte !Pour Britney de Louise ChennevièreNelly Arcan et Britney Spears, deux mêmes jeunes femmes broyées sous le regard des hommes. Et, peut-être pire encore, sous leur propre regard sous le regard des hommes.
Et il ne s’agit pas que du regard ! Regard n’est qu’un euphémisme maladroit.
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) J'ai rouvert l'été dernier, des cartons qui dormaient, depuis plus de vingt ans, dans un box triste d'un entrepôt triste qui se dresse le long du périph - je passais quelquefois devant en rentrant en taxi d'une soirée loin de l'autre côté, avec des amis ivres et en silence je pensais, alors c'est là que repose mon enfance. C'est une drôle de chose que l'enfance, c'est, la chose la plus loin et peut-être, la plus proche. Je sais de source vive que, de certaines enfances on ne se remet pas.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Ce que je vois quand je regarde la photo de cette petite fille à l'aube de ce siècle nouveau, c'est qu'elle ne sait rien encore de ce que le monde va lui apprendre, et qu'être une petite fille est pour elle une joie parce que ça veut dire pouvoir devenir Britney Spears et que Britney Spears pour elle alors, c'est chanter et danser, c'est être dans son corps, sans crainte et sans distance, se sentir très vivante, c'est se tenir, très loin de la peur mais.
Lire Siri Hustvedt est une expérience impressionnante. Une cuture folle, un discours argumenté, des références précises… Il y a tout ça ! Bon, c’est clair que je me suis parfois senti complètement largué, mais elle a chaque fois réussi à me rattraper. C’est brillant !
Une femme regarde les hommes regarder les femmes de Siri Hustvedt
Ce recueil d’une dizaine d’articles autour de différent-e-s artistes nous parle d’art et de féminisme. De ce regard masculin, assez similaire au mansplaining, plein de condescendence, manipulation et supériorité
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Ce que les artistes disent de leur propre travail est fascinant, car cela nous raconte quelque chose au sujet de ce qu'ils croient faire.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Siri Hustvedt, fidèle à son engagement envers la cause des femmes, analyse ici la nature et les implications du regard, bien souvent manipulateur, voire prédateur, que les artistes de sexe masculin tendent à poser sur les femmes (quelles soient « simples » modèles ou elles-mêmes artistes). Mais elle s'attache surtout à identifier les partis pris, conscients et inconscients, qui affectent notre manière de juger l'art, la littérature et le monde en général.
Convoquant entre autres les oeuvres de Picasso, De Kooning, Max Beckmann, Jeff Koons, Robert Mapplethorpe, en passant par Pedro Almodovar, Wim Wenders, Louise Bourgeois ou Emily Dickinson, l'auteur d'Un monde flamboyant développe une réflexion sur l'art dans ses rapports avec la perception ; elle interroge la façon dont nous évaluons la notion de créativité et montre que les critères d'appréciation se modifient constamment dès lors que nous nous déplaçons d'une culture à une autre ou d'une période de l'histoire à la suivante - alors même que d'aucuns prétendent que tout art digne de ce nom relève de critères tout à la fois universels, intemporels et quasi immuables.
S'insurgeant contre un tel postulat, Siri Hustvedt, respectueuse de l'éthique intellectuelle dont elle a toujours fait preuve en tant qu'essayiste, privilégie les questions par rapport aux réponses et se montre avant tout soucieuse d'ouvrir des espaces de libre discussion, invitant le lecteur à adopter divers angles d'approche, comme pour mieux lui laisser le choix ultime de celui qu'il fera sien.